Ces femmes franco-ontariennes bâtisseuses à travers les siècles
Pour la Journée internationale des droits des femmes, ONFR+ vous propose une liste non exhaustive des femmes qui ont participé à bâtir l’Ontario français, et assurer la renommée des Franco-Ontariens au-delà de la province.
Elisabeth Bruyère, la mission de soigner les Franco-Ontariens
Lorsqu’elle arrive à Bytowne en 1845, à seulement 26 ans, Elisabeth Bruyère a pour mission d’y établir une maison. Elle fonde la congrégation religieuse des Soeurs de la Charité d’Ottawa, dédiée à l’éducation des jeunes et l’assistance aux malades.
En 1847, elle réalise son premier fait d’arme, en soignant des Irlandais atteints du typhus. Sa capacité à ne pas contracter les maladies, alimente les rumeurs sur sa possible bénédiction. Elle est d’ailleurs reconnue vénérable par l’Église catholique.
Elle dirige la communauté des Sœurs de la Charité d’Ottawa jusqu’à sa mort en 1876.
Marie-Rose Turcot, l’une des premières journalistes
Il n’est pas fréquent de trouver des femmes journalistes au début du 20e siècle, un métier – comme beaucoup – alors réservé aux hommes. Marie-Rose Turcot est une exception. Passionnée pour la littérature, elle est responsable de la « page féminine » du journal Le Droit de 1934 à 1950.
Marie-Rose Turcot est aussi une auteure, rédactrice de plusieurs romans et contes, à commencer par La Brodeuse de dragon, publié en 1920 puis l’année suivante, Nestor et Picolo. Tous les deux ont été récompensés au concours de la Société Saint-Jean-Baptiste de Montréal.
Florence Castonguay, pionnière dans le milieu culturel
Née à la fin du 19e siècle à Ottawa, Florence Castonguay marque de son empreinte le théâtre franco-ontarien, non seulement en tant que comédienne célèbre, mais aussi à titre de metteur en scène de la Corporation Le Caveau.
Florence Castonguay attend 1935 pour connaître la consécration. Cette même année, elle joue le rôle principal dans L’innocente d’Henri René Lenormand. La pièce est un succès et remporte le trophée Bessborough du Gouverneur Général au Dominion Drama Festival.
À 50 ans, la comédienne joue un second grand rôle, celui de Maria Chapdelaine. Trois récompenses accompagnent alors sa performance : meilleure comédienne en français, meilleure mise en scène et meilleure pièce canadienne-française. Invitée à Londres et Paris, Florence Castonguay choisit tout de même de poursuivre sa carrière dans l’Ontario français.
Béatrice et Diane Desloges, le combat contre le Règlement XVII
Difficile de ne pas parler des premières luttes franco-ontariennes sans y associer les noms de Béatrice et Diane Desloges. Symboles de la lutte des Franco-ontariens pour l’enseignement en français, les deux sœurs surnommées les « gardiennes de Guigues » jouent un rôle primordial contre le Règlement XVII.
Enseignantes au sein de l’École Guigues d’Ottawa, Béatrice et Diane Desloges perdent d’abord leur salaire et leur certificat d’enseignement après la décision du gouvernement d’interdire par ledit règlement l’usage de la langue française après la deuxième année d’enseignement dans les écoles de l’Ontario. Elles continuent cependant d’enseigner bénévolement, et dans la clandestinité.
Bien qu’abrogé en 1927 grâce entre autres à la persévérance des sœurs Desloges, le Règlement XVII a mené à l’époque et longtemps après à l’assimilation de nombreux jeunes de langue française.
Almanda Walker-Marchand, une féministe engagée
Originaire de la Ville de Québec et arrivée à Ottawa en 1890, Almanda Walker-Marchand voit son implication prendre de l’importance au commencement de la Première Guerre mondiale. Elle met alors en place le groupe des Canadiennes françaises pour recueillir des fonds afin d’équiper un navire-hôpital à l’intention des soldats blessés. Ce groupe change ensuite de nom et devient la Fédération des femmes canadiennes-françaises.
Grande opposante au Règlement XVII, Almanda Walker-Marchand reste 32 années à la tête de Fédération. L’organisme ouvre des branches dans plusieurs régions du pays, et comptabilise plusieurs milliers de membres.
Jeannine Séguin, la lutte pour l’indépendance des écoles francophones
Originaire d’Alexandria dans l’Est ontarien, Jeannine Séguin occupe tour à tour les fonctions de présidente l’Association des enseignantes et des enseignants franco-ontariens (AEFO), de l’Association canadienne-française de l’Ontario (ACFO) et de la Fédération des francophones hors Québec (FFHQ).
Cette enseignante de formation bâtit sa légende dans les années 70, alors que les crises scolaires se multiplient dans l’Ontario français. De 1973 à 1980, Jeannine Séguin est directrice de l’école secondaire Saint-Laurent, une école bilingue laquelle devient sous sa direction l’École secondaire La Citadelle, un établissement de langue française. En 1979, elle accepte bénévolement d’être la directrice de l’École de la résistance à Penetanguishene lors de la crise scolaire.
Il faut attendre l’arrêt Mahé en 1990 pour consacrer la création des conseils scolaires francophones en contexte minoritaire au Canada.
Les Quintuplées Dionne, célébrités malgré elles
Nées à Corbeil, près de North Bay, en 1934, les « jumelles Dionne », qui sont en fait cinq (Annette, Cécile, Émilie, Marie et Yvonne) passent rapidement à la postérité. Peu après leur naissance, une loi les sépare de leur famille, et crée « Quintland », un parc d’attractions autour de ce « phénomène canadien ». Pendant 10 ans, les quintuplées mènent une vie où s’enchaînent les films et publicités.
En 2001, le gouvernement de Mike Harris offre ses excuses, et des compensations financières d’un montant de quatre millions de dollars aux deux survivantes, Cécile et Annette. 20 ans plus tard, les deux sœurs sont toujours en vie.
Gisèle Lalonde, symbole éternel de S.O.S. Montfort
Lorsqu’elle accède à une reconnaissance pancandienne en 1997 à titre de porte-parole de S.O.S. Montfort, Gisèle Lalonde, 64 ans alors, possède déjà un CV impressionnant : enseignante, ancienne présidente de l’Association française des conseils scolaires de l’Ontario, puis mairesse de la Cité de Vanier.
Le 22 mars 1997, Gisèle Lalonde s’adresse devant une foule de 10 000 francophones opposée à la fermeture de l’Hôpital Montfort, un projet envisagé par le gouvernement conservateur de Mike Harris. En 2001, la victoire de l’hôpital en Cour d’appel conclut quatre ans d’une saga juridique sans précédent dans l’Ontario français… et fait passer Gisèle Lalonde au titre de légende franco-ontarienne.
Michaëlle Jean, première gouverneure générale noire
Originaire d’Haïti, et Franco-Ontarienne d’adoption, Michaëlle est d’abord journaliste de 1988 à 2005. Grâce à sa nomination au poste de 27e gouverneure générale du Canada le 27 septembre 2005, elle entre dans l’histoire, en devenant pendant cinq ans la première femme noire à occuper un tel poste. Par la suite en 2014, elle est nommée secrétaire générale de l’Organisation internationale de la Francophonie (OIF).
C’est sous son mandat que l’Ontario a rejoint officiellement l’organisme international à titre de membre observateur en 2016. Dans ses discours, Michaëlle Jean se réfère souvent à son identité franco-ontarienne.
Bernadette Clément, première mairesse noire et francophone
Le 22 octobre 2018, Bernadette Clément marque l’histoire franco-ontarienne. La directrice générale de la clinique juridique de Stormont, Dundas et Glengarry devient la mairesse de Cornwall, et par la même occasion la première femme francophone issue d’une minorité visible à prendre la tête d’une municipalité en Ontario.
Avant elle, beaucoup de politiciens noirs avaient aussi ouvert la voie. En 1964, Firmin Monestine, immigrant d’origine haïtienne établi à Mattawa, devenait le premier maire noir au Canada. Le même jour de l’élection de Mme Clément, la francophone Arielle Kayabaga était élue conseillère municipale à London.
Article écrit avec des informations recueillies à l’aide du blogue Les femmes de la route 11, le Réseau du Patrimoine franco-ontarien (RPFO), et l’historien Diego Elizondo.