Des diplômes d’enseignement obtenus en France enfin reconnus en Ontario
Des diplômes obtenus en France relatifs aux métiers de l’enseignement, de l’éducation et de la formation sont désormais reconnus dans la province. Cette avancée doit permettre aux nouveaux arrivants titulaires d’un tel diplôme de postuler directement à des postes d’enseignants au sein des conseils scolaires francophones et anglophones, et ce sans forcément passer par ce parcours du combattant qu’est le certificat de qualification délivré par l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario.
Le consul général de France à Toronto, Tudor Alexis, a annoncé cette « avancée majeure entre l’Ontario et la France en faveur du bilinguisme » via son compte Twitter, dans un contexte de pénurie de professionnels de langue française en Ontario.
Plus précisément, le gouvernement ontarien reconnaît désormais des diplômes français afférents au Master MEEF (Métiers de L’enseignement, de l’éducation et de la formation) obtenus dans les 33 INSPE (Institut national supérieur du professorat et de l’éducation) de l’Hexagone.
Sur le plan pratique, cela se traduit par « une reconnaissance du programme français de formation des enseignants permettant désormais à tous les titulaires du Master MEEF d’enseigner en Ontario aussi bien au sein des conseils scolaires anglophones que francophones, et cela d’une manière automatique, sans qu’aucune formalité supplémentaire ne soit exigée à ces diplômes français », explique le consul général.
Par « aucune formalité supplémentaire ne sera exigée », il fait probablement allusion à la longue procédure de délivrance de certification au personnel enseignant octroyée par le puissant Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario (OEEO), la porte d’entrée ontarienne habituelle du métier.
Fini le parcours du combattant
« Pour enseigner dans une école financée par les fonds publics de l’Ontario, il faut être titulaire d’un certificat de qualification délivré par l’OEEO », peut-on lire sur le site du ministère de l’Éducation de l’Ontario. Cette procédure s’apparente à la formalité lorsque le futur enseignant est diplômé d’un établissement ontarien. En revanche, il n’en va pas de même lorsque le candidat est titulaire d’un diplôme étranger en général et français en particulier.
En effet, depuis plusieurs années, les enseignants francophones issus de l’immigration dénoncent la lenteur et la complexité du processus de l’Ordre pour obtenir le précieux sésame, sans quoi ils ne pourraient exercer leur métier, même s’ils ont des années d’expérience dans leur pays d’origine. Certains vont même jusqu’à qualifier ce processus de « lutte ».
Dans les faits, les titulaires de diplômes émanant de l’enseignement français, type IUFM (Instituts universitaires de formation des maîtres) ou CAPES (Certificat d’aptitude au professorat de l’enseignement du second degré) doivent les faire reconnaître par l’OEEO qui examine les dossiers au cas par cas, une procédure qui peut prendre plusieurs mois pour aboutir à des demandes de complément de formation ou à des refus. Toutefois, à en croire le consul général, cela est de l’histoire ancienne, du moins s’agissant des diplômes estampillés INSPE.
Le ministère de l’Éducation nuance
Une histoire appartenant au passé donc. Pas si certain que cela! Contacté à ce sujet par ONFR+, le ministère de l’Éducation parle seulement d’un projet pilote qui peut être amené à se généraliser si l’initiative répond à ses attentes.
« Ce projet pilote est actuellement limité à une faculté spécifique (INSPE) en France. À mesure que le projet prend de l’ampleur, de plus en plus d’enseignants français pourraient participer au projet pilote ou postuler directement à l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario pour travailler en Ontario. Le ministère surveillera la participation au fil du temps », nous indique l’attachée de communication du ministère.
Et de rappeler : « Ce projet pilote de recrutement d’enseignants est l’une des initiatives de la Stratégie de recrutement et de rétention des enseignants lancée en juin 2021 pour aider à mieux faire connaître les parcours d’enseignement et soutenir les efforts de recrutement dans les juridictions francophones à l’étranger. »
Stephen Lecce, ministre de l’Éducation en Ontario préfère mettre l’accent sur le pan stratégique de l’accord. « Pour soutenir le plan quadriennal novateur de notre gouvernement visant à recruter et à retenir les meilleurs éducateurs de langue française, notre gouvernement collabore avec l’ambassade de France, le gouvernement fédéral, l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario et l’Institut national supérieur du professorat et de l’éducation à Aix Marseille », nous fait-il savoir.
Une coopération à double sens
Quoi qu’il en soit, M. Alexis se montre confiant. « Cette avancée place la France dans une relation de confiance avec l’Ontario. Le fait d’avoir pu œuvrer de concert avec les autorités pour arriver à un accord gagnant-gagnant dans un domaine aussi crucial que la francophonie des jeunes Ontariens me procure une grande satisfaction », livre-t-il avant d’insister sur l’importance de la réciprocité de cette entente.
Il promet qu’à son tour, l’Hexagone accueillera dans un avenir proche des professeurs ontariens qui iront enseigner différentes matières en langue anglaise dans les écoles françaises. « Les modalités de cette réciprocité des échanges doivent être précisées prochainement », assure-t-il.
Selon nos informations, deux enseignantes travaillent d’ores et déjà à Ottawa et à Toronto par le biais de ce programme. Deux gouttes d’eau dans un océan quand on sait que, d’après un rapport publié en janvier dernier par le Groupe de travail sur la pénurie des enseignants dans le système d’éducation en langue française de l’Ontario, il faudrait quelque 1 050 enseignants chaque année durant les cinq prochaines années au minimum, pour que la province puisse répondre aux besoins en personnel enseignant francophone dans les écoles élémentaires et secondaires.
Sollicité par ONFR+, l’Ordre des enseignantes et des enseignants de l’Ontario n’a pas souhaité commenter la nouvelle.