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Des élèves font avancer le français à Penetanguishene

Un groupe d’élèves de 3ᵉ et 4ᵉ années de l’École publique Saint-Joseph de Penetanguishene a convaincu la municipalité de rendre son site Web accessible en français. Photo: Inès Rebei/ONFR

PENETANGUISHENE – Ils ont entre 9 et 10 ans et ils ont fait plier la municipalité de Penetanguishene. Grâce à l’initiative d’élèves de 3ᵉ et 4ᵉ année de l’École publique Saint-Joseph, le site Web de la Ville sera officiellement offert en français dès jeudi.

Tout a commencé lors d’un projet dans le cadre d’un cours d’étude sociale. Les élèves ont exploré le site Web de la ville et ont constaté qu’aucune section n’était disponible en français. 

« On cherchait, on cliquait, mais on ne trouvait pas », raconte Patrick, 9 ans, originaire de Penetanguishene. « On voulait que le français soit visible pour que tout le monde puisse comprendre l’information. »

Pour Isabella, 9 ans, également élève de la classe, il s’agissait d’un enjeu d’accessibilité. « Si tu ne connais pas l’anglais, tu ne peux pas savoir ce qui se passe dans la ville. »

La jeune élève, comme plusieurs de ses camarades, a indiqué que ce geste a été posé dans l’espoir que la version française du site puisse contribuer à attirer des francophones souhaitant s’installer dans la petite ville de près de 9 000 habitants.

De son côté, Théo, dont la mère est originaire de France, a ajouté : « On veut montrer qu’on est fiers de parler français. »

Isabella et Kayla ont bien hâte de voir le résultat sur le site internet de la municipalité. Photo : Inès Rebei/ONFR

Première et effet boule de neige

Sous la supervision de leur enseignante, Mme Anne Perrault, les élèves ont rédigé une lettre bilingue destinée au maire Doug Rawson. 

« C’est la première fois que je fais ce genre d’initiative avec la classe », explique Mme Perrault. « Je voulais juste que les élèves écrivent une lettre et la livrent à la mairie. Je ne m’attendais pas à ce que ça aille aussi vite et que ça ait un tel effet boule de neige. »

Et pour cause, la rapidité avec laquelle la municipalité a répondu a surpris celle qui enseigne dans cet établissement du Conseil scolaire Viamonde depuis trois ans et ses élèves. 

« On s’attendait à ce que ça prenne plus de temps, surtout qu’un technicien n’était pas disponible au départ, explique-t-elle. Mais tout s’est débloqué beaucoup plus vite que prévu, et quelques semaines après avoir remis la lettre, le projet était déjà en cours. »

Anne Perrault estime qu’elle aurait pu aller plus loin avec ses élèves s’ils étaient encore dans sa classe cette année. Photo : Inès Rebei/ONFR

Elle raconte que tous les enfants se sont mis à sauter et crier de joie en apprenant que leur demande avait été acceptée à l’hôtel de ville.

Tous les élèves ont signé la lettre datée de juin dernier, et certains ont même lu leur texte en anglais pour s’assurer que le maire anglophone comprenne bien leur demande.

Pour Mme Perrault, cette initiative a été une leçon concrète de citoyenneté pour ses élèves : « Ils ont compris qu’on peut influencer sa communauté, peu importe son âge. Ils ont vu que leurs actions ont un impact réel. Je pense que cette expérience peut inspirer d’autres élèves et enseignants à s’impliquer de la même manière. »

Les élèves se disent eux-mêmes fiers de leur contribution. « Ça nous donne envie de faire d’autres projets pour le français et pour aider la communauté », confie Mila, 10 ans.

Avery, comme plusieurs autres de ses camarades, avait également soulevé d’autres suggestions pour améliorer la ville, telles que des réparations à effectuer ou l’ajout de parcs. Photo : Inès Rebei/ONFR

Réponse rapide de la municipalité

Le maire Doug Rawson raconte que la démarche des élèves l’a impressionné : « Ils ont présenté un projet bien documenté, et c’était clair que la communauté scolaire était sérieuse. Nous avons immédiatement communiqué notre intention de répondre à leur demande. »

Le maire a également confié qu’il trouvait « embarrassant » le fait que la ville n’ait pas reconnu ce besoin, surtout lorsque d’autres municipalités voisines disposaient déjà de sites internet bilingues.

La ville a rapidement intégré des fonctionnalités d’accessibilité et de bilinguisme sur son site Web, permettant désormais de naviguer en français et d’adapter le contenu pour des besoins spécifiques, comme la dyslexie ou autres difficultés de lecture. 

L’ex maire et actuel conseiller francophone Doug Leroux a accompagné le maire Rawson pour visiter les élèves après avoir reçu leur lettre à l’école Saint-Joseph. Photo : Inès Rebei/ONFR

Le maire Doug Rawson souligne que ces changements ne se limitent pas au français, comme l’ont aussi demandé les élèves. « Le site offrira la possibilité d’être consulté dans d’autres langues, selon les besoins de la communauté, comme l’espagnol, et d’autres modules sont intégrés pour répondre aux différentes demandes », explique-t-il. 

Le conseil municipal a annoncé officiellement le lancement du site en français lors de la réunion municipale de mercredi soir. 

Des gestes pour la francophonie

Penetanguishene est reconnue comme un berceau de la francophonie ontarienne, en raison de son histoire qui remonte aux premiers contacts entre Samuel de Champlain et la Nation huronne‑wendat au début du XVIIᵉ siècle, et de son rôle dans l’établissement de familles francophones dans la région de la baie Georgienne. 

Aujourd’hui, environ 7,6 % des habitants ont le français comme langue maternelle, selon le recensement de Statistique Canada de 2021, et la ville abrite plusieurs institutions et organismes francophones, dont des écoles et des stations de radio communautaires.

Le maire Doug Rawson souligne que l’initiative de faire traduire le site s’inscrit directement dans le plan stratégique communautaire de 20 ans de la Ville, notamment sous le pilier du bien-être et de l’inclusion communautaire. Photo : Inès Rebei/ONFR

Depuis le début de son mandat en 2022, le maire Doug Rawson affirme que le conseil municipal multiplie les initiatives pour rendre la Ville plus accessible aux francophones. Trois des six conseillers municipaux parlent français, et lors des réunions, l’engagement du conseil et la reconnaissance territoriale sont lus en anglais et en français.

« Nous voulons montrer que nous sommes une communauté bilingue et inclusive, et que nos actions reflètent les besoins de tous nos citoyens, explique Doug Rawson. La francophonie fait partie intégrante de notre façon de communiquer et de travailler. »