Financement politique : un dernier droit avant les changement de règles

Avant les changements de règles, les partis politiques tentent de renflouer leurs caisses.

TORONTO – Avec les nouvelles règles en matière de financement politique qui entreront en vigueur le 1er janvier prochain, les principaux partis politiques ontariens multiplient les efforts pour renflouer les coffres avant la date butoir.

JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE 
jmorissette@tfo.org@JFMorissette72

Le Parti libéral de l’Ontario (PLO) a tenu 21 soirées de financement entre le 1er et le 17 décembre. Les prix des billets individuels de ces soirées varient entre 50 $ et 1 000 $, en fonction de la présence de certains députés et de certains ministres.

Du côté du Parti progressiste-conservateur (Parti PC) de l’Ontario, les efforts de financement se sont également multipliés.

Un porte-parole du Nouveau Parti démocratique (NPD) a confirmé à #ONfr que le parti a organisé une seule activité de financement centralisée, mais que d’autres activités dans les différentes circonscriptions ont eu lieu, sans pouvoir en spécifier le nombre.

Un problème d’éthique?

Selon Geneviève Tellier, politologue à l’Université d’Ottawa, il n’est pas illégal pour les partis politiques de faire un grand effort de financement pour profiter des anciennes règles.

« Est-ce que c’est éthique? Ce n’est pas clair. Ça peut l’être oui ou non parce que l’on ne contrevient pas à la loi. D’un autre côté, la loi va changer », explique-t-elle.

Mme Tellier ne se dit cependant pas inquiète de la situation puisque ça ne risque pas de se reproduire prochainement.

« S’ils font cela, c’est probablement que les nouvelles règles vont leur faire mal. Ça va vraiment changer les choses et on peut penser que les nouvelles règles vont apporter quelque chose d’intéressant pour changer les comportements. »

Mme Tellier croit que trois principaux partis ontariens seront perdants en termes de financement. Elle ajoute que les petits partis risquent de tirer avantage de la situation.

Questionnée sur l’éthique de ces efforts de dernière minute, une porte-parole pour le PLO rappelle que c’est la formation politique de Mme Wynne qui avait apporté les changements aux règles de financement. Elle ajoute qu’avant l’entrée en vigueur de ces nouvelles règles, le parti ne faisait que suivre les règles déjà existantes, comme le NPD et le Parti PC, et qu’il respectait ses engagements quant à la tenue d’événements de financement déjà prévus.

Il y a quelques semaines, la directrice des communications du chef du Parti PC, Tamara Macgregor, avait indiqué à #ONfr que malgré la longue période avant la prochaine élection générale, le parti espérait pouvoir capitaliser sur la popularité du chef Patrick Brown, en avance dans les sondages si une élection avait lieu aujourd’hui, sans pour autant justifier les efforts de financement du parti.

Les politiciens bannis de ces événements

À partir du 1er janvier prochain, il sera interdit aux députés provinciaux, aux candidats, aux chefs de parti, aux candidats à l’investiture et même aux candidats à la direction d’un parti d’assister à des activités de financement à des fins politiques. Les nouvelles règles vont même plus loin encore, alors que de nombreux membres du personnel politique seront assujettis à la même restriction que leur patron, y compris le personnel du cabinet de la première ministre, le personnel des chefs de partis et les chefs de cabinet des ministres.

Il sera également interdit à des personnes morales et à des syndicats de faire des contributions à des partis, des candidats, des associations de circonscription, des candidats à l’investiture et des candidats à la direction d’un parti.

Pour la députée du NPD, Catherine Fife, même si les politiciens n’ont plus accès à des soirées de financement, la loi n’est pas parfaite pour autant.

« Il existe encore une manière d’avoir accès à des politiciens moyennant une somme d’argent. Nous (au NPD) voulions que le commissariat à l’éthique ait plus de pouvoir pour empêcher les conflits d’intérêts », explique la députée.

Elle déplore aussi que rien n’ait été ajouté dans la loi pour limiter les publicités partisanes, comme ce fut dénoncé dans le plus récent rapport de la vérificatrice générale de l’Ontario.

« La nouvelle loi est un pas dans la bonne direction, c’est certain. Mais est-ce que les libéraux ont manqué une chance? Je crois que oui », conclut Catherine Fife.

La nouvelle loi sur le financement politique a été adoptée par les députés de Queen’s Park le 1er décembre dernier.