L’UCFO urge le ministre Clark de protéger les terres agricoles de l’Ontario

L'empiètement des terres agricoles au profit du développement résidentiel inquiètent l'Union des cultivateurs franco-ontariens (UCFO). Source: Canva

Dans un contexte d’accélération de la construction de logements, avec le projet de loi 97 qui allège la réglementation sur les terres protégées dans la province, l’Est ontarien s’inquiète de l’avenir du monde agricole. Environ 70 % des territoires des comtés unis de Prescott et Russell (CUPR) seraient des terres agricoles. Avec la crise du logement que traverse l’Ontario aujourd’hui, leur pérennité est mise au défi par de nouveaux projets résidentiels.

Dans un communiqué du 26 mai, l’Union des cultivateurs franco-ontariens (UCFO) a fait part de son inquiétude face au projet de loi 97. Déposé à l’Assemblée législative durant le mois d’avril, ce texte, s’il est adopté, offrirait la possibilité de créer des lots résidentiels dans les zones agricoles.

Dans sa missive, l’organisme de soutien des agriculteurs affirme que le projet de loi met en péril les terres agricoles de qualité de la province. Il indique aussi que la loi, une fois votée, permettra aux municipalités d’accroître l’aménagement résidentiel, notamment sur des parcelles agricoles, et ce, jusqu’à trois lots résidentiels.

L’étalement urbain, un danger pour la sécurité alimentaire

D’après l’Union des cultivateurs, « il faut préconiser la densification des espaces urbains actuels sans condamner les terres agricoles ».

« Durant les deux dernières années, l’Ontario a enregistré la variation de la valeur des terres agricoles la plus élevée au Canada. Dédier des terres agricoles à des constructions résidentielles ne fera qu’accroître la rareté de ces dernières et contribuera à une surenchère », explique la présidente de l’UCFO, Renée-Claude Goulet.

Renée-Claude Goulet est la présidente de l’Union des cultivateurs franco-ontariens. Crédit image : Ingénium

La surenchère des terres agricoles fait référence à une situation dans laquelle le prix des terres augmente de manière excessive, dépassant souvent leur valeur réelle en tant que terres cultivables. Cela se produit généralement lorsque les parcelles suscitent un intérêt élevé de la part d’investisseurs ou de promoteurs immobiliers.

Empiéter sur les terres agricoles pourrait mettre à mal la sécurité alimentaire de la province puisqu’elles sont essentielles à la production alimentaire. Leur perte réduirait l’agriculture locale et l’Ontario devrait inévitablement accroître sa dépendance aux importations alimentaires.

L’Ontario perdrait 339 acres par jour de terres agricoles

De l’avis de plusieurs observateurs, le projet de loi 97 pourrait tout aussi bien être un facteur aggravant en ce qui concerne la durabilité environnementale. Les terres agricoles fournissent des services écosystémiques précieux. Elles soutiennent la biodiversité en abritant des espèces végétales et animales, contribuent à la préservation de l’eau et des sols, et jouent un rôle dans la régulation du climat. La conversion des terres agricoles en zones urbaines peut entraîner la perte de ces services, entraînant une détérioration de l’environnement local.

Si on pousse la réflexion plus loin, dans l’Est de l’Ontario, les paysages agricoles font partie de la culture et de l’identité locale. Les communautés rurales pourraient perdre un élément important de leur patrimoine si, progressivement, ils voyaient disparaître leur campagne.

Expliqué dans le communiqué de l’UCFO, « le dernier recensement de l’agriculture indique que la superficie agricole totale de l’Ontario a diminué de 4,7 % (…) pour s’établir à 11,8 millions d’acres en 2021 ».

Détruire des terres agricoles contribue à l’insécurité alimentaire. Source : Canva

Aujourd’hui, seulement « 4,4 % du territoire de la province est considéré comme des terres agricoles exploitables ».

L’Ontario perdrait 319 acres (137 hectares) de terres agricoles par jour. Pour l’UCFO, cela équivaut à la perte d’une ferme familiale de taille moyenne tous les jours.

« En comparaison, en 2016, 175 acres (70 hectares) disparaissaient chaque jour. »

« Il est crucial de protéger les terres agricoles, notamment en encourageant l’agriculture locale et en mettant en place des politiques de préservation des terres agricoles. Cela contribuera à assurer la sécurité alimentaire, à préserver l’environnement, à soutenir l’économie locale et à maintenir le mode de vie rurale dans les régions agricoles. »

Le ministère a « clairement entendu » les agriculteurs

Le ministre Clark affirme avoir « clairement entendu les préoccupations soulevées au sujet de la préservation des terres agricoles », un objectif qu’il dit partager.

Dans une lettre adressée ce lundi à la Fédération ontarienne de l’agriculture, il affirme qu’il n’a jamais été dans l’intention de son gouvernement de vendre des lots séparés à des propriétaires non familiaux ou agricoles, ni pour ces lots d’avoir autre chose que des maisons unifamiliales (c’est-à-dire pas de multi-constructions résidentielles).

Steve Clark, ministre des Affaires municipales et du Logement. Crédit image : Jackson Ho

« Nous voulons nous assurer que nous protégeons l’agriculture » certifie-t-il, « tout en veillant à ce que tous les Ontariens, y compris les agriculteurs, puissent trouver un logement ».

Et de prolonger la date limite de commentaires sur le Registre environnemental de l’Ontario de 60 jours supplémentaires, soit d’ici le 4 août prochain. « Cela donnera au public une meilleure occasion de commenter sur les propositions et donnera à notre gouvernement plus de temps pour envisager d’autres solutions pour soutenir les familles d’agriculteurs multigénérationnelles, les terres agricoles de l’Ontario qui répond à leurs besoins et à leur budget », affirme le ministre.

Cet article a été mis à jour le lundi 29 mai à 17h45.