Deux rapports recommandent des changements dans la gouvernance de La Laurentienne

L'Université Laurentienne à Sudbury
L'Université Laurentienne à Sudbury. Source: Facebook

SUDBURY – Alors que l’Université Laurentienne demeure toujours sous la protection de la Loi sur les arrangements avec les créanciers des compagnies, les conclusions de deux rapports rendus publics ce mercredi apportent un éclairage nouveau sur la gouvernance et la transparence de l’institution.

Des experts indépendants incitent l’Université Laurentienne à revoir, au cours des six prochains mois, sa gouvernance et à améliorer l’efficacité de ses deux organes directeurs : le Sénat et le conseil des gouverneurs. La responsabilité formelle de la surveillance de l’Université devrait incomber au conseil des gouverneurs, mais chaque organe directeur devrait disposer d’un « mandat et d’un ensemble de responsabilités clairs », analysent les auteurs qui évoquent le risque d’ambiguïté et de chevauchement des prérogatives.

En effet, au cours de leurs investigations, ils ont identifié que le Conseil remettait rarement en question les recommandations de la direction et du Sénat, bien que le Sénat ne connaisse pas toujours les répercussions financières de ses décisions.

« Plusieurs membres ont noté que le Conseil vote souvent en bloc en limitant au minimum les questions et les débats, de sorte que la présidente ou le président exerce un contrôle disproportionné lors des réunions du Conseil », est-il indiqué dans le document. « De surcroît, la compréhension des rôles et des responsabilités de la présidente ou du président, des membres et de la direction semble floue pour certains, comme en témoignent la mauvaise gestion financière et la mauvaise surveillance. »

Parmi les 37 recommandations incluses dans ce premier rapport, il est aussi question de réduire la taille des deux organes à 18 membres pour le conseil, 50 pour le sénat, de mettre en place des mesures de reddition de comptes clairs et d’établir un secrétariat professionnel indépendant capable d’appuyer le conseil.

Transparence, compétences et responsabilités claires

Les auteurs épinglent en outre la nécessité de favoriser la transparence quant à la nature de l’information qui doit être partagée publiquement. On se souvient que les dirigeants de l’institution avaient fortement résisté à la divulgation de documents sensibles réclamés par la vérificatrice générale mais aussi de députés provinciaux souhaitant faire la lumière sur ses déboires financiers qui ont mené à d’importantes coupures de programme.

Par ailleurs, les auditions menées auprès des membres du conseil et du Sénat ont mis en exergue une certaine inquiétude de ne pas disposer de l’information appropriée pour prendre des décisions, ni d’une combinaison appropriée de compétences pour assurer une orientation stratégique efficace. Plusieurs témoignages font état d’une « coupure » entre les deux instances de décision.

Des membres du conseil et du sénat de l’université ont témoigné de failles affectant la gouvernance. Extrait du rapport

Un second rapport, dit opérationnel, soulève quant à lui qu’un « important programme de transformation s’impose pour permettre à l’institution de respecter les normes de référence applicables aux universités modernes ». Pour relever ce défi, l’université doit notamment redéfinir son plan stratégique, améliorer sa performance financière et remédier à ses lacunes numériques.

Aucune recommandation n’aborde le mandat trilingue de l’université, ni la nécessité de le conserver ou l’abandonner. Le document met toutefois en avant un point fort : le « caractère unique dans le Nord de l’Ontario que confère son mandat triculturel ».

38 millions de dollars de coûts annuels en moins

Depuis qu’elle a entrepris sa restructuration en février 2021, les auteurs de ce second rapport estiment que l’Université réduira ses coûts d’environ 38 millions de dollars annuellement.

« Nous sommes convaincus que la mise en œuvre de ces recommandations permettra à l’Université d’effectuer les changements nécessaires qui instaureront les cadres appropriés de gouvernance et de fonctionnement pour répondre aux besoins des futurs étudiants », a déclaré l’agent en chef de la restructuration, M. Lou Pagnutti.

« Même si des défis demeureront dans cette transformation ambitieuse à long terme, l’Université mettra l’accent sur ce qu’il faut faire pour devenir le meilleur environnement possible d’apprentissage pour la population étudiante », ajoute-t-il qualifiant ces recommandations de « feuille de route vers la réussite ».

Un rapport partisan, réagit le syndicat des professeurs

L’Association des professeurs de l’Université Laurentienne (APPUL) a manifesté sa déception face « au ton du rapport » et son « parti pris » en faveur de l’administration universitaire.

Selon elle, les documents occultent « la question de savoir comment les décisions du Sénat pourraient être appliquées lorsque l’administration les ignore, comme cela s’est trop souvent produit dans le passé. Au lieu de clarifier et d’élargir le rôle et les pouvoirs du Sénat, le rapport va dans l’autre sens ».

« Par exemple, les membres du corps professoral qui siègent au Sénat sont élus par leurs pairs. Toute évaluation de leur travail doit être faite par leurs pairs et non par un comité de nomination », estime le syndicat, également critique sur les solutions apportées concernant le manque de transparence du Conseil des gouverneurs.

« L’ajout d’une représentation de l’APPUL au Conseil serait un remède extrêmement efficace, ce que le rapport n’envisage même pas. Ce rapport est extrêmement inquiétant car il mine davantage la gouvernance collégiale à l’Université Laurentienne. Le manque de transparence et de collégialité est ce qui a mené à la situation actuelle. »