Trudeau annonce une aide directe de 27 milliards $ en réponse à la COVID-19
OTTAWA – Le premier ministre Justin Trudeau a profité de son allocution quotidienne, ce mercredi, pour présenter un Plan d’intervention économique de 27 milliards de dollars. Une aide jugée bienvenue par les acteurs économiques de la francophonie canadienne qui attendent toutefois d’en savoir davantage.
Après avoir confirmé la fermeture « dans un très bref délai » de la frontière entre les États-Unis et le Canada pour les déplacements non essentiels, ce qui ne devrait donc pas concerner les échanges commerciaux, le premier ministre a détaillé les très attendues mesures de son gouvernement pour venir en aide aux entreprises et aux particuliers touchés par les conséquences économiques de la COVID-19.
« Aujourd’hui, on annonce un plan pour aider les gens. On se concentre sur les besoins les plus pressants, mais comme je le dis depuis le début, notre réponse évoluera au fur et à mesure que la situation évoluera », a déclaré M. Trudeau devant les journalistes.
L’enveloppe de 27 milliards de dollars prévoit plusieurs bonifications d’allocation et de programmes pour les familles, les personnes à faible revenu et les petites et moyennes entreprises. Plusieurs de ces mesures devraient être mises en place d’ici deux semaines, alors que d’autres devront attendre de recevoir la sanction royale.
« Nous travaillons pour passer les mesures législatives le plus rapidement possible avec les partis d’opposition », a indiqué M. Trudeau qui a souligné la bonne collaboration entre les partis fédéraux dans ce dossier.
Alors qu’il a été souvent reproché au gouvernement libéral d’être trop dépensier, le ministre des Finances, Bill Morneau a défendu l’approche fédérale.
« Nous vivons une période extraordinaire qui exige des mesures extraordinaires. »
Satisfaction dans le milieu économique francophone
Dans le milieu économique francophone, la satisfaction est de mise.
« Le gouvernement prend les mesures qui s’imposent. On les attendait et on est rassuré », commente le président-directeur général du RDÉE Canada, Jean-Guy D. Bigeau, à ONFR+.
La directrice générale du Regroupement des gens d’affaires de la capitale nationale (RGA), Lise Sarazin, souligne certaines mesures, comme le répit fiscal annoncé par M. Trudeau, qui permettra aux entreprises de reporter, après le 31 août, le paiement de tout montant d’impôt sur le revenu exigible entre aujourd’hui et le mois de septembre. Cette mesure, pour les particuliers et les entreprises, est évaluée à 55 milliards de dollars supplémentaires. Un répit fiscal a également été annoncé, au niveau municipal, ce mercredi, par la Ville d’Ottawa.
« Ces mesures ne vont pas tout réparer, mais elles vont dans le bon sens et sont excellentes dans un contexte d’incertitude. Et c’est bien de voir les différents paliers travailler ensemble. »
Au Conseil de la coopération de l’Ontario (CCO), le directeur général, Julien Geremie, parle d’un « bon début ».
Particulièrement touché par les conséquences économiques de la pandémie, le milieu artistique apprécie lui aussi l’aide prévue pour les travailleurs autonomes qui se retrouvent sans activité.
« C’est sans doute la meilleure solution dans le contexte, mais on attend de voir quels seront les critères d’admissibilité pour voir si ça répond aux besoins des artistes qui, sur le terrain, voient leurs tournées complètes être annulées. Il y a un situation d’urgence dans le milieu », explique Daniel Sauvé, président de l’Association des professionnels de la chanson et de la musique (APCM).
Des questions sur la mise en place des mesures
Car malgré l’accueil positif des mesures annoncées, tous les intervenants attendent d’en savoir plus sur la mise en place des mesures fédérales, espérant notamment qu’elles soient vite déployées.
« La mécanique reste à voir pour que ces aides soient disponibles assez rapidement, car nos partenaires, surtout les petites et moyennes entreprises, ont des besoins urgents et souffrent davantage. Leur activité est ralentie, parfois ils doivent même fermer, comme les restaurants, et même s’ils laissent aller leurs employés, ils ont encore à payer leur loyer et leurs infrastructures », souligne M. Bigeau.
Le directeur général du CCO formule plusieurs craintes.
« Les mesures annoncées sont très compliquées. Il aurait fallu rendre le processus plus simple, avec un formulaire unique, par exemple, dans lequel les entreprises auraient indiqué leurs besoins pour être redirigées ensuite vers le bon programme. Là, on demande aux entreprises de se débrouiller alors qu’elles se retrouvent avec moins de ressources humaines. »
M. Geremie juge également insuffisante la subvention salariale aux petites entreprises de 10 % des salaires pendant les 90 prochains jours.
« Pour une entreprise qui doit fermer ses portes et qui n’a plus aucune rentrée d’argent, comment peut-elle payer les 90 % restants? », interroge-t-il.
Soutenir les entreprises et les artistes
En attendant, chaque organisme essaie d’aider ses membres à faire face à la situation.
« Beaucoup de nos membres ne savent pas quand prendre la décision de fermer, ils ont peur de perdre leurs employés… On essaie de leur donner les informations le plus rapidement possible et de les conseiller », dit Mme Sarazin.
Avec ses homologues provinciaux, le RDÉE Canada promet d’intervenir auprès du gouvernement fédéral pour avoir toute l’information utile à transmettre à ses partenaires. Et du côté du CCO, on prévoit offrir des services en ligne pour guider les coopératives dans ces nouveaux programmes.
Le président de l’APCM lance également un appel au public.
« Les concerts sont la principale source de revenu pour nos artistes et de plus en plus d’entre eux font des Facebook live. On encourage le public à leur faire des contributions volontaires. Chaque petit don compte. »
Les principales mesures économiques annoncées par Ottawa
- Augmentation temporaire de l’Allocation canadienne pour enfants
- Allocation pour soins d’urgence : jusqu’à 900 $ aux deux semaines pour un maximum de 15 semaines pour les travailleurs, y compris autonomes, qui doivent rester à la maison et qui n’ont pas de congés de maladie payés
- Allocation de soutien d’urgence : jusqu’à 5 milliards de dollars pour les travailleurs qui ne sont pas admissibles à l’assurance emploi et qui risquent de perdre leur emploi
- Versement complémentaire spécial du crédit pour taxe sur les produits et services pour les personnes et familles à revenu faible ou modeste
- Suppression, pendant au moins six mois, de la période d’attente obligatoire d’une semaine visant les prestations de maladie pour les travailleurs mis en quarantaine imposée ou qui ont reçu la directive de s’isoler
- Prolongation jusqu’au 1er juin de la date limite pour transmettre sa déclaration de revenus et autorisation à tous les contribuables de reporter après le 31 août 2020 le paiement de tout montant d’impôt sur le revenu dû
- Subvention salariale aux petites entreprises ainsi qu’aux organisations sans but lucratif et aux organismes de bienfaisance : équivalant à 10 % des salaires pendant les 90 prochains jours, et ce, jusqu’à concurrence de 1 375 $ par employé et de 25 000 $ par employeur
- Moratoire de six mois, sans intérêt, sur le remboursement des prêts d’études
- Mise en place d’un nouveau Fonds de soutien aux communautés autochtones de 305 millions de dollars
- Aide jusqu’à 50 millions de dollars aux refuges pour femmes et aux centres d’aide aux victimes d’agression sexuelle
Cet article a été mis à jour le 18 mars 2020, à 16h08