Les francophones saluent la nouvelle version de la Loi sur la radiodiffusion

Assurer des contenus canadiens dans les deux langues officielles est un des enjeux du projet de loi. Source: Canva

OTTAWA – Les organismes culturels francophones se disent satisfaits du plus récent projet de loi C-10 du gouvernement fédéral qui vise à soumettre les géants du web à la Loi sur la radiodiffusion. Dans la mouture proposée, les plateformes devront contribuer à la création de contenu canadien, notamment francophone, de façon formelle ou au niveau financier. Prochaines étapes cruciales : débat en comité et vote à la Chambre des communes.

Une première mouture avait été déposée en novembre 2020 par l’ancien ministre du Patrimoine Steven Guilbeault. Elle avait créé beaucoup de remous dans divers clans, avant de mourir au feuilleton.

D’entrée de jeu, le sommaire de la Loi plante l’objectif : « Favoriser la présentation aux Canadiens d’émissions canadiennes dans les deux langues officielles notamment celles créées et produites par les minorités francophones et anglophones du Canada. »

La nouvelle mouture distingue en particulier le contenu francophone et celui en français en provenance des communautés francophones hors Québec.

« Le premier projet de loi en novembre 2020 ne faisait aucune place aux francophones hors Québec. Il n’y avait pas de mention spécifique pour nous sauf une clause qui faisait mention au rôle de Radio-Canada. Alors c’est un gain aujourd’hui », soutient Carol Ann Pilon, directrice générale de l’Alliance des producteurs francophones du Canada (APFC).

À la Fédération culturelle canadienne-française (FCCF), on se dit satisfait des amendements apportés sur la table par rapport aux autres variantes de la Loi.

« On voulait que nos besoins et nos intérêts soient pris en compte et c’est clair dans un article de la Loi qu’il faut tenir compte des communautés linguistiques et ça, c’est majeur. Dans une autre section de la Loi, il est question de la mission et des pouvoirs du Conseil de la radiodiffusion et des télécommunications canadiennes (CRTC). Il va désormais devoir tenir compte des communautés linguistiques et, pour nous, c’est une grande avancée », réagit Marie-Christine Morin, la directrice générale de la FCCF.

L’industrie francophone se dit satisfaite du nouveau projet de loi C-10 qui vise à réglementer certains des géants du web Source : Canva

Le CRTC devra par exemple consulter les communautés francophones minoritaires « lorsqu’il prend toute décision susceptible d’avoir sur elles un effet préjudiciable », peut-on lire.

Il était trop facile pour les artisans du milieu de se voir oubliés ou ignorés dans la présente loi, signale Mme Morin.

« La nouvelle loi est fondamentale à la capacité de se voir, s’entendre et se créer en français et d’accéder à ce contenu. C’est toute la chaîne, de la création à la production jusqu’au bout, qui rejoint les communautés dans toutes les plateformes où on accède à ces contenus. »

Un besoin pressant

La Loi n’a pas subi de changements depuis 1991, mais elle doit toujours subir l’épreuve parlementaire avec des libéraux minoritaires au Parlement.

« Ça fait trop longtemps qu’on l’attend. Ça presse plus que jamais. Les gens se désabonnent de la télé, donc il faut que les multinationales contribuent au contenu francophone. Les distributeurs perdent leurs abonnés, et les diffuseurs leurs annonceurs au profit des entreprises en ligne, mais celles-ci ne contribuent pas à la (production) du contenu francophone. Il faut absolument agir », presse Mme Pilon.

Le ministre du Patrimoine Pablo Rodriguez se fait clair : ce projet de loi ne touchera pas les utilisateurs. Pour ce qui est du contenu francophone, le CRTC devra s’asseoir avec chacune des plateformes pour déterminer l’étendue de la contribution de chacun.

« Ça sera vraiment du cas par cas », a dit Pablo Rodriguez.

Le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez.
Le ministre du Patrimoine canadien, Pablo Rodriguez. Source : Wikicommons

Pour Mme Pilon, il faut s’assurer que les producteurs aient leur mot à dire s’ils font affaire avec les gros joueurs.

« Les compagnies américaines qui font de la production ici viennent tourner généralement avec leurs équipes créatives, plutôt que d’embaucher des gens d’ici. S’ils viennent faire affaires au pays, c’est aussi important que les pratiques contractuelles entre les producteurs indépendants et les entreprises en ligne soient encadrées. »

La prochaine étape? « Il va falloir aller dans le détail et creuser pour s’assurer que les libellés sont bien conformes aux intentions qu’on avait », conclut Mme Morin.

Le gouvernement Trudeau a ainsi respecté sa promesse de déposer cette réforme dans les 100 premiers jours de son mandat.