Coronavirus : Hamilton en état d’alerte, des lacunes dans le bilinguisme
HAMILTON – Alors que la ville a enregistré ses deux premiers cas de COVID-19, les principaux acteurs en santé de la région prennent très au sérieux le risque de pandémie, tout en appelant au calme et aux gestes simples de prévention. Mais des voix s’élèvent pour que l’information soit plus transparente et circule dans les deux langues officielles.
Le compteur du ministère de la Santé de l’Ontario indique désormais 59 cas positifs en province. L’épidémie de COVID-19 qui touche Toronto, Ottawa et Sudbury, est devenue une réalité dans la ville de l’acier où l’on recense désormais deux cas. Au cours des points de presse quotidiens, le maire et les autorités de santé ont précisé cette semaine qu’il s’agissait d’une médecin oncologue et d’un homme de 52 ans revenant d’un voyage d’affaires à New York.
« Le risque de contracter le virus est relativement faible », tempère tout de même le service de santé publique de Hamilton. L’agence de santé locale met régulièrement à jour, sur son site internet, le statut des 78 cas testés ou en cours de test, dont la près de la moitié se sont avérés négatifs jusqu’ici.
Dans sa communication, le service de santé publique de Hamilton rappelle aussi les gestes essentiels pour se prémunir du virus : se laver les mains, éviter tout contact avec des personnes malades, éternuer dans sa manche, éviter de se toucher les yeux et le nez, désinfecter les surfaces touchées et se faire vacciner contre la grippe.
Des messages de santé publique unilingues
La Ville n’informe cependant que le public anglophone et renvoie le public désirant de l’information en français à des notes multilingues émanant du ministère de la Santé. Un état de fait que déplore Marcel Castonguay, le directeur général du Centre de santé communautaire Hamilton-Niagara (CSCHN), un acteur majeur en santé en français dans la région.
« Ça m’inquiète car toute communication affichée en anglais devrait l’être en français, surtout dans une situation comme celle-là », dit-il.
« Le problème c’est que ces agences de santé publique ne sont pas assujetties à la Loi sur les services en français car ce sont des créations des municipalités. Ça fait des années qu’on le revendique. Ils disent qu’ils font des efforts pour desservir les communautés mais l’information arrive toujours deux-trois jours plus tard. »
La ville se défend : « Nous avons adopté la ligne du ministère de la Santé de l’Ontario qui apporte une réponse coordonnée à l’échelle de la province et nous nous sommes référés à leurs fiches d’information, traduites en plusieurs langues. »
Son service de communication indique par ailleurs que des services de traduction par téléphone sont disponibles du lundi au vendredi au 905-546-2489.
Ce manque d’information dans les deux langues officielles génère régulièrement de mauvaises surprises chez les patients mais, cette fois, s’agissant d’une épidémie, l’accès, la rapidité et la précision de l’information sont capitaux dans la lutte contre la propagation.
« On a besoin d’une bonne source d’information et d’une bonne communication », plaide le directeur général du CSCHN, qui invite les gens à porter plainte auprès du Commissariat aux services en français.
Un processus de planification ralenti
Hamilton a lancé un Plan de préparation aux situations d’urgence incluant tous les services paramédicaux, les hôpitaux, les fournisseurs de soins primaires, le ministère de la Santé de l’Ontario et les établissements universitaires. Néanmoins, le rôle des organismes francophones est encore assez flou.
« Nous examinons et évaluons toujours tous les partenaires communautaires qui doivent être mobilisés en ce moment, précise l’agente des communications », Jasmine Graham.
Or, le retard pris par certaines organisations ralentit la réponse des soins primaires à l’épidémie. « Beaucoup de services réalisent soudainement que le virus est à la porte », constate M. Castonguay.
« Ceux qui n’avaient pas encore entamé de processus de planification se retrouvent dans l’urgence de prendre des décisions. »
« Nous, on a commencé il y a plusieurs semaines à prendre des mesures en interne, pour la santé de notre personnel par exemple, mais les hôpitaux et les « santé publique » de la région n’avaient encore pris des décisions desquelles on dépendaient pour aller plus loin », poursuit le directeur qui s’attend à une semaine prochaine chargée.
Pas de troussses de dépistage avant lundi
Le Centre de santé Hamilton-Niagara ne dispose pas encore de trousses pour tester sur place et redirige les patients francophones ayant des symptômes vers les services d’urgence.
« On devrait être en mesure de tester notre personnel et nos patients qui participent à des groupes pour aînés ou pour jeunes à partir de lundi », escompte Marcel Castonguay, « mais on a aucune idée du stock qu’on va avoir. L’agence de santé publique n’a pas encore tous les masques et les protections en stock. On espère être capable de mettre la main sur les outils dont on a besoin. »
De son côté, l’Entité 2 assure contribuer à la diffusion des messages en français émis par les autorités, notamment ceux du ministère de la Santé.
« On veut s’assurer que la population francophone ait accès aux informations et recommandations en français sur la manière de réduire l’exposition au virus et prévenir la propagation des germes », détaille son directeur général, Sébastien Skrobos.
Il indique toutefois qu’à l’échelle locale le champ d’application des Entités n’inclut pas les agences de santé publique.
Une consultation menée jusqu’au 31 mars sur la modernisation de la santé publique pourrait cependant apporter des améliorations au niveau régional.
« Nous avons notamment recommandé de mettre en place une relation formelle entre Santé publique Ontario et les bureaux régionaux de santé publique afin que le rôle de conseil et d’appui des Entités soit élargi à ces agences », souligne M. Skrobos.
Francofest maintenu
Comme dans l’ensemble de la province, les écoles de Hamilton seront fermées du 14 mars au 6 avril. Quant au Francofest, qui rassemble chaque printemps francophones et francophiles dans le parc Gage pour deux jours de concerts et d’animations, il est maintenu, indiquait hier Lisa Breton, la directrice générale du Centre francophone Hamilton.
L’événement doit avoir lieu les 19 et 20 juin.