Bilinguisme officiel à Ottawa : un projet de loi se précise

Le représentant emblématique du Mouvement, Jacques de Courville Nicol. Archives

OTTAWA – La capitale du Canada, officiellement bilingue en 2017? L’objectif tient toujours. Les groupes francophones planchent actuellement sur un projet de loi municipal dans ce sens.

SÉBASTIEN PIERROZ
spierroz@tfo.org | @SebPierroz

Objectif? L’adoption par la Ville d’Ottawa d’une résolution demandant à la province de l’Ontario de clarifier le statut linguistique de la capitale du Canada. Le tout au plus tard pour 2017, date du 150e anniversaire de la Confédération canadienne.

Dans les lois, c’est effectivement à la province qu’appartient la décision de valider le bilinguisme officiel de la Ville d’Ottawa sur le modèle de Moncton. Mais la municipalité doit en faire la demande. En 2005, Queen’s Park avait seulement enjoint la Ville d’Ottawa à adopter… une simple politique bilingue.

Un comité de travail réunissant notamment le Mouvement pour une capitale du Canada officiellement bilingue de Jacques de Courville Nicol, l’ACFO d’Ottawa et Dialogue Canada tente de s’entendre sur le contenu d’un tel règlement présenté au conseil municipal.

« Ça avance progressivement », fait part Gilles Levasseur, membre du comité. « Nous sommes en train de définir la notion de ville bilingue, voir comment ça va se mettre en œuvre, et quelles sont les modalités techniques et d’exécution. »

Pour M. de Courville Nicol, il s’agit avant tout d’un texte juridique qui « inclut le règlement ».

L’argument pour les groupes reste toujours le même : le Canada, théoriquement bilingue, ne peut se passer d’une capitale « officiellement » bilingue.

Et l’idée, bien que relancée dès 2012 par les États généraux de la francophonie d’Ottawa, n’est pas nouvelle selon M. de Courville Nicol, qui cite l’année 1970 comme démarrage des revendications. Cette année-là, la Commission d’enquête sur le bilinguisme et le biculturalisme (Laurendeau-Dunton) avait jeté les bases d’un projet du genre.

Mésentente

Force est de constater que les groupes francophones ne parlent pas tous le même langage à la table de discussion. « On est à 90% d’accord, mais il y a quelques divergences », souligne prudemment M. Levasseur.

« Il y a des opinions différentes, pas sur le but, mais la façon de faire », précise la directrice générale de l’ACFO Ottawa, Isabelle N. Miron. « Certains sont en effet partisans d’un projet de loi, d’autres d’une approche fédérale. »

M. de Courville Nicol affirme qu’il y avait « un différend » avec Dialogue Canada, mais que celui-ci est maintenant « réglé ». L’activiste, certes favorable à un règlement municipal, mise effectivement sur un appui du gouvernement fédéral.

« C’est important que les trois paliers travaillent en collaboration, et le fédéral peut nous apporter une aide financière pour réaliser le bilinguisme officiel à Ottawa. »

Libéral non dissimulé, M. de Courville Nicol, dont le mouvement a été plutôt discret durant la campagne électorale, n’y va pas par quatre chemins : « Le Parti libéral, c’est le parti du bilinguisme officiel, nous attendons beaucoup de Justin Trudeau peut nous aider sur le sujet. On savait avec Harper que c’était impossible (la désignation bilingue), et qu’à l’extérieur du Québec, le NPD s’affiche comme un parti anglophone. »

Joint par #ONfr, Tréva Cousineau, présidente de Dialogue Canada, n’a pas retourné nos appels.

Défi

Reste que faire passer une résolution municipale faisant la promotion du bilinguisme officiel s’avère tout un défi. Farouchement opposé à l’idée, le maire Jim Watson n’a pas l’intention de modifier sa position d’un iota.

« Qu’est-ce que c’est le bilinguisme officiel? Je pose la question, car nous fournissons déjà des services dans les deux langues officielles (…) Notre version du bilinguisme marche », a-t-il rappelé lors d’une entrevue télévisée pour #ONfr.

Le Lobbying auprès des élus effectué par le Mouvement les convaincra-t-il? Si des dizaines de groupes francophones appuient officiellement la désignation bilingue de la municipalité d’Ottawa, les soutiens publics se font rares à la table du conseil municipal. Les conseillers Jeff Leiper et Tobi Nussbaum avaient récemment apporté timidement leur soutien au projet.

Le conseiller municipal de Rideau-Vanier, Mathieu Fleury, reste l’un des rares à être grosso modo en faveur de l’idée. Même si le projet est finalisé, la route pour celui-ci est encore bien longue, affirme-t-il. « Les francophones vont devoir présenter le projet de façon publique, puis suite à cela obtenir des appuis de groupes anglophones, par exemple le collège Algonquin ou encore l’Université Carleton. »

Et de conclure : « C’est la meilleure manière pour que le projet obtienne l’accord des conseillers. »