Les points de presse traduits en français, mais l’opposition demande mieux

TORONTO – Le gouvernement de l’Ontario annonce qu’il offrira désormais la traduction simultanée des points de presse quotidiens à l’occasion de la crise de la COVID-19.
«Notre gouvernement reconnaît les besoins exprimés par les francophones afin qu’ils puissent appuyer cet effort général pour freiner la propagation du virus et d’assurer des soins de santé à tous», écrit la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney, dans un courriel envoyé aux médias, jeudi matin.
«Nous nous efforçons à tous les jours pour nous assurer que tous les Ontariennes et les Ontariens ont l’information dont ils ont besoin dans la langue officielle de leur choix», assure-t-elle.
Et de poursuivre: «En ce sens, nous avons fourni le sous-titrage en français sur la chaîne gouvernementale YouTube et les francophones ont accès en ligne aux communiqués de presse en français et aux informations importantes relatives à la COVID-19. Nous avons également travaillé pour offrir la traduction simultanée des points de presse aux médias, ainsi que sur les chaînes YouTube du gouvernement, et elle sera disponible à partir d’aujourd’hui.»
La veille, trois députés libéraux avaient demandé plus de communication en français de la part du gouvernement provincial.
«Nous vous écrivons pour vous demander de manière urgente et pressante d’ajouter une composante en français à vos mises à jour quotidiennes», ont écrit les députés libéraux Stephen Blais, Lucille Collard et Amanda Simard dans une lettre envoyée au premier ministre ontarien, le 15 avril. «Bien que vous tenez un briefing quotidien en anglais, il n’y a pas de contenu français équivalent pour la communauté.»
Au micro d’ONFR+, la députée Amanda Simard renchérit.
«Après tout ce qui s’est passé lors des deux dernières années, il me semble impensable que le gouvernement n’ait toujours pas le réflexe de penser à la communauté francophone.»
La députée de Glengarry-Prescott-Russell souligne que les personnes âgées sont les plus vulnérables. Incidemment, ce sont aussi les gens qui ont le plus besoin de services en français.

«La semaine dernière, une journaliste a demandé si elle pouvait poser une question en français. M. Ford lui a répondu « non, pas maintenant ». En effet, pas maintenant, pas le jour avant, pas deux semaines avant… alors quand?»
La traduction n’est pas «un traitement égal», dit Amanda Simard
L’annonce de ce jeudi «ne répond aucunement à la demande», affirme la députée libérale.
«C’est carrément rire de nous. Ce que l’on veut, c’est des intervenants à qui l’on peut poser des questions en français», explique Mme Simard. «Ce que le gouvernement nous dit, c’est qu’il n’y a personne dans la fonction publique ontarienne qui est capable de répondre en français. C’est complètement ridicule et l’on sait que c’est faux.»
«La traduction est un accommodement, et non un traitement égal», poursuit-elle. «Il y a trop d’occasions de perdre les nuances en traduction, surtout dans des domaines hautement spécialisés comme la médecine. Comment se fait-il que le gouvernement ait mis quatre semaines pour utiliser le service de traduction qu’il avait déjà à sa disponibilité?»
«Où était la commissaire lors des quatre dernières semaines?», demande-t-elle. «Cette situation ne fait que soulever la nécessité d’avoir un Commissariat indépendant.»
Pour le porte-parole néo-démocrate aux Affaires francophones, Guy Bourgouin, ce dossier de la traduction en français a mis du temps à se dessiner.
«Ça fait plusieurs semaines que je travaille sur le dossier, pour aborder la question de la traduction simultanée. Le Québec le fait en anglais, pourquoi l’Ontario ne le fait-il pas en français? Je suis content que le gouvernement ait écouté quelques-unes de nos préoccupations.»
Le médecin hygiéniste devrait-il être bilingue?
Lors de la pandémie, le Dr David Williams, médecin hygiéniste en chef de l’Ontario, est appelé à tenir des points de presse quotidiens. Mais là aussi, le français reste absent.

«C’est une question qui fait partie de nos discussions avec la ministre Mulroney lors du dernier mois», affirme Guy Bourgoin. «Le médecin hygiéniste en chef doit être capable de répondre en français. On est plus de 700 000 francophones en Ontario et nous ne sommes pas immunisés à la COVID.»
De son côté, Mme Simard se dit prête à faire des compromis.
«C’est certain que l’idéal serait d’avoir un médecin hygiéniste en chef bilingue», note-t-elle d’emblée. «Mais admettons que la meilleure personne pour le poste est unilingue anglophone, alors il faut s’assurer d’avoir une présence francophone, quelqu’un qui peut répondre aux questions.»
Lorsqu’interrogé sur la possibilité de désigner ce poste bilingue, le bureau de la ministre des Affaires francophone a préféré ne pas se prononcer pour l’instant.