Éducation : de fortes attentes sur un enjeu jusqu’ici négligé


Pénurie d’enseignants, santé mentale des élèves, écoles vieillissantes, taille des classes… Les enjeux éducatifs n’ont pas encore trouvé leur place qu’ils mériteraient dans la campagne électorale, selon plusieurs acteurs du milieu, qui attendent des engagements clairs des partis politiques.
« Tarifs, tarifs, tarifs… On a entendu que ça depuis le début de la campagne », se désespère Paul Baril, président de Parents partenaires en éducation. Avec la suspension durant un mois de la menace de droits de douane américains, le porte-parole de parents d’élèves espère que les chefs vont enfin se tourner vers le dossier de l’éducation.
« On veut que le prochain gouvernement accorde la priorité à l’éducation de langue française », insiste-t-il. Nos écoles sont vieillissantes et manquent de personnel. Des parents nous disent qu’ils vont inscrire leurs enfants dans des écoles anglophones, car elles ont plus de personnel qualifié et de meilleures infrastructures. Il faut s’assurer d’avoir des écoles équivalentes avec du personnel à l’intérieur. Sinon, nos enfants ne pourront pas aller de l’avant. »
La première semaine de campagne a gravité autour de la question des tarifs douaniers américains, avant de bifurquer sur les transports, notamment sur la gratuité de l’autoroute 407 et le projet conservateur de tunnel sous celle de la 401. L’éducation a été très peu abordée. Seul le Nouveau Parti démocratique a promis de consacrer 830 millions de dollars de plus par année à la réparation et à l’entretien des écoles.

« L’éducation est un enjeu important qui dépasse le quotidien des écoles. C’est l’avenir de notre société, », clame Gabrielle Lemieux, présidente de l’Association des enseignantes et enseignants franco-ontariens (AEFO).
« On veut une reconnaissance de l’école publique en tant que pilier de nos communautés et un engagement que le prochain gouvernement va vraiment s’en inquiéter et investir. »
Mme Lemieux regrette que le rapport sur la pénurie des enseignants francophones ait été mis sur la glace. « Avec le nombre considérable de retraites ces prochaines années, si on ne résout pas la crise, maintenant, ça ne fera que s’aggraver. »
Elle s’alarme des départs de collègues chevronnés en milieu de carrière, faute de revalorisation du métier. « On nous demande d’en faire toujours plus avec toujours moins de ressources, dans des classes de 35-40 élèves à tous les niveaux… C’est inacceptable. »

« L’éducation est au septième ou neuvième rang des sujets discutés, c’est extrêmement décevant. Je ne peux pas croire que les politiciens ne mettent pas davantage d’accent là-dessus », réagit pour sa part Isabelle Girard, directrice générale de l’Association des conseils scolaires des écoles publiques de l’Ontario (ACÉPO).
Elle voudrait que les candidats s’emparent de la question de la formation des enseignants qu’il faudrait ramener de deux ans à un an dans les facultés d’éducation de l’Ontario, afin de contrer la pénurie de personnel. Or, aucun chef de parti n’en parle.
« Avec le même financement, on doublerait le nombre d’enseignants qualifiés chaque année. Ce serait une belle façon fiscalement responsable de contrer la pénurie », est-elle convaincue.
Mme Girard pointe aussi les besoins en immobilisation : « Nos conseils sont victimes de leurs succès et plusieurs écoles sont à pleine capacité, sans compter que certaines régions ne sont pas desservies par des écoles de langue française. »

De son côté, la présidente de l’AEFO attire l’attention sur un autre problème : la montée de la violence dans les établissements. « C’est ce dont mes collègues me parlent le plus, ces derniers temps. Il faudra s’asseoir ensemble avec les syndicats, les conseils scolaires et le prochain gouvernement pour contrer ce phénomène. »
« On veut un soutien accru à nos écoles et un engagement formel des partis, conclut M. Baril, mettant le doigt sur d’autres questions comme celle du financement des transports scolaires . Mais certains n’ont même pas encore sorti leur plateforme électorale ou n’ont pas encore investi tous leurs candidats. On doit pouvoir voter le 27 février en connaissance de cause. »