Adriana Tornar a jeté son dévolu sur Sioux Lookout, dans le Nord-Ouest ontarien. Photo : gracieuseté Adriana Tornar

SIOUX LOOKOUT – Qui aurait cru qu’une Italienne d’origine ayant grandi en France, émigré au Mexique finirait par trouver son chez-soi dans une petite commune isolée du Nord-Ouest ontarien? Alors que débute la Semaine nationale de l’immigration francophone, on vous fait découvrir le parcours inspirant d’Adriana Nava Tornar, rare Française de Sioux Lookout, qui y a trouvé des opportunités et son cocon.

À la base, le choix de s’établir au Canada était stratégique : « On voulait une immersion complète pour nos filles afin qu’elle puisse maîtriser parfaitement l’anglais ».

Avant d’arriver en sol canadien, au printemps 2023, la famille a vécu sept ans en France, puis huit autres au Mexique durant lesquels les trois jeunes enfants du couple ont pu apprendre et parler le français puis l’espagnol.

Pour Mme Nava Tornar comme pour son époux, originaire du Mexique, « la prochaine étape était de passer à l’anglais parce qu’on voulait aussi que nos filles connaissent une autre culture et qu’elles aient plus d’outils pour leur futur. »

Adriana Nava Tornar avec son époux et ses enfants devant Chichen-Itzà, au Mexique. Gracieuseté

Après un contact avec l’Association des francophones du Nord-Ouest de l’Ontario (AFNOO) et une demande acceptée rapidement par Immigration, Réfugiés et Citoyenneté Canada (IRCC), Adriana Nava Tornar a pu rapidement obtenir un permis de travail fermé pour elle et ouvert pour son époux, tandis que ses filles bénéficient d’une exemption pour étudier sans visa grâce à des accords avec la France.

La sécurité d’une petite ville

Mais alors, qu’est-ce qui a porté le choix de cette jeune famille à s’installer à Sioux Lookout plutôt qu’une autre ville potentiellement moins isolée?

« On voulait une petite localité, loin du danger qu’on peut trouver dans ces grandes villes, où nos filles (de 7, 10 et 16 ans) peuvent sortir en toute sécurité », répond-elle, soucieuse d’échapper aux risques inhérents à la vie parisienne et mexicaine.

Prenant les choses au sérieux, la mère de famille avait aussi contacté la municipalité afin de vérifier les statistiques autour de la violence dans la ville. « Je crois que, pendant 70 ans, il n’y a jamais eu aucun accident envers un enfant, à moins que ce soit dans le cercle familial, et il y a énormément de policiers ici. »

Les Nava Tornar se sont découvert une passion pour le plein air à Sioux Lookout. Gracieuseté

L’éternelle quête de logement

Le seul obstacle que la mère de famille née en Italie a rencontré est la pénurie de logements qui affecte le Nord ontarien. Si celle-ci a pu, néanmoins, bénéficier de l’aide de son employeur qui lui a fourni une chambre à son arrivée, trouver un logement pour sa famille, qui arrivera trois mois après elle, était une autre paire de manches.

« Pour la première fois de notre vie, on a senti la crise du logement. Pourtant, on a vécu dans plusieurs villes et pays, mais c’était extrêmement difficile de trouver un logement, même en ayant des références et des connaissances. » Après avoir loué un sous-sol, la famille a finalement trouvé une maison qui répond à ses besoin.

Ascension professionnelle

S’il y a bien une chose que la femme de 35 ans a pu réaliser, c’est qu’en faisant le choix de s’établir dans une localité de 5 000 âmes, les opportunités professionnelles seraient plus intéressantes.

Celle qui est aujourd’hui manager des opérations commerciales, des ventes et des services chez Fresh Market Foods, une entreprise de distribution alimentaire, avait déjà de l’expérience dans le secteur des ventes. En moins d’un an, elle a vu son salaire augmenter et a gravi plusieurs échelons, tout comme son époux.

« Non seulement c’est très facile de trouver du travail, mais en plus, à partir du moment où on est des bosseurs, on peut très rapidement gravir les échelons. »

La famille Nava Tornar apprécie le fait que Sioux Lookout dispose d’une écurie. Gracieuseté

Pas d’anglais à la maison

Malgré ce besoin de vivre une immersion totale en anglais, le couple a gardé un lien avec la langue de Molière. « On a une règle quand on vit dans un pays : la langue de celui-ci est interdite à la maison. Donc on parle français », confie-t-elle.

On l’avait prévenue : à Sioux Lookout, il y a peu de francophones et aucune école de langue française. Selon les dernières données du recensement de 2021, 1 % de la population a le français comme première langue officielle parlée.

Néanmoins, par le biais de son travail dans la plus grande épicerie de la ville, celle-ci a eu une belle surprise : « J’ai rencontré des tonnes de francophones, dont beaucoup sont des personnes du troisième âge ou des personnes qui me disent avoir l’impression d’entendre leur mère qui avait un fort accent français en parlant anglais. »

Touchée par ce vent de nostalgie qui caractérise le lien des francophones à leurs origines, Adriana Nava Tornar ira jusqu’à créer une page Facebook : « Les francophones de Sioux Lookout ».

« En très peu de temps, on est passé de 15 à 60, on fait des activités qu’on arrive parfois à faire sponsoriser par l’AFNOO. »

Adriana Nava Tornar, à droite, est née en Italie d’une mère Française et a grandi en France. Gracieuseté

Vers la résidence permanente

Seule ombre au tableau pour la mère de famille : l’absence de cinéma, théâtre et piscine dans la ville. Heureusement, Sioux Lookout dispose d’une écurie pour le plus grand bonheur des enfants, de la pêche pour les adultes et il est possible de retrouver les activités manquantes dans les villes voisines de Kenora et Dryden.

Bien qu’il n’y ait pas de médecin de famille disponible, le couple Nava Tornar n’a pas rencontré de problème pour consulter à l’hôpital local où il a eu la surprise de tomber, une fois, sur un médecin francophone.

« Mais au final, je suis contente qu’il n’y ait pas des grands centres commerciaux, parce que ça aurait généré beaucoup de dépenses, ajoute-t-elle. Tant qu’on est en famille, on ne s’ennuie pas trop et on arrive quand même à faire beaucoup d’activités avec des amis. »

Alors qu’ils avaient l’intention de ne rester que deux ans, les Nava Tornar ont fini par succomber aux plaisirs de la vie à Sioux Lookout.

« Même si on obtient la résidence permanente, je ne pense pas qu’on ira dans une grande ville justement par rapport à ces opportunités de travail et aussi parce que c’est une belle ville pour élever des enfants », termine-t-elle.

Chaque jour de la Semaine nationale de l’immigration francophone, ONFR vous fait découvrir un portrait d’immigrant francophone en Ontario, son parcours, ses défis, ses succès.