Effacée depuis sa nomination, Kelly Burke défend son bilan

Rapport Burke Ombudsman services en français
La commissaire aux services en français, Kelly Burke. Archives ONFR+

TORONTO – La commissaire aux services en français de l’Ontario, Kelly Burke, est demeurée loin des projecteurs et des caméras depuis sa nomination. Mais dans une missive envoyée aux citoyens et aux élus de la province, elle vante ses réalisations. L’opposition à Queen’s Park, au contraire, dénonce le faible bilan de son bureau.

Le Commissariat aux services en français a été intégré au bureau de l’Ombudsman de l’Ontario, en mai 2019. « De nombreuses possibilités naissent quand deux institutions se joignent l’une à l’autre », affirme Kelly Burke dans sa lettre.

« Un organisme unique, plus vaste et influent, a été créé pour protéger les droits linguistiques des francophones dans la province et les faire progresser. Nous mettons en place un pilier unique et solide en matière de surveillance », fait-elle valoir.

Kelly Burke dit avoir « perfectionné » la manière dont les plaintes sont traitées. « Les plaignants ont maintenant directement accès à nous, et nous offrons un service efficace et personnalisé aux francophones », dit-elle, sans expliquer davantage ce qui a changé depuis la nouvelle structure.

Dans sa lettre, elle met de l’avant quatre réalisations :

  • « Les lutrins utilisés par le premier ministre et ses ministres sont désormais bilingues »
  • Coronavirus : « Nous avons travaillé avec le ministère de la Santé, Télémédecine Ontario et Santé publique Ontario pour nous assurer que le personnel et les ressources nécessaires étaient en place afin de garantir une offre solide de services en français »
  • Fausse alerte à la centrale nucléaire de Pickering : « Le ministère du Solliciteur général a reconnu le manque de services en français et a apporté des améliorations »
  • Centre de Test au volant de London : « Nous avons travaillé avec le gouvernement pour renforcer l’offre de services en français »

Peu présente sur la scène publique, Kelly Burke a été sollicitée par ONFR+ pour une courte entrevue, particulièrement dans le contexte de la crise actuelle. La directrice des communications de l’ombudsman de l’Ontario, Linda Williamson, a fermé la porte à cette possibilité. « Je regrette, la commissaire n’accordera pas d’entrevues pour le moment », a-t-elle indiqué.

Réactions fortes de l’opposition

« Les lutrins sont désormais bilingues, est-ce que c’est vraiment le gros wow de son année? Franchement! Ça devrait être un réflexe naturel du gouvernement, ça devrait être la norme, ce n’est pas une victoire significative », lance la députée libérale Amanda Simard.

Le néo-démocrate Guy Bourgouin, critique aux Affaires francophones pour son parti, ne mâche pas non plus ses mots.

« Je ne questionne pas qu’elle veut faire des choses et qu’elle a certains accomplissements. Mais, il y a de très gros dossiers qui devraient être abordés. Les dossiers traînent et rien ne change », se désole-t-il.

L’ancien commissaire aux services en français, François Boileau, accordait des dizaines d’entrevues chaque année. Au contraire, Kelly Burke n’est pas présente personnellement sur Twitter et limite ses présences médiatiques.

Guy Bourgouin croit que c’est une bien mauvaise stratégie. « Le gouvernement disait qu’il n’y aurait pas de différence avec l’ancien bureau de François Boileau. Mais la commissaire, on ne la voit pas. Il y a des gens qui pensent qu’il n’y a même plus de commissaire en place! Il serait bon qu’elle s’aide et qu’elle soit visible! », dit-il.

Pour les deux formations politiques de l’opposition, le retour à un Commissariat indépendant aux services en français demeure pertinent.

« C’est un problème structurel. Les gens veulent faire des plaintes, mais là, on a rajouté plein d’étapes en demandant aux gens de se plaindre à l’ombudsman seulement en dernier, après s’être plaint d’abord à l’organisme qu’ils visent. La vérité : les gens vont se tanner et ils n’en feront pas de plaintes », croit M. Bourgouin.

Amanda Simard affirme que dans la communauté franco-ontarienne, les intervenants communautaires n’ont plus le même interlocuteur qu’auparavant.

« Il y a une grosse différence », lance-t-elle.

Elle s’attriste aussi des faibles résultats en matière de services en français face à la pandémie actuelle.

« La commissaire devrait avoir une voix puissante publiquement pour le respect des francophones. L’interprétation simultanée des points de presse de Doug Ford, après un mois, ce n’est pas suffisant. Il fallait un représentant francophone au point de presse. Il y a du travail à faire en termes de proactivité et de réactivité au Commissariat », complète-t-elle.