50 ans : le Centre franco-ontarien de folklore regarde vers l’avenir
SUDBURY- Le Centre franco-ontarien de folklore a officiellement soufflé sa 51e bougie le 14 février. Plusieurs activités ont été organisées dans la dernière année afin de souligner ce demi-siècle d’existence. Le souper du patrimoine, qui aura lieu ce vendredi, viendra clore les festivités. En ce Mois du patrimoine franco-ontarien, voici un tour d’horizon du passé, du présent et de l’avenir de cet organisme.
Le 14 février 1972, l’Institut de folklore, mené par le père Germain Lemieux, se détache de l’Université de Sudbury pour devenir un organisme indépendant : le Centre franco-ontarien de folklore (CFOF). Sa mission sera de « recueillir, de préserver et de mettre en valeur le patrimoine oral franco-ontarien », comme on peut toujours le lire sur son site web. Le moment est idéal : la vie culturelle bouillonne dans le Nord et la société est en plein changement.
C’est en constatant les nombreuses fermetures de camps de bûcherons, où il avait travaillé dans sa jeunesse, que le père Lemieux décide de partir sur la route. Il se met à enregistrer les « jongleurs du billochet », comme on appelait ceux qui divertissaient les bûcherons à la fin des journées de labeur.
De fil en aiguille et de bouche à oreille, le fondateur du CFOF a réalisé plus de 5 000 enregistrements, majoritairement dans la région du Grand Sudbury. Des années 70 à 90, il publiera une collection de 36 livres intitulée Les vieux m’ont conté.
Ces ouvrages sont une référence internationale dans le domaine de la conservation du patrimoine oral. Ils se distinguent entre autres par la façon qu’avait Germain Lemieux de refléter le langage parlé en écrivant les mots tels qu’ils avaient été prononcés par les conteurs. Il offrait ensuite une « traduction » en français un peu plus littéraire.
En entrevue avec ONFR+, le directeur général actuel du CFOF, Patrick Breton, explique l’importance du fondateur de l’organisme : « Le père Lemieux a gardé en mémoire des choses qu’on avait laissé tomber. On se disait que ce n’était pas important (…). Il a permis à beaucoup de gens de se rappeler d’où ils viennent. »
Un autre fait marquant de l’histoire du CFOF est l’inventaire du patrimoine franco-ontarien réalisé dans les années 90. « C’est un ouvrage qui a été une référence de base. Parce qu’on parlait souvent des Franco-Ontariens (… ), mais ils viennent d’où? Quand est-ce qu’ils se sont établis? Il n’y avait rien qui avait été fait de très structuré », souligne M. Breton.
Une mission actualisée
Si la collecte de données a été au cœur des premières années du CFOF, Patrick Breton se concentre maintenant surtout sur le volet « diffusion » de la mission. Le directeur général cumule les partenariats pour faire rayonner l’organisme.
Par exemple, durant l’année du cinquantenaire, Sudbury a accueilli un colloque international sur les archives non universitaires en milieux francophones minoritaires. Le festival Les vieux m’ont conté, qui en sera à sa 7e édition en 2023, accueillera un échange avec un conteur de la Maison natale Louis-Fréchette de Lévis, au Québec.
À l’échelle locale, la collaboration avec d’autres organismes culturels a été grandement facilitée en avril dernier, avec le déménagement dans les locaux de la nouvelle Place des Arts du Grand Sudbury, où plusieurs organisations ont pignon sur rue. Le CFOF organise également de nombreuses visites dans les écoles.
Pour M. Breton, il est primordial d’encourager les citoyens, particulièrement les nouvelles générations, à découvrir le patrimoine oral franco-ontarien. « C’est lorsque les jeunes entendent des contes qu’ils vont se mettre à conter. »
Lorsqu’on lui demande comment se porte la culture francophone dans le Nord de l’Ontario aujourd’hui, il répond : « C’est encore là, c’est encore fort. C’est sûr qu’il y a un exode des jeunes vers le Sud (…). Ceux qui restent là sont quand même forts et fiers. »
Malgré les difficultés, dont l’omniprésence de l’anglais à la radio, à la télé ou sur le web, certains événements permettent de constater un engouement encore présent pour les activités folkloriques. L’un des moments forts du cinquantenaire fut la fête des Rois 2023, une soirée de chansons à répondre avec un « calleur » professionnel. Les organisateurs ont dû refuser des participants puisque la salle était complète.
Si le cinquantenaire a laissé de beaux souvenirs dans les esprits de ceux qui y ont participé, un élément matériel pourra en témoigner. Le livre Sur les épaules d’un géant, qui regroupe une cinquantaine de témoignages, est toujours en vente au CFOF.
Les prochains projets
Le souper du patrimoine, qui aura lieu ce vendredi, viendra officiellement clore l’année de festivités. Les quatre employés (deux réguliers et deux stagiaires) ne chômeront pas pour autant en 2023.
Le CFOF accueillera en effet le congrès annuel de l’organisme bilingue Storyteller Canada/Conteurs du Canada du 30 mai au 4 juin.
La prochaine édition du festival Les vieux m’ont conté se tiendra du 10 au 15 octobre. Les activités les plus populaires seront de retour : Le concours de la plus grande menterie, le marathon du conte, l’activité crêpes et contes et la randonnée contée, en version améliorée.
Des contes issus de partout en province seront diffusés grâce aux enregistrements de conteurs locaux pour les capsules L’Ontario raconté. Des conteurs de Redlake, Thunder Bay, Sault Ste. Marie et North Bay sont déjà confirmés.
En attendant, il est possible de découvrir le Centre franco-ontarien de folklore à la Place des Arts du Grand Sudbury ou sur les réseaux sociaux. Le compte Youtube de l’organisme regorge de vidéos de contes, de témoignages de citoyens, d’activités virtuelles offertes pendant la pandémie et d’extraits de projets passés, comme le documentaire Mémoires de la route 11.
Patrick Breton compte utiliser tous les outils pour conserver le patrimoine oral franco-ontarien. Mais le moyen de diffusion le plus efficace, c’est encore le citoyen : « On veut que les gens continuent de se raconter des histoires. Qu’ils continuent de chanter des chansons traditionnelles. Même si on les adapte. Même si on en invente des nouvelles. Qu’on fasse des chansons à répondre dans nos partys de famille. Tu n’as pas besoin de guitare, tu n’as pas besoin de système de son. Fais juste te mettre à chanter, si tu veux. »