Le fédéral encore prêt à financer la résistance franco-ontarienne
OTTAWA – Afin d’aider l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) à faire face à un surplus d’activités au cœur de la crise de l’automne dernier, le gouvernement fédéral lui a octroyé un financement supplémentaire l’an dernier et se dit prêt à recommencer.
L’organisme porte-parole des Franco-Ontariens a reçu une enveloppe exceptionnelle de 200 000 $, en 2018, pour couvrir les frais d’opération supplémentaires occasionnés par la situation en Ontario français.
Le 15 novembre dernier, le gouvernement provincial de Doug Ford a déclenché une crise majeure dans la francophonie ontarienne et canadienne en abolissant le Commissariat aux services en français indépendant et en suspendant le projet de création d’une Université de l’Ontario français le temps de rétablir la bonne santé financière de la province.
Ces décisions ont entraîné une vague de protestations à travers le pays, dont le point d’orgue a été les manifestations du 1er décembre à travers la province et le Canada.
Pour aider l’AFO face aux sollicitations et dans l’organisation de ses activités liées à cette crise, la ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly, a jugé important de mettre la main au portefeuille, comme elle l’expliquait mi-décembre.
« J’ai financé davantage l’AFO. J’ai augmenté de 200 000 $ leur budget pour être en mesure de se mobiliser sur le terrain. »
En entrevue avec ONFR+, le président de l’AFO, Carol Jolin, explique à quoi a servi cette somme.
« Il y a eu beaucoup de travail qui a été fait dans le cadre de cette mobilisation. Il a fallu engager du personnel supplémentaire, car notre personnel en place avait déjà ses dossiers et qu’on avait besoin d’aide. Il y a eu beaucoup de mobilisation qui s’est faite à travers la province, des manifestations… Il fallait monter ça. Il y avait des coûts importants. Et très rapidement, ces sommes-là ont été dépensées. »
Critique conservatrice
Le porte-parole en matière de langues officielles pour le Parti conservateur du Canada (PCC), Alupa Clarke, se dit mal à l’aise avec l’aide supplémentaire versée par le gouvernement libéral.
« L’AFO reçoit déjà du financement du fédéral en tant qu’organisme et ça, c’est louable. Mais est-ce que le fédéral doit contribuer de manière financière dans un mouvement de résistance contre un gouvernement provincial? Je ne pense pas. Ça devrait venir du privé ou d’autres groupes. Pour moi, ce geste est un pas de trop, car c’est de l’argent de tous les contribuables. »
Contactée par ONFR+, la ministre des Affaires francophones de l’Ontario, Caroline Mulroney, n’a pas répondu à nos demandes d’entrevue.
Joly encore prête à aider
Le président de l’AFO explique que son organisme est en discussion pour obtenir de nouveau des fonds supplémentaires auprès du gouvernement fédéral.
« On n’a pas encore eu de nouvelles, mais c’est sûr qu’on demande. On ne sait pas jusqu’à quel point ça va cheminer, sachant qu’on est en période électorale très bientôt. Dans le moment, ce qu’on a donc fait à chacune des criées, c’est d’inviter les gens à aller sur notre site Web pour signer la pétition et faire un don pour nous aider à défrayer les coûts. »
Depuis le début de la crise, 26 824 personnes ont signé la pétition d’appui à la résistance franco-ontarienne et 71 301 $ ont été amassés. Ces sommes seront d’autant plus utiles que l’AFO envisage toujours un recours devant les tribunaux.
« On attend des nouvelles du Programme de contestation judiciaire. On sait que c’est éminent. Ensuite, nous verrons avec nos avocats qu’elles seront nos possibilités, notamment suite aux coupures de postes qui vont affecter le Commissariat aux services en français. »
« Nous serons toujours là pour aider les Franco-Ontariens à se défendre » – Mélanie Joly, ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie
Interrogée par ONFR+, la ministre Joly s’est dite ouverte à renouveler son aide exceptionnelle à l’AFO.
« On va toujours être de côté de l’AFO et des Franco-Ontariens qui se battent pour se faire respecter par le gouvernement Ford. S’il y a une demande de la part de l’AFO, nous serons prêts à l’étudier. »
Les prochaines étapes de « la résistance »
En attendant, sur le terrain, le président de l’AFO assure que la mobilisation continue contre les décisions du gouvernement Ford.
Ce mardi, à l’occasion de la dernière étape de sa tournée provinciale de la criée du Manifeste franco-ontarien pour un avenir fort, sur la colline parlementaire à Ottawa, M. Jolin a présenté, devant les députés fédéraux, la prochaine étape.
Le 1er mai, au moment du transfert du Commissariat aux services en français au sein du bureau de l’ombudsman, l’AFO lancera une campagne pour sensibiliser les Franco-Ontariens à l’importance de demander des services provinciaux en français – et surtout – de porter plainte lorsque ce service n’est pas disponible.
« C’est une campagne médiatique et sur les médias sociaux, ainsi qu’auprès des gens inscrits sur le site de la résistance. Ce n’est pas une campagne aussi dispendieuse et on va compter sur les ACFO [Association des communautés francophones de l’Ontario] locales pour passer le message partout », précise M. Jolin.
La présidente de la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO), Lydia Philippe assure que l’intérêt pour la résistance est encore là.
« On l’a vu le 4 avril dernier avec la marche des jeunes pour l’éducation, on le voit aussi sur les réseaux sociaux : quand quelque chose nous tient à cœur, la lutte n’est jamais terminée! »