Huit recommandations pour le Bureau de la traduction

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OTTAWA – Le comité permanent des langues officielles a rendu public, mercredi 15 juin, son examen du bureau de la traduction. Insistant sur l’importance de l’institution, les députés proposent huit recommandations pour en assurer l’avenir.

BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet

Après avoir occupé le devant de la scène lors de la première session parlementaire au sein du comité permanent des langues officielles, le dossier du Bureau de la traduction (BDT) a finalement peut-être rendu son épilogue.

Dans un rapport présenté à la Chambre des communes le 15 juin, après six réunions de travail et un total de 18 témoignages, le comité fait huit recommandations au gouvernement.

Il recommande notamment que soit désignée une autorité fédérale existante pour assurer le mandat de la mise en œuvre de la Loi sur les langues officielles, notamment au sein du BDT. Il propose également que tous les fonctionnaires reçoivent une formation sur le rôle du BDT et sur les obligations du gouvernement en matière de traduction, que le BDT reçoive toutes les ressources financières dont il a besoin pour faire son travail et que le gouvernement s’assure de former la relève en matière de traduction.

Enfin, le Comité insiste sur l’importance pour le gouvernement de se pencher sur le statut du Bureau de la traduction en tant qu’organisme de service spécial et sur les conséquences de la privatisation de certains services de traduction quant à la capacité des institutions fédérales à respecter leurs obligations linguistiques en matière de communication avec le public et de prestation des services.

« C’est un rapport satisfaisant qui fait consensus entre les membres du comité, tous partis confondus. Il y avait de l’inquiétude de la part des témoins et des intervenants que nous avons entendus et je pense que nous avons de bonnes recommandations. Je reste toutefois convaincu que le Bureau de la traduction a toujours bien fait son travail, malgré les restrictions budgétaires nécessaires qui ont été faites par le gouvernement précédent », commente pour #ONFR, le porte-parole aux langues officielles pour le Parti conservateur (PC), Bernard Généreux.

Sous le feu des projecteurs

Le Bureau de la traduction s’est retrouvé sous le feu des projecteurs au début de l’année après que fut révélé les abolitions de quelque 400 postes par attrition au cours des quatre dernières années et les 144 autres abolitions prévues d’ici 2017-2018 qui menaceraient, selon plusieurs intervenants, la capacité de l’institution à bien faire son travail.

Lors des consultations, plusieurs témoins se sont inquiétés des signaux envoyés en matière de bilinguisme, alors que des représentants de l’Association canadienne des employés professionnels (ACEP) ont tiré la sonnette d’alarme.

Malgré l’argumentaire de la présidente-directrice générale du BDT, Donna Achimov, pour expliquer la gestion de l’institution, le porte-parole aux langues officielles pour le Nouveau Parti démocratique (NPD), François Choquette, pense que le gouvernement doit intervenir pour lui rappeler son mandat.

« Le Bureau de la traduction a pris une tangente dangereuse en voulant se comporter comme une entreprise du secteur privé, mais c’est oublié que ce n’est pas son mandat. Son mandat, c’est celui de défendre et de promouvoir la dualité linguistique. »

La mise en place d’un outil de traduction automatique a canalisé le mécontentement, laissant craindre que la machine ne finisse par remplacer la qualité du travail de traducteurs professionnels.

« Je pense qu’inévitablement, une des conclusions de notre étude est que la technologie occupe une place de plus en plus importante dans nos vies. Il était toutefois nécessaire d’en préciser les conditions d’utilisation pour ne pas que cela nuise à la qualité », indique M. Généreux.

Avant même le dépôt du rapport, le gouvernement était intervenu, le 17 mai, pour revoir les critères d’utilisation et la mission de l’outil de traduction automatique pour préciser qu’il ne devait être utilisé que comme simple outil de compréhension.

La FCFA salue une victoire

Consultée lors de l’étude du comité, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada a salué le travail des membres du comité et les recommandations proposées. Elle s’est particulièrement réjouie de la première recommandation qui invite le gouvernement fédéral à donner à une autorité fédérale le mandat de surveiller la mise en œuvre et le respect de la Lois sur les langues officielles au sein des institutions fédérales.

« Quand nous avons comparu devant le Comité il y a deux mois, nous avons parlé d’une érosion généralisée des capacités des institutions fédérales en termes de communications bilingues, qui vient entre autres du fait que celles-ci sont largement laissées à elles-mêmes en ce qui a trait à leurs obligations linguistiques. Clairement, le message a été entendu, et c’est très encourageant », déclare la présidente de la FCFA, Sylviane Lanthier, dans un communiqué.

La FCFA précise que sa proposition de désigner une autorité centrale chargée d’assurer le respect de la Loi dans tout l’appareil fédéral ne date pas d’hier puisque l’organisme porte-parole des francophones en contexte minoritaire a formulé cette recommandation dans un mémoire publié à l’occasion du 40e anniversaire de la Loi sur les langues officielles en 2009 et a réitéré sa demande lors de la dernière campagne électorale fédérale.

« On règlerait beaucoup de problèmes de conformité des institutions fédérales si on désignait une entité gouvernementale qui a l’autorité nécessaire pour coordonner l’application et le plein respect des différentes parties de la Loi dans tous l’appareil fédéral, et pour exiger des résultats à cet égard. »

Reste à savoir qui aura la charge de cette mise en œuvre. Pour le porte-parole néodémocrate, la balle est dans le camp des organismes.

« C’est une proposition qui a été portée par la FCFA et à laquelle nous sommes favorables car c’est le meilleur moyen de faire respecter la Loi sur les langues officielles. Qui doit s’en occuper? Il faut voir quelles sont les options et discuter avec la FCFA, mais il y a urgence que ce soit fait rapidement, notamment pour le Bureau de la traduction. Attendons de voir quelle sera la réponse du gouvernement sur le rapport. »

Dans le mémoire de la FCFA à l’occasion du 40e anniversaire de la Loi sur les langues officielles, l’organisme écrivait : « une seule institution est bien placée, de par son autorité sur l’ensemble de l’appareil fédéral, pour coordonner cette approche globale (à la mise en œuvre de la Loi) : le Bureau du Conseil privé. »

Satisfait du travail réalisé, M. Choquette se dit toutefois inquiet quant à la réaction du gouvernement.

« J’avais demandé que le comité puisse entendre la ministre responsable du dossier de l’outil de traduction automatique, Judy Foote, mais elle n’a pas daigné se présenter ou envoyer des représentants de son ministère des Services publics et de l’Approvisionnement Canada pour répondre à nos questions. Cela a conduit à un grand cafouillage et me donne l’impression que le gouvernement ne prend pas au sérieux ce dossier. Je trouve ça décevant! »

Le bureau de la ministre Foote a fini par répondre, par courriel, aux demandes d’entrevue de #ONfr indiquant que le gouvernement « examine les recommandations du rapport et déposera sa réponse au Parlement dans le délai prescrit de 120 jours » et que le ministère va « collaborer avec d’autres partenaires pour appuyer le gouvernement ».

« En tant que Ministre de Services publics et Approvisionnements et Ministre responsable du Bureau de la traduction, je désire remercier le comité pour leur travail et souligner l’importance de ce rapport. Les langues officielles sont primordiales pour le ministère. Nous continuerons ainsi d’appuyer le gouvernement en nous assurant d’offrir des services de qualité et en travaillant de près avec l’industrie langagière canadienne », a commenté Mme Foote, par courriel.