Toronto : Impatience pour une Maison de la francophonie

Le drapeau franco-ontarien devant l'hôtel de ville de Toronto.

TORONTO – Après trente ans de discussions, la métropole du Canada n’a toujours pas de Maison de la francophonie et la pression monte pour que le projet voie enfin le jour. La balle est dans le camp de la première ministre ontarienne, Kathleen Wynne, disent maintenant plusieurs acteurs francophones de Toronto.

ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

« Kathleen Wynne a droit de vie ou de mort sur le projet. Nous avons fait nos devoirs. Au cours des dernières années, nous avons bâti un plan d’affaire crédible, nous avons fait des études de faisabilité, nous avons rencontré différents ministères et nous avons eu des discussions avec la première ministre et ses conseillers. Le projet tient la route, il faut maintenant du courage politique », affirme Richard Kempler, administrateur du comité provisoire de la Maison de la francophonie.

Tout le travail nécessaire a été fait par la communauté, dit-il, sans hésiter. L’idée de regrouper des organismes communautaires sous un même toit, comme la Maison souhaite le faire, s’inscrit même dans la lignée des initiatives encouragées par le gouvernement, selon lui. Alors qu’est-ce qui peut expliquer l’absence de décision des dirigeants politiques dans ce dossier?

« Donner 20 millions à des francophones, c’est peut-être mal vu. C’est probablement difficile politiquement. Il y a aussi le fait que nous sommes une communauté invisible. Nous n’avons pas de quartier, on se mêle bien au reste des citoyens et on est tenus pour acquis. Pourtant, les francophones sont une donnée fondatrice de l’Ontario », répond M. Kempler.

La première ministre ontarienne est interpellée dans ce dossier dans une lettre de l’Association des communautés francophones de l’Ontario (ACFO) à Toronto. Le président de l’organisme, Gilles Marchildon, presse Mme Wynne à donner son appui au projet et à y investir les sommes nécessaires à sa réalisation.

« La métropole du pays doit refléter la dualité linguistique. C’est à l’avantage de la ville et de la province d’avoir un lieu physique qui regroupe plusieurs organismes francophones et permet à la francophonie de rayonner », a indiqué M. Marchildon lors d’un entretien avec #ONfr, le mercredi 21 octobre.

Selon le président de l’ACFO-Toronto, il n’y a pas de meilleur moment pour faire une annonce en ce sens.

« Il y a un contexte politique intéressant qui s’annonce avec le résultat de l’élection fédérale. Il y a plusieurs élus franco-ontariens. C’est aussi le 400e de la présence francophone en Ontario, il ne faut pas rater cet alignement des astres », affirme M. Marchildon.

 

Demande de 20 millions $

Vingt-cinq millions de dollars sont nécessaires à l’ouverture de la Maison de la francophonie. « Au niveau provincial, on demande 20 millions $. Mais le gouvernement ontarien peut ensuite s’adosser au gouvernement fédéral pour 10 millions $ et finalement ne payer que 10 millions $ », explique Richard Kempler, qui fait savoir qu’une centaine d’organismes communautaires francophones pourraient bénéficier des locaux et services de la Maison. Il ajoute qu’après son ouverture, la Maison pourra ensuite s’autofinancer et n’aura plus besoin des deniers publics.

Le représentant du comité provisoire de la Maison de la francophonie croit aussi que le changement de gouvernement au niveau fédéral pourrait faire débloquer les choses. Richard Kempler affirme que le nouveau premier ministre du pays, Justin Trudeau, a déjà donné son appui au projet, tout comme un autre libéral, l’ancien premier ministre Jean Chrétien.

Le gouvernement libéral à Queen’s Park se dit, pour sa part, « très intéressé » par le projet de Maison de la francophonie à Toronto.  Mais il demande du même souffle aux francophones dans la métropole de patienter un peu plus. « On y travaille », explique la ministre Madeleine Meilleur, responsable des Affaires francophones. « C’est sûr que la conjoncture économique n’est pas très propice présentement à la Maison de la francophonie. Mais c’est important. La conversation continue. »

Mme Meilleur n’écarte pas la possibilité de « jumeler » le projet de Maison de la francophonie à Toronto avec celui d’une éventuelle université franco-ontarienne, alors qu’un premier campus à Toronto est réclamé par le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) d’ici 2018.

Rappelons que le collège Boréal prévoit occuper des locaux dans le futur édifice de la francophonie torontoise.