Accord trouvé sur l’Université de l’Ontario français
OTTAWA – Après moult rebondissements, le gouvernement fédéral et son homologue provincial sont parvenus, ce samedi, à conclure une entente de financement pour la création de l’Université de l’Ontario français (UOF) pour le plus grand soulagement de la communauté franco-ontarienne.
Il était minuit moins une, selon l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO). La perspective très prochaine du déclenchement des élections laissait craindre le pire pour l’organisme porte-parole des Franco-Ontariens.
Mais ce samedi, en fin de journée, l’organisme et ses partenaires dans le dossier, le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) et la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO), pouvaient pousser un grand soupir de soulagement.
Le gouvernement progressiste-conservateur ontarien et le gouvernement libéral fédéral sont parvenus à un protocole d’entente. Après deux longues journées de négociations, les conversations entre la ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly et la ministre des Affaires francophones, Caroline Mulroney, ont fini par permettre de débloquer la situation.
« J’ai appelé Mme Mulroney et lui ai demandé si elle voulait vraiment régler le dossier », raconte la ministre fédérale. « Aujourd’hui, c’est un grand jour pour les Franco-Ontariens. On jette les bases de la création de l’Université de l’Ontario français qui était réclamée depuis des décennies. »
Son homologue provinciale confie à ONFR+ ne jamais avoir douté.
« Dans une négociation, il y a toujours un va-et-vient, mais nous voulions tous trouver une solution et je suis fière qu’on y soit arrivé », se réjouit Mme Mulroney en entrevue avec ONFR+. « Je suis très heureuse et très fière que l’Ontario ait mis de l’avant une solution qui va bénéficier à la communauté franco-ontarienne. C’est une entente historique! »
Concessions
Ces derniers jours, les positions des deux gouvernements semblaient pourtant inconciliables. Mais finalement, les deux paliers de gouvernement se disent heureux avec le protocole d’entente négocié, qui prévoit un financement partagé.
Ottawa payera les quatre premières années de démarrage du projet, avant que la province ne prenne le relais, pour la même somme, soit 63 millions de dollars, les quatre années suivantes. Le coût total est estimé à 126 millions de dollars.
« J’avoue avoir eu l’impression, ces dernières semaines, d’être dans un film de suspens. Mais je préfère vivre ça au cinéma! » – Dyane Adam, Université de l’Ontario français
La province a fait parvenir sa proposition officielle à Ottawa et obtenu que le fédéral ne déduise pas de son investissement final les 1,9 million de dollars dépensés, en janvier, pour maintenir l’équipe de l’UOF en vie.
En échange, la province a accepté une clause qui prévoit qu’elle remboursera Ottawa si elle ne paie pas sa part après les quatre premières années. La province reconnaît également sa responsabilité quant à l’avenir de l’institution, notamment après ces huit premières années.
Longs mois de travail
Le dossier de l’UOF fait les manchettes depuis la décision ontarienne, en novembre, de mettre le projet sur la glace. Une décision qui avait entraîné une crise majeure en Ontario français, avec des répercussions sur la politique fédérale.
Malgré les appels du pied répétés du gouvernement fédéral pendant des mois, la province n’avait finalement décidé de négocier que le 1er août dernier, bien que, selon la présidente du conseil de gouvernance de l’UOF, Dyane Adam, le travail se soit poursuivi en coulisses dès janvier.
« L’aide du gouvernement fédéral, en janvier, nous a permis de rester en vie et de travailler avec la province pour bonifier le projet, faire en sorte que le gouvernement se l’approprie et qu’au final, il décide de le financer. »
Pour la ministre ontarienne, c’est le dévoilement du budget provincial qui a permis de trouver une solution.
« À partir du moment où nous avons ouvert la voie vers l’équilibre budgétaire de la province, nous pouvions envisager l’offre du gouvernement fédéral. »
L’impact du 1er décembre
Mais pour le président de l’AFO, Carol Jolin, c’est la mobilisation du 1er décembre qui a fait la différence.
« Ça a envoyé un message au gouvernement », pense-t-il. « Aujourd’hui, nous voulons remercier Mme Joly qui a toujours été derrière le dossier, Mme Mulroney qui a réalisé un travail colossal pour faire cheminer le dossier au sein de son caucus, ainsi que M. Romano [ministre ontarien de la Formation et des Collèges et Universités]. »
Pour M. Jolin, ce 7 septembre 2019 rejoindra Montfort dans l’histoire franco-ontarienne. Un avis que partagent les coprésidences du RÉFO, Marie-Pierre Héroux et Radi Shahrouri, par voie de communiqué.
« Cela fait plus de 40 ans que nos communautés militent activement pour avoir accès à une institution universitaire par et pour les francophones. À travers les années, les Franco-Ontariennes et Franco-Ontariens ont su aller chercher leurs institutions d’enseignement primaires, secondaires, et collégiales; aujourd’hui, nous faisons un pas en avant vers l’acquisition de notre institution universitaire. Aujourd’hui, nous investissons dans notre jeunesse, et dans notre avenir. »
Prochaines étapes
Plusieurs détails restent à régler, mais cette fois plus rien ne s’oppose à l’ouverture de l’institution franco-ontarienne.
« Le travail va pouvoir se poursuivre malgré les élections », confirme la ministre Joly, qui précise qu’en cas de changement de gouvernement le 21 octobre prochain, les fonds seront quand même là. « Si un prochain gouvernement décidait de couper ces fonds, ce serait sa décision et il en subirait les conséquences », prévient-elle.
Le chef du Parti conservateur du Canada, Andrew Scheer, a toutefois répété, vendredi, son appui au projet, ce qu’avait également déjà fait le chef du Nouveau Parti démocratique, Jagmeet Singh.
Du côté de l’UOF, encore bien du travail reste à accomplir. Mme Adam assure à ONFR+ être confiante de parvenir à une ouverture en septembre 2021.
« Il y a beaucoup de chantiers que nous avons dû mettre en veilleuse ces derniers temps, mais que l’on va pouvoir redémarrer. Nous devons faire valider les programmes, sécuriser un emplacement à Toronto… Nous allons mettre en place un plan de match, mais d’abord, nous voulons savourer », sourit-elle.
Cet article a été mis à jour le samedi 7 septembre 2019, à 19h49