Accord historique entre la province et la Ville de Toronto
TORONTO – La Ville de Toronto, sous la pression d’un déficit de 1,5 milliard de dollars, et la province ont conclu un accord historique, cette dernière lui octroyant 1,3 milliard de dollars pour alléger ses finances et réaliser de gros investissements dans le logement, les transports en commun et la lutte contre l’itinérance. En contrepartie, la mairesse Olivia Chow donne quant à elle son feu vert au projet de développement de la Place de l’Ontario du gouvernement Ford, qui prend désormais aussi le contrôle des autoroutes Gardiner et Don Valley.
Le premier ministre ontarien et la mairesse de Toronto se sont réunis ce lundi à Queen’s Park pour annoncer une collaboration à grande échelle, résultats de dix semaines de discussions entre les deux niveaux gouvernementaux.
« Ce nouvel accord historique contribuera à soutenir la croissance future de Toronto, en mettant en œuvre des priorités communes telles que la construction de logements, les transports en commun et les infrastructures, a déclaré le premier ministre Doug Ford, qui s’est dit très reconnaissant envers la mairesse Olivia Chow pour cette collaboration.
L’Ontario fournit ainsi à la Ville Reine un soutien de 1,2 milliard de dollars sur trois ans, comprenant 330 millions de dollars pour les nouveaux projets provinciaux de transport en commun intégrés au métro, le transport léger sur rail (TLR) d’Eglinton Crosstown et de Finch West, ainsi que 750 millions de dollars pour l’achat de 55 nouvelles rames de métro pour la ligne 2.
Un financement ponctuel de 300 millions de dollars assurera la sécurité et la durabilité du réseau de métro et de transports en commun si la ville s’engage sur le volet sécurité pour les usagers du CTT, avec une présence accrue de policiers et d’agents de sécurité sur le réseau de transport, et une amélioration des signalements d’urgence et de délais d’intervention.
L’offre comprend également 600 millions de dollars dédiés aux refuges dans le cadre de la lutte contre l’itinérance. Toronto a également accepté d’atteindre voir d’excéder ses cibles annuelles en logement fixées par la province en identifiant et mettant à disposition les terrains provinciaux et municipaux excédentaires pour la construction de logements.
« Toronto a accepté de produire 73 000 nouveaux logements d’ici 2025 », s’est réjoui Doug Ford en conférence de presse.
« Ce nouvel accord permet de libérer le plein potentiel de Toronto. Ainsi, la ville bénéficiera de milliards de dollars supplémentaires pour la construction de logements abordables, la modernisation de notre système de transport et la mise en place de collectivités intégrales avec des services de garde d’enfants, des centres communautaires, des parcs et bien plus », a déclaré Olivia Chow, évoquant les foules amassées devant les banques alimentaires et les 85 000 foyers sur liste d’attente pour un logement abordable.
« J’ai hâte que nous puissions rendre Toronto plus abordable », a-t-elle conclu.
Des contreparties pour l’Ontario
Dans le cadre de cet accord, la ville accepte que la province soit habilitée à approuver les projets controversés du gouvernement de développement sur les 155 acres (62,73 hectares) de la Place de l’Ontario, le long du lac Ontario, comprenant la création d’un centre thermal privé de la société autrichienne Therme Group, projet d’une valeur de 450 millions de dollars dont 350 millions pour un spa privé et 100 millions pour la partie publique.
Questionnée par les journalistes sur ce dossier épineux, la mairesse a alors simplement répondu : « Ça s’appelle la Place de l’Ontario. Le terrain appartient donc à la province ».
La province a accepté d’étudier la possibilité de déplacer le parc de stationnement sur le terrain de la Place des expositions afin d’améliorer l’accès du public au littoral et de discuter des possibilités de partenariat avec la ville pour maintenir une programmation scientifique publique et communautaire dans les anciens locaux du Centre des sciences de l’Ontario, que le gouvernement voulait relocaliser à la Place de l’Ontario.
« Le terrain du Centre des sciences appartient à la ville, l’immeuble à la province », explique Olivia Chow. « Nous allons établir un partenariat pour nous assurer que personne n’y perde ».
En conférence de presse, le premier ministre ontarien évoquait « la réparation de notre réseau autoroutier vieillissant », l’accord comprenant la prise en charge par la province des autoroutes Gardiner et Don Valley, « sous réserve d’un examen par un tiers par souci de diligence raisonnable; comme il s’agit d’autoroutes sans péage, cette proposition garantira leur viabilité à long terme, au bénéfice des automobilistes et des commerçants de la région du Grand Toronto », précise un communiqué de presse.
Enfin, la province opèrera une supervision financière via des « discussions sur la viabilité à long terme des finances et du fonctionnement de Toronto par le biais de la revue ciblée Toronto-Ontario, dont le mandat sera établi d’ici à 2025 ».
Un appel à l’action au troisième palier gouvernemental
« Toronto contribue à hauteur de 20 % du PIB du Canada, d’où la demande d’aide au fédéral. Quand Toronto réussit, le Canada réussit. Nous sommes la locomotive du pays », a lancé le premier ministre ontarien, qui a invité Ottawa à financer des initiatives dans l’hébergement des demandeurs d’asile et les transports en commun.
De renchérir : « Nous demandons au gouvernement fédéral d’intervenir pour l’aide à l’hébergement et à l’infrastructure du transport. Tous les niveaux de gouvernement doivent collaborer, Toronto occupant une place à part parmi les villes canadiennes, tant par les défis qu’elle doit relever que par sa contribution de longue date et inégalée à la réussite collective de la province. »
« Nous avons besoin que le fédéral se joigne à nous et devienne un partenaire à part entière », a également appuyé la mairesse.
L’aide de 600 millions de dollars pour les dépenses de fonctionnement des refuges mentionnée plus tôt ne concerne d’ailleurs pas l’aide aux réfugiés, sous réserve d’une nouvelle aide fédérale pour les réfugiés et les demandeurs d’asile.
De même, le financement des 55 nouvelles rames de métro pour la ligne 2 de la CTT, dépend de subventions de contrepartie du gouvernement fédéral.
Parmi les nombreuses réactions suivant l’annonce, le NPD a salué cette entente d’Olivia Chow pour la Ville de Toronto : « Toronto avait besoin d’un nouvel accord, et la mairesse l’a obtenu. Elle a hérité d’un énorme gâchis d’un maire conservateur qui a plongé les finances de la ville dans le fossé. Et maintenant, elle a réussi à convaincre le premier ministre de venir à la table et de négocier un nouvel accord pour Toronto », a déclaré la cheffe néo-démocrate Marit Stiles.
« Il ne fait aucun doute que les municipalités de toute la province, y compris Toronto, sont en difficulté (…) Nos députés provinciaux de Toronto ont soutenu sans réserve un nouvel accord parce que la ville mérite un partenaire provincial qui s’investit dans son succès. »
Le maire sortant John Tory a lui aussi félicité les intéressés sur son compte X (ex-Twitter) : « Cet accord représente une première étape extrêmement importante dans la reconnaissance du statut unique de Toronto parmi les villes de l’Ontario et du Canada et pour commencer à relever certains des défis qui en découlent. »