Cap sur Alexandria, village aux sept clochers
[VIRÉES D’ÉTÉ]
ALEXANDRIA – Avec ses 2 906 habitants dont 1 250 ayant le français comme langue maternelle, ce petit village à l’Est de l’Ontario est en grande partie francophone. On retrouve ici des descendants d’Irlandais, d’Écossais et de Français. Nous sommes dans la région de Glengarry, plus précisément la municipalité de Glengarry Nord, là où les Highlanders et les Frenchies ont réussi à vivre ensemble.
Pour découvrir Alexandria, il faut comprendre à quel point les cultures écossaises et franco-canadiennes sont présentes dans ce petit hameau, et c’est l’histoire qui nous le dira.
Plusieurs récits de villageois racontent la genèse d’Alexandria, fondé en 1819 par un évêque anglophone, le père Alexander Macdonell. D’abord connu sous le nom de Priest’s Mills, le village comptait déjà 200 familles francophones en 1902.
En 1999, après la fusion des municipalités sous le gouvernement conservateur Harris, Alexandria a intégré la nouvelle municipalité de Glengarry Nord comptant aujourd’hui 10 109 habitants.
Une gare Via Rail construite pendant la Première Guerre mondiale
Si Alexandria se situe à mi-chemin entre Montréal et Ottawa, le village est aussi bien desservi par la gare d’Alexandria, un patrimoine culturel canadien. Construite durant la Première Guerre mondiale entre 1916 et 1917, la gare représente la fin d’une époque de croissance et de prospérité des compagnies ferroviaires canadiennes. Sa conception simple illustre l’austérité de la période.
Une vitalité francophone à découvrir
L’agriculture, l’industrie du textile et du buggy – un véhicule léger d’antan – assureront le développement de ce vieux village. Aujourd’hui, quelques entreprises et artisans francophones sont toujours à l’œuvre dans la municipalité. Parmi elles, Moulure Alexandria qui fêtera bientôt ses 80 ans. En 1943, ce n’était qu’une quincaillerie fondée par Rolland Cholette. Aujourd’hui, cette entreprise est un important fabricant et distributeur de moulures en bois en Amérique du Nord. Avec plusieurs entreprises au Canada et aux États-Unis, la société franco-ontarienne compte près de 1 000 employés sur le continent.
Dans la municipalité de Glengarry Nord, nombreux sont les artistes francophones, comme peut en témoigner une murale célébrant les 200 ans du village d’Alexandria, en 2019. Affichée au 90 rue Principale Sud, cette fresque a réuni plusieurs membres du Collectif d’artistes Glengarry.
Aujourd’hui le Glengarry News est le journal anglophone du village. Mais, fut un temps, il existait un journal francophone : Le Point.
Entre 1980 et 1985, Le Point était un véritable défenseur de la cause francophone. En feuilletant les bulletins de nouvelles, nous pouvions lire des sujets divers et variés sur l’Ontario français, les combats menés et la ferme intention d’avoir des services en français. Le journal a cessé ses opérations le 25 septembre 1985, jour des Franco-Ontariens. Dans sa dernière édition, signe de la vitalité francophone de l’époque, il est écrit : « Notre communauté est non seulement spécifiquement parlant composée de 64 % de francophones, mais elle est aussi le témoin de nombreuses activités francophones tant au plan culturel qu’économique. »
Escapade au cœur de la francophonie
Sur le chemin de la route 34 qui traverse les nombreuses municipalités de Glengarry Nord, la rue principale d’Alexandria est une invitation et ses petites rues ne demandent qu’à être visitées. La ville ne compte pas énormément de commerces. Une grande partie de ces magasins et restaurants sont tenus par des francophones.
Comme l’épicerie B&B Food Market qui est opérée par la famille Brunet depuis plus de 75 ans ou encore la pharmacie Jean Coutu, la Fauxmagerie Zengarry, le dentiste Laplante, le restaurant La Buvette, le restaurant The North Glengarry qui n’est autre que l’ancien moulin à farine (Priest’s Mill) construit en 1819.
Tous les francophones d’ici et d’ailleurs pourront se faire servir en français auprès de la Meunerie Alexandria Milling, Tom’s Pantry, le Cozy Corner, même le Home Hardware et la boulangerie Lanthier.
La communauté francophone d’Alexandria possède aussi son centre culturel depuis près de 45 ans. En effet, depuis 1979, le centre culturel Les Trois p’tits points offre des activités socioculturelles en français à la communauté, tels que des spectacles, des ateliers, mais aussi des services de garde parascolaire.
L’histoire religieuse d’Alexandria et ses clochers
Force est de constater que, lorsque nous sillonnons les rues du village, l’architecture ecclésiastique est omniprésente. D’abord connue sous le nom de Priest’s Mill dans les années 1800, Alexandria a été érigé par le premier évêque catholique romain du Haut-Canada : le père Macdonell qui avait joué un rôle déterminant dans l’arrivée de la dernière vague d’immigration des Highlands d’Écosse.
Ceci explique le nombre d’églises : pas moins de sept! D’ailleurs, en 2021, l’Église St-Finnan a été élevée au rang de Basilique par le pape François.
Parmi les églises de la petite commune se trouvent l’Église Sacré-Cœur, la Basilique Saint-Finnan, l’Église Fontaine, l’Église unie du Canada d’Alexandria, l’Église St Catherine De Sienne, l’Église Cedar Valley et l’Église biblique du chemin Marcoux.
Une ville épiscopale
Il existe plusieurs cas de francisation des paroisses du diocèse d’Alexandria-Cornwall durant le XIXe siècle. Dans le village, en 1833, seulement quelques activités de l’Église Saint-Finnan se déroulaient en français, mais face à une pression de la communauté en 1909, les francophones ont réussi à avoir leur propre paroisse francophone : l’Église du Sacré-Cœur.
Le diocèse d’Alexandria-Cornwall devrait bientôt intégrer officiellement l’archidiocèse d’Ottawa. Bien que la fusion ait été entamée en 2020 par le pape François, ce processus historique n’est pas encore validé d’un point de vue juridique, comme le relate Le Droit dans une rencontre avec la sénatrice Bernadette Clément. L’union du diocèse d’Alexandria-Cornwall avec l’archidiocèse d’Ottawa – maintenant archidiocèse d’Ottawa-Cornwall – visait à offrir une meilleure gestion des ressources de l’Église.
Pour aller plus loin
L’hôpital Glengarry Memorial à Alexandria connaîtrait un triste record, il est celui ayant fermé son service des urgences le plus souvent en Ontario. D’après le Toronto Star, les urgences ont été fermées près de 38 fois au cours de l’année 2022. De ce fait, les résidents ont été transférés vers l’Hôpital général de Hawkesbury ou l’Hôpital communautaire de Cornwall. La raison : la pénurie de personnel soignant qui sévit en Ontario. Selon City News, l’hôpital Glengarry Memorial « aurait été désigné comme le pire hôpital de la province, concernant ces fermetures. »
Fondée en 1932 par Georges et Adrienne Lanthier à Alexandria, la boulangerie familiale Lanthier a fêté ses 90 ans en 2022. L’entreprise franco-ontarienne est toujours située au même endroit depuis sa création. Aujourd’hui leader de la brioche et du pain en Amérique du Nord, au départ, l’entreprise livrait du pain frais aux habitants d’Alexandria. La Fournée Dorée, un groupe français, a racheté la boulangerie Lanthier.
Tout au long des mois de juillet et août, Virées d’été vous emmène dans des villages et recoins inattendus de la francophonie ontarienne. Une série à découvrir sur notre site web et nos réseaux sociaux.