L’Université de l’Ontario français bloquée, le recteur quitte
TORONTO – Le recteur par intérim de l’Université de l’Ontario français (UOF), Normand Labrie, quittera ses fonctions à la fin du mois de juin. Un départ qui s’inscrit dans un contexte de crise pour l’établissement universitaire francophone qui a frappé un mur à la suite de coupes francophones de Doug Ford.
« Les choses auraient été différentes, s’il n’y avait pas eu de coupes et un poste de recteur disponible », confie Normand Labrie, en entrevue avec ONFR+. « Normalement, dans le scénario original, un concours pour trouver un recteur se faisait dans les derniers mois pour un poste débutant le 1er juillet », ajoute-t-il.
Après la décision du gouvernement Ford de ne pas aller de l’avant avec le projet universitaire, impossible d’offrir un poste de recteur, ce qui force le départ de M. Labrie. « J’étais en congé sans-solde de l’Université de Toronto avec un contrat d’un an comme recteur par intérim avec l’Université de l’Ontario français », explique-t-il. Son contrat se terminant à la fin du mois de juin, il a pris la décision d’accepter un poste de vice-doyen de l’Institut d’études pédagogiques de l’Université de Toronto (OISE).
Normand Labrie est professeur depuis trois décennies au sein d’OISE. Dans le contexte actuel, il affirme qu’il était naturel de choisir cette voie.
Il affirme être satisfait du travail accompli, malgré les obstacles. « Mon but était de m’assurer que l’Université démarre et décolle. De travailler sur les chantiers, surtout celui académique », note-t-il, affirmant que les derniers mois ont permis de développer des programmes et une stratégie académique qui sera utile à la future institution.
Sera-t-il remplacé après son départ? « Il y a pas de poste de recteur et je ne sais pas s’il y aura un autre recteur par intérim avec la subvention de patrimoine canadien qui prendra fin six mois plus tard », souligne M. Labrie. « Le concours aura lieu un jour. […] Je ne prenais pas pour acquis que j’aurais eu le poste. Ça aurait pu être moi ou quelqu’un d’autre », insiste-t-il.
Depuis plusieurs décennies, Normand Labrie dit espérer la création d’une université de langue française en Ontario. Il poursuivra son implication à titre de professeur associé bénévole, dit-il.
La présidente du Conseil de gouvernance de l’UOF, Dyane Adam, a salué la contribution de Normand Labrie dans une déclaration. « Le Conseil de gouvernance remercie monsieur Labrie pour sa précieuse participation au développement de l’université. Il sera toujours parmi nous. Nous allons continuer à collaborer pour offrir à la communauté francophone des programmes d’éducation en français de qualité », a-t-elle soutenu.
Le 15 novembre dernier, le gouvernement de Doug Ford a mis un frein au projet de l’Université de l’Ontario français, d’abord financé par le gouvernement libéral de Kathleen Wynne. Le projet serait repoussé à une date ultérieure non-dévoilée, en raison du fardeau fiscal de l’Ontario, a soutenu le gouvernement Ford.
Malgré un mouvement de contestation important, le gouvernement provincial a toujours refusé d’entamer des discussions avec son homologue pour trouver une sortie de crise. En janvier, le gouvernement de Justin Trudeau a cependant fait savoir que des fonds seraient débloqués pour maintenir en place l’équipe de mise en œuvre, grâce au financement du carrefour francophone. Ce projet connexe à l’Université doit permettre de rassembler plusieurs acteurs francophones, en attendant la création de l’institution post-secondaire.
La subvention du Carrefour passe par l’Université
Si la subvention fédérale annoncée en janvier est dédiée au Carrefour francophone, elle s’inscrit dans le projet universitaire et est gérée par le Conseil de gouvernance, fait savoir Normand Labrie.
« L’Université est le maître d’œuvre d’établir les conditions qui vont permettre au Carrefour francophone d’exister. C’est intégré dans la mission académique de l’Université. Des organismes vont se joindre au campus et vont participer à la mission académique de l’UOF pour une transformation mutuelle des organismes et de l’Université », explique-t-il.
La subvention fédérale compte trois volets, dit-il. « Soit, pour établir les conditions pour l’ouverture du Carrefour, un autre sur la mobilisation des connaissances au niveau académique et un dernier afin d’établir un plan d’affaire pour trouver des sources alternatives de revenus. Tout ça mène au projet ultime qui est l’université », dit-il.
Les décisions du gouvernement Ford forcent l’Université à privilégier l’avancement du Carrefour francophone, plutôt que celle du volet académique de l’UOF avec ses programmes de baccalauréats.