Société

50 ans du drapeau franco-ontarien : plusieurs générations, une même fierté

Drapeau franco-ontarien. Archives ONFR

Le 25 septembre 1975, le drapeau vert et blanc frappé du lys et du trille était hissé pour la première fois à Sudbury. D’est en ouest, cinq Franco-Ontariens de différentes générations racontent ce que représente pour eux ce demi-siècle de luttes, de fierté et d’espoir.

Cinquante ans plus tard, les Franco-Ontariens luttent toujours pour préserver leur culture et la promouvoir. D’est en ouest, cinq voix de différentes générations témoignent de cette vitalité à l’occasion du 50ᵉ anniversaire de la levée du drapeau franco-ontarien.

« Le drapeau franco-ontarien représente les efforts des générations avant nous pour faire reconnaître le peuple francophone et assurer notre place en Ontario », affirme Jacinthe Rivard, enseignante en éducation spécialisée à l’École secondaire catholique Sainte-Marie, à New Liskeard, dans le Nord-Est de la province.

Jacinthe Rivard, enseignante à New Liskeard, milite pour transmettre la fierté francophone aux jeunes générations. Gracieuseté

Native d’Earlton, Jacinthe a baigné depuis l’enfance dans la cause. Elle a grandi sur la ferme familiale Bison du Nord, une entreprise issue du mouvement de la francophonie ontarienne. Son père, Pierre Bélanger, a été membre actif de la coopérative d’artistes CANO (Coopérative d’artistes du Nouvel-Ontario 1971-1974) et du Théâtre du Nouvel-Ontario (TNO) fondé en 1971 à Sudbury.

Transmettre la fierté, un autre combat

Aujourd’hui, elle perpétue cet engagement : « Nous voulons assurer que les générations qui viennent maintiennent cette fierté-là, malgré les obstacles d’assimilation et malgré le portrait de la société qui change. »

Pour Jacinthe, la lutte a évolué. « Dans les années 1970, il s’agissait surtout d’obtenir la reconnaissance et des services en français. Aujourd’hui, il faut surtout transmettre la fierté et préserver la langue », témoigne-t-elle.

Mère de jeunes enfants, elle lance un message clair : « Soyez fiers de votre langue. Ne craignez pas de vous afficher en français. »

À Ottawa, Maryse Lefebvre entame sa trentième année d’enseignement en éducation physique et art dramatique avec la même mission : « Faire vivre la francophonie le plus possible auprès des élèves. » 

Maman de cinq enfants, elle n’a « jamais parlé anglais dans ma maison » et insiste sur la force du bilinguisme : « Parler deux langues ouvre plus de portes, autant pour les études que pour l’emploi. »

Mais elle constate qu’il faut sans cesse raviver la fierté francophone, surtout quand « la plupart des familles parlent anglais ou une autre langue à la maison ».

Maryse Lefebvre ravive chaque jour la fierté francophone de ses élèves et des futurs enseignants qu’elle forme. Gracieuseté

Membre de l’animation culturelle de son école, Maryse accompagnera le 25 septembre ses élèves de la 3ᵉ à la 6ᵉ année à la place TD, où une quarantaine d’écoles et une douzaine d’artistes se réuniront pour une immense « Folie furieuse du drapeau ». De retour à l’école, un second lever du drapeau permettra aux plus jeunes de vivre eux aussi ce moment.

Soucieuse de la relève, elle a déjà accueilli près de 60 stagiaires : « Il est essentiel que les nouveaux enseignants découvrent la réalité de la francophonie ontarienne. »

Une relève engagée 

À 16 ans, Marie-Claude Bisson, présidente de la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO), incarne une relève confiante.

« Le 50ᵉ anniversaire représente la solidarité des Franco-Ontariens. Il rappelle que nous sommes toujours présents malgré des années difficiles et célèbre les progrès réalisés pour nos droits linguistiques. »

À 16 ans, Marie-Claude Bisson aspire à porter la voix des jeunes francophones de l’Ontario. Gracieuseté

Elle se rendra à Sudbury pour participer au lever du drapeau à l’Université de Sudbury et au banquet en soirée. Pour elle, le drapeau est « notre symbole commun », qui incarne « non seulement la langue française mais aussi l’unité de notre communauté, quels que soient les accents ».

Ce drapeau « me rappelle d’où je viens et l’importance de continuer à vivre en français »
— Jacob Pilon, étudiant en science politique

Jacob Pilon, 18 ans, citoyen de Cornwall et étudiant en science politique à l’Université d’Ottawa, voit dans la Journée franco-ontarienne « une occasion unique de se rassembler et de célébrer notre culture ».

« Le drapeau est un symbole qu’on voit partout dans la province. Il me rappelle d’où je viens et l’importance de continuer à vivre en français, que ce soit dans mes études ou ma vie quotidienne », explique-t-il.

Parler français n’est pas seulement une richesse, estime Jacob, c’est aussi une responsabilité. Ses études en sciences politiques traduisent son désir d’influencer un jour l’avenir de la francophonie.

Jacob Pilon, citoyen de Cornwall, est également président du Comité 73. Gracieuseté

Un demi-siècle d’histoires à partager

Écrivain installé à La Fontaine (Huronie), Daniel Marchildon se souvient du moment où le drapeau a pris sens pour lui.

« Ce n’est pas tant le premier lever en 1975 qui m’a marqué, mais les années suivantes, quand il a commencé à apparaître dans la communauté. J’étais au secondaire quand j’ai commandé mon premier drapeau. Le déballer a été un moment marquant », raconte-t-il.

Le 25 septembre, il participera aux festivités locales, levée du drapeau et musique. Il a aussi écrit dix capsules historiques diffusées sur cinq radios communautaires ce mois-ci, un projet qu’il qualifie de « très riche et amusant ».

Écrivain, Daniel Marchildon célèbre le drapeau à travers ses écrits et ses capsules radio. Crédit : John Sharp

Se projetant dans l’avenir, il entrevoit une francophonie plus diverse et inclusive, mais toujours profondément attachée à la langue française et à la culture d’expression française.

« Cinquante ans, c’est quand même beaucoup. Le drapeau franco-ontarien s’inscrit désormais dans une longévité qui témoigne de l’espoir et de la vitalité de l’Ontario français », conclut-il.