Garderies à 10 $ par jour : l’Ontario doit revoir sa copie pour atteindre ses cibles, selon la VG
TORONTO – 80 500 places en garderies sont toujours vacantes ou non disponibles, bien que les objectifs fixés dans le cadre du programme des garderies à 10 $ visent mars 2026 pour permettre l’atteinte d’un tel objectif. Or, un nouveau rapport de la Vérificatrice générale de l’Ontario remet en question la bonne gestion du dossier, relevant « une inefficacité des systèmes et procédures en place ».
Dans le cadre de l’Accord sur l’Apprentissage et garde des jeunes enfants (AGJE) signé entre l’Ontario et le Canada, la province a reçu 10,23 milliards de dollars sur 5 ans pour réduire les frais de garde d’enfants de moins de six ans pour les familles de l’ordre de 10 $ par jour – auparavant estimé à 48 $ par jour pour les familles.
Le cadre pour l’accès et l’inclusion de l’Ontario de l’AGJE stipule d’ailleurs que la province doit « atteindre ou dépasser la proportion de places francophones proportionnellement à la population francophone en Ontario » d’ici mars 2026.
Différentes constatations émergent du rapport spécial du Bureau de la vérificatrice générale sur le Programme pancanadien d’apprentissage et de garde des jeunes enfants, parmi lesquelles : sur son objectif d’ajouts de place, le gouvernement n’a ouvert que 75 % des places en services de garde par rapport à sa cible.
En parallèle, le nombre d’inscriptions aux services de garde d’enfants a aussi diminué de 31 % parmi les familles à faible revenu recevant une subvention pour frais de garde.
La baisse des frais, qui a entrainé une augmentation globale des demandes, a rendu difficile l’accès aux familles prioritaires (ayant droit à une subvention), souligne la VG, Shelley Spence.
Celle-ci recommande une évaluation des progrès effectués en matière de création de places en garderie et des résultats associés à son Cadre pour l’accès à l’inclusion, avec la mise en œuvre de mesures correctives, de même qu’une analyse des causes de la diminution des inscriptions des enfants admissibles.
80 500 places vacantes ou indisponibles
En outre, la vérificatrice générale relève que des centres fonctionnent en dessous de leur pleine capacité. 80 500 des places de garde (27 %) sont vacantes ou pas offertes par les exploitants.
« Nous avons constaté que le ministère (de l’Éducation) n’avait pas fait un suivi suffisant du nombre de places inoccupées afin de cerner et de régler les problèmes et enjeux systémiques à l’origine de la sous-utilisation des places », note le rapport.
Par ailleurs, celui-ci conclut que le ministère n’a pas recueilli de données sur les listes d’attente afin de comprendre les tenants et aboutissants de la variation de la demande de services de garde dans la province. Tous les gestionnaires de système de services (GSS) n’ont pas de système centralisé de gestion des listes d’attente, menant à de gros écarts sur les listes d’attente.
« Le ministère devrait examiner le plan actuel et réviser au besoin afin de s’assurer d’atteindre l’objectif consistant à ramener à 10 $ par jour d’ici mars 2026 les frais de garde payables par les parents, ce qui requiert le suivi du nombre d’enfants ayant une place subventionnée et du nombre de familles qui paient le plein montant des frais de garde. »

L’accord, qui prend fin le 31 mars 2026, fait actuellement office de négociation en vue d’être possiblement prolongé pour une durée de cinq ans. Avec un manque de fonds estimé à 1,95 milliard de dollars en 2026-2027, sa viabilité est « entourée d’incertitude », indique la VG.
En plus de ne pas avoir atteint sa cible de 60 % minimum d’éducateurs de la petite enfance inscrits (EPEI) au sein du personnel des services de garde (58,9 %), « le ministère n’a pas établi d’objectifs de rendement clairs (…) pour la main-d’œuvre du secteur de la garde d’enfants », poursuit Shelley Spence.
Le bureau de la VG estime que 10 000 EPEI supplémentaires seraient nécessaires d’ici décembre 2026.
Un programme de Fonds de développement des compétences « corrompu »
Un autre rapport spécial, publié ce même jour, a analysé l’attribution du Fonds de développement des compétences (FDC) du ministère de Travail, de l’Immigration, de la Formation et de Développement des compétences.
Plus de 1,3 milliard de dollars ont été versés au cours des 5 premières rondes du FDC à des projets novateurs, à visée de croissance économique.
Le rapport de la vérificatrice générale Shelley Spence révèle que « dans 54 % des cas, le cabinet du ministre a choisi de financer les demandes classées aux rangs médiocre, faible et moyen, plutôt que les demandes au rang élevé (soit 670 qui n’ont pas été sélectionnées) ».
Un total de 742 millions de dollars a ainsi été attribué à ces candidatures moins recevables. Le rapport précise que le ministère en question a accepté les recommandations du bureau de la VG, mais l’opposition n’a pas tardé à réagir.
Marit Stiles, la cheffe du NPD de l’Ontario, parle de « corruption » et de « délit d’initiés ». Elle appelle le gouvernement Ford à garantir que chaque dollar du FDC profitera aux travailleurs, après que la vérificatrice générale a tiré la sonnette d’alarme sur le processus :
« L’Ontario traverse une crise de l’emploi alimentée par Doug Ford. Au lieu d’aider les 800 000 Ontariens sans emploi, Ford retire de l’argent aux travailleurs qui en ont le plus besoin. Nous l’avons vu avec la Ceinture de verdure, nous l’avons vu avec la Place de l’Ontario, et nous le voyons encore aujourd’hui. Ce gouvernement n’a aucun respect pour l’argent des contribuables. »
« Si vous êtes riches et bien connectés, vous êtes privilégiés. Ça ressemble à de la fraude et à une affaire d’extorsion. Si on creuse plus, on trouvera plus de preuves », a avancé le député libéral et chef du caucus en chambre John Fraser.
Le leader du Parti vert Mike Schreiner a lui qualifié le programme de fonds de développement de compétences de « corrompu par le gouvernement Ford ».