L’utilisation du français par Mark Carney sera scrutée à la loupe en comité
                      OTTAWA — L’utilisation du français dans les discours et allocutions de Mark Carney fera l’objet d’une étude en comité par les députés fédéraux, l’opposition déplorant l’usage limité de la langue de Molière par le premier ministre.
Les députés libéraux, conservateurs et celui du Bloc Québécois Mario Beaulieu sur le comité, ont approuvé une motion visant à faire témoigner le ministre des Langues officielles, Steven Guilbeault, le président du Conseil du Trésor Shafqat Ali, ainsi que des fonctionnaires et des experts du bilinguisme.
Il est aussi ordonné que des documents portant sur les activités liées au français de Mark Carney comme des séances de tutorat soient produites « afin d’évaluer dans quelle mesure le premier ministre a respecté son engagement à améliorer sa maîtrise du français », indique le libellé. La motion exigera aussi une réponse officielle du gouvernement sur cet enjeu.
À la demande des conservateurs, le Comité des langues officielles s’était réuni en urgence lundi soir pour discuter de l’utilisation de la langue française dans les discours et allocutions publics de Mark Carney. Mais après une heure de réunion, aucun consensus sur une motion n’avait été atteint entre les trois formations politiques, repoussant les discussions à jeudi.
Le ton de la réunion de jeudi avait pourtant mal commencé, le conservateur Joël Godin accusant le président du comité Yvan Baker et les libéraux d’avoir fait dérailler « la collaboration qu’on avait » jusqu’à présent.
Les libéraux eux estimaient plutôt que la bonne entente avait été brisée en raison d’un dialogue « pas ouvert et (pas) constructif », de la part de l’opposition conservatrice, a rétorqué la libérale Madeleine Chenette.
Après plusieurs va-et-vient, les trois partis à la table ont finalement convenu du libellé final. Les libéraux s’inquiétaient notamment qu’une première version, qui a été corrigée, aurait pu forcer la production de documents sensibles touchant à la sécurité nationale du pays.
Le comité doit tenir ces séances sur l’utilisation du français par Mark Carney d’ici les 21 prochains jours.
17 % des discours en français
Cette rencontre réclamée d’urgence par les conservateurs a eu lieu à la suite d’un article de Radio-Canada, basé sur les conférences de presse de Mark Carney au Canada et à l’extérieur du pays dans les derniers mois. Selon l’analyse du diffuseur public, le premier ministre a consacré 17 % de ses discours préparés par lui et son équipe à la langue de Molière. Tout le reste était en anglais.
« On pense que c’est important que le premier ministre du Canada puisse s’adresser dans les deux langues officielles de façon plus importante que ce qu’il fait présentement. De par sa fonction, il doit prêcher par l’exemple », avançait le député conservateur Joël Godin plus tôt cette semaine.
Le calcul ne prenait pas en compte les réponses aux questions des journalistes lors des conférences de presse.
« Mais ce qui peut être intéressant, c’est d’avoir une analyse des réponses aux questions, les pourcentages (des réponses en anglais et en français) », avait rétorqué Mark Carney en réponse au reportage.
« On ne demande pas un ratio de 50 % en anglais et 50 % en français, mais entre 17 % et 50 %, il y a une marge et il faut prêcher par l’exemple », soutenait Joël Godin.

« M. Carney parle moins français que les premiers ministres qui ont été là avant lui. Si le chef de l’État utilise moins le français, ça envoie le signal encore plus que le français est une langue de seconde zone », déplorait lundi, l’élu bloquiste Mario Beaulieu.
La députée libérale Giovanna Mingarelli de l’Est ontarien a plutôt salué jeudi le fait que le premier ministre fasse « de plus en plus d’efforts en français », identifiant un discours à l’Université d’Ottawa mercredi soir comme exemple d’amélioration.