
« Une journée déchirante » : La dernière usine de pâtes et papiers du Nord-Est mise à l’arrêt à Kapuskasing

KAPUSKASING – Coup dur pour le Nord de l’Ontario : la dernière usine de pâtes et papiers du Nord-Est ontarien, exploitée par Kap Paper, a annoncé ce lundi qu’elle cesse ses activités.
L’entreprise affirme, par voie de communiqué, que cette décision résulte d’échanges soutenus avec les gouvernements et les partenaires dans les derniers mois et années, mais reflète surtout l’absence de solutions rapides pour maintenir la chaîne d’approvisionnement forestière de la région.
ONFR a tenté de rejoindre l’usine, mais n’a pas encore reçu de réponse afin de savoir si l’arrêt des activités était définitif ou celle-ci était simplement mise en veille dans l’attente d’une éventuelle vente des actifs.
« C’est une journée déchirante pour notre personnel et notre communauté », a déclaré le président-directeur général de Kap Paper, Terry Skiffington qui a ajouté que bien que des discussions constructives aient eu lieu avec la province et le gouvernement fédéral pour un soutien à moyen et long terme, aucune aide immédiate n’est disponible pour le moment.
Sous l’impulsion de la province, Kap Paper avait sollicité le gouvernement fédéral afin de trouver une solution à plus long terme via un fonds créé pour répondre aux perturbations commerciales avec les États-Unis. Selon Terry Skiffington, bien que les premières réponses soient encourageantes, aucun soutien immédiat n’était disponible.
« Malheureusement, Kap Paper ne dispose pas des ressources nécessaires pour poursuivre ses activités et est contrainte de les suspendre », précise-t-il.
Les employés au cœur des préoccupations
« C’est vraiment une journée difficile pour nous, je suis tellement désolé de l’apprendre aujourd’hui », a réagi de son côté Dave Plourde, maire de Kapuskasing en entrevue avec ONFR.
Ce sont près de 475 emplois directs à Kapuskasing et jusqu’à 2500 emplois liés dans les scieries, le transport, la maintenance et les services locaux qui sont touchés avec cet arrêt des opérations.
« Surtout avec l’annonce de 500 millions [de soutien ailleurs], c’est dur. On parle des emplois, on essaie de les protéger, mais c’est comme si tout s’effondrait d’un coup », a continué celui-ci, en référence à l’annonce du fédéral de ce lundi matin de soutenir l’usine Algoma Steel à Sault Ste. Marie avec un prêt de 400 millions de dollars (en plus du 100 millions de dollars injecté par la province).

Dans un communiqué paru également ce lundi, le gouvernement provincial dit concentrer ses efforts sur les travailleuses et travailleurs affectés. Des mesures comme les Centres POWER, le programme Meilleurs emplois Ontario, ainsi que les Services de formation pour un réemploi rapide (SFRR) sont déjà activées à Kapuskasing.
« Kap Paper espère que les travailleurs et leurs familles pourront bénéficier des programmes d’aides fédéraux. L’entreprise organisera la fermeture de l’usine de manière à garantir la sécurité du processus et à protéger l’environnement et les travailleurs », pouvait-on aussi lire dans le communiqué de l’entreprise.
La province rejette la faute sur le fédéral
« Notre gouvernement a travaillé en étroite collaboration avec Kap Paper dans le but de protéger les emplois à l’usine de papier de Kapuskasing », ont déclaré Mike Harris, ministre des Richesses naturelles, et Kevin Holland, ministre associé des Forêts et des Produits forestiers.
Selon eux, l’Ontario a consenti plus de 50 millions de dollars pour couvrir les dépenses d’exploitation et soutenir un plan de relance.
La province reproche au gouvernement fédéral de ne pas s’être « joint à la table » pour maintenir l’usine en vie. « Notre gouvernement ne peut pas indéfiniment procurer cette aide sans le soutien actif et la participation du gouvernement fédéral », insiste la déclaration.
De son côté, le maire Plourde, qui est également le vice-président de la Fédération des municipalités du Nord de l’Ontario (FONOM) lance la balle au gouvernement provincial : « On avait de l’espoir avec le gouvernement fédéral qui est venu à la table après deux semaines et puis finalement la province a décidé qu’on allait juste pas continuer. »
« On travaille très fort pour ramener le gouvernement provincial à la table, et je ne sais pas si on y arrivera. C’est vraiment surprenant, car nous avons appris la nouvelle par leurs avocats et non par le ministre des Forêts. Je ne pense pas que nous ayons été bien traités », regrette-t-il, ajoutant que la déception est d’autant plus grande qu’il représentait les progressistes-conservateurs lors des élections de février dernier.
Le mois dernier, le gouvernement Carney a annoncé un soutien de 1,2 milliard de dollars pour l’industrie canadienne du bois d’œuvre, durement touchée par les tarifs et droits imposés par les États-Unis.
ONFR a lancé une demande de réaction au gouvernement fédéral et n’a pas encore obtenu de réponse au moment de publier ces lignes.
Des appels avaient été lancés récemment par la FONOM, le député de Mushkegowuk—Baie James Guy Bourgouin ou encore l’Association municipale du Nord-Ouest de l’Ontario pour sauver l’usine.