L’ensemble numismatique de Pierre Labelle autour des éléphants

Pierre Labelle collectionne les pièces et les billets de banque à l'effigie des éléphants. Crédit image: Lila Mouch

[UN FRANCO, UNE PASSION] 

ORLÉANS – Chaque semaine durant l’été, ONFR+ vous présente un nouvel épisode d’Un Franco, une passion. Que ce soit une collection ou un véritable engouement, découvrez la passion hors du commun qui habite un Franco-Ontarien ou une Franco-Ontarienne, du Nord au Sud et d’Est en Ouest. Pour cette dernière semaine, nous retournons à Orléans à la rencontre de Pierre Labelle.

S’il y a bien une collection qui existe depuis des millénaires, c’est bien celle des monnaies. La monnaie se collectionne depuis le début des unités de compte, soit près de 2 500 ans, même s’il est difficile de dire avec précision, l’invention de cette dernière. La collection de billets et de pièces, telle que nous la connaissons aujourd’hui, aurait vu le jour à la fin du 17e siècle.

Pierre Labelle collectionne donc les monnaies, mais attention, pas n’importe quelle monnaie. Son petit truc, c’est les éléphants. À savoir s’il est passionné par les éléphants ou la monnaie, nous dirions les deux et bien plus encore.

Nous sommes le 12 août, lorsque nous partons à la rencontre de Pierre Labelle et c’est la journée mondiale des éléphants… le hasard fait bien les choses.

Tout commence en Afrique

Quand nous retrouvons M. Labelle, chez lui, à Orléans, nous sommes invités à découvrir, d’abord, son salon, décoré d’objets d’Afrique. Des œuvres d’art et des statues retraçant certains de ses voyages. La musique qui se joue est, elle aussi, parsemée de rythmes africains.

« Je joue du djembé depuis près de 35 ans et d’ailleurs j’en collectionne quatre », nous dit-il alors que nous nous installons dans son jardin.

Ce jeune retraité a travaillé et vécu dans plusieurs pays d’Afrique. Là-bas, il s’est abreuvé de la culture, mais « sans jamais voir d’éléphant », dit-il avec amusement. En 2009, il finira par y retourner et cette fois-ci pour voir les éléphants.

« Je me suis vraiment intéressé à ces animaux en Afrique et à leur avenir. » Sa collection a commencé en 2006, mais depuis, n’a fait qu’évoluer, tout comme son intérêt pour l’animal.

La genèse d’une très grande collection

« J’ai reçu en cadeau un cartable de pièces de collection, et toutes, avaient un ou plusieurs éléphants gravés dessus. »

Un cadeau presque facile pour cet ancien enseignant, passionné d’Afrique, mais aussi « d’histoire, de géographie et de culture générale ».

Nous explorons ce classeur, particulièrement lourd, et pour cause il y a beaucoup de pièces rangées minutieusement dans celui-ci.

« Voilà une pièce du Danemark, avec l’éléphant, vous le voyez? », demande-t-il. Il nous tourne les pages du classeur en nous montrant un petit éléphant ici et là, se cachant sur le revers d’une pièce de l’Angola, de l’Algérie ou de la Mauritanie. Il s’arrête sur une drôle de pièce, visiblement ancienne, et nous dit : « puis celle-ci date d’avant Jésus-Christ… 187 à 175 avant Jésus-Christ ».

Impassible devant notre béatitude, il reprend : « Ici cette pièce est thaïlandaise, elle a 200 ans, puis celle-ci est afghane, environ l’an 1000. »

« Mon intérêt a commencé après avoir reçu ce premier classeur, puis évidemment avec Ebay, j’ai trouvé d’autres pièces et j’ai fait grandir cette collection. »

elephant : les pièces de collection
Pierre Labelle possède environ 500 pièces de monnaie. Crédit image : Lila Mouch

Toutes ses pièces sont des vraies et ont sans exception, un éléphant gravé dessus. En même temps, cette passion s’est tournée vers les billets de banque. « Les pièces avec un éléphant, évidemment, je n’ai pas tout, mais ma collection de billets, je l’ai étoffé et elle est quasi complète. »

« C’est un passe-temps qui n’a pas d’échéancier, c’est toujours on the go » – Pierre Labelle.

Au fur et à mesure de notre exploration, nous nous mettons à jouer le jeu et à chercher par nous même où se trouve l’éléphant, sur le recto, le verso ou dans le filigrane? Mais pourquoi y a-t-il des éléphants?

Le collectionneur nous explique que l’une des raisons est que l’éléphant fait partie de ce qu’on appelle les cinq grands : l’éléphant, le léopard, le rhinocéros, le lion et le buffle. Ce sont les animaux de la savane.

« L’Algérie est l’un des rares pays, où il y a encore des éléphants sur leur monnaie, toujours en circulation. »

Pierre Labelle possède aujourd’hui près de 500 pièces de monnaie, 700 billets dans sa collection et 2000 timbres dont le plus vieux date de 1892. « En passant, j’ai aussi une centaine d’étiquettes de bouteilles d’alcools avec des éléphants », avoue-t-il.

éléphant sur un timbre de poste
Des timbres du monde entier. Crédit image : Lila Mouch

Pierre Labelle est billetophile

Dans son immense collection de billets, le passionné nous explique qu’en cherchant des éléphants, il s’est rendu compte que dans plus de la moitié de sa collection, en plus de l’éléphant, il y avait très souvent un rhinocéros sur le billet.

« Quand je suis dans le cartable et que je feuillette, je travaille dessus et j’oublie tout » – Pierre Labelle

Nous avons droit à une réelle présentation, presque un cours particulier. Avec M. Labelle comme professeur, nous passons de longues minutes à scruter et contempler ses raretés. « Les billets du Portugal, de l’Allemagne, mais aussi de la France ont des éléphants », nous apprend-il, « alors, vous le voyez l’éléphant? », nous demande-t-il, en nous montrant un vieux billet de franc.

Un éléphant dur le billet de 50 francs

« C’est sûr que je découvre des choses », admet-il, « puis ça me fait faire de la recherche ».

Pierre Labelle aime l’histoire autour des billets, mais aussi l’Histoire avec un grand H. Dans sa recherche de billets et de monnaies, le collectionneur s’est renseigné sur l’hyperinflation qu’il y a eu au Zimbabwe. « Pendant les années 2000 à 2010, ils ont imprimé beaucoup d’argent », informe M. Labelle. L’argent ne valait plus rien au Zimbabwe. Alors, le pays a dû imprimer un billet de 100 000 milliards de dollars zimbabwéen.

100.000.000.000.000 de dollars zimbabwéen.
Cent mille milliards de dollars est la plus haute valeur numérique jamais émise sur un billet. Gracieuseté

Ce billet, unique, est aujourd’hui entre les mains de Pierre Labelle. « Il n’y a pas d’éléphant dessus, mais c’est un billet important dans l’histoire, même s’il n’a aucune valeur. »

Il reprend : « C’est la plus grosse somme au monde imprimée sur un billet de banque. »

De véritables œuvres d’art

Pour le passionné, les billets sont des œuvres d’art. En effet, lorsqu’on regarde attentivement, ce sont de véritables histoires qui sont racontées sur les monnaies.

Des histoires parfois politiques, comme celui de l’Afrique du Sud avec un Nelson Mandela dessiné post-apartheid. Des billets représentant des moments de l’histoire, « regardez ce billet du Népal », nous interpelle M. Labelle, « ce temple avec l’éléphant, n’existe plus, il a été détruit lors du tremblement de terre en 2015 ».

éléphants sur les billets de l'Algérie
Plusieurs billets, en blanc celui de l’Algérie avec des éléphants de guerre. Crédit image : Lila Mouch

D’autres billets provenant du Swaziland, un pays qui aujourd’hui s’appelle l’Eswatini et du Katanga, un pays qui n’existe plus ou encore l’Ouganda avec le dictateur Amin Dada imprimé sur une des faces. 

« On voyage à travers le monde, mais dans sa chaise », rit-il. Nous rajouterons « et dans le temps visiblement ».

Motivé par les éléphants

« Je suis inscrit à différentes revues comme Elephant voices, ou le sanctuaire d’éléphant au Tennessee, où on peut les voir via une caméra et lorsqu’il se passe quelque chose d’exceptionnel, on est notifié. »

M. Labelle a même investi des groupes où il se garde au courant de ce qui se passe avec certains centres d’éléphants comme en Namibie. « Tous les jours, je fais des recherches, je suis abonné à des tas de choses. »

On évoque ensemble la majestuosité et la grandeur des éléphants. Mais aussi la présence de cet animal dans l’Histoire et dans de nombreux évènements, comme les éléphants de guerre. 

« Justement, un de mes billets préférés est un billet de l’Algérie où figurent des éléphants de guerres. »

Un autre de ses billets préférés date de 1920, c’est son plus vieux, c’est un billet de Grand-Bassam en Côte d’Ivoire. Un autre de l’Indochine et du Congo belge ont aussi été imprimés en 1920, « ils sont vieux! ».

« J’aime beaucoup, le cinq onces soudanais, j’ai eu de la difficulté à le trouver, mais grâce à eBay et des catalogues, je l’ai acheté à une personne en Égypte. »

Les anecdotes n’en finissent plus et sont toutes aussi fascinantes. « On est en 1932 maintenant, c’est peut-être celui qui vaut le plus dans ma collection », explique-t-il en nous montrant un billet éthiopien, avec inscrit la somme de 100 thalers, il nous apprendra que le mot « dollars vient du mot thalers. »

Pour Pierre Labelle, ce billet est l'un des plus beau
100 thalers, un billet éthiopien, l’un des préférés du collectionneur. Crédit image : Lila Mouch

Zaïre, Vietnam, Cambodge, Tibet, nous visitons et apprenons des faits historiques à travers une collection de billets, qui l’eut cru? Pierre Labelle a le don pour transmettre sa passion.  

Se garder connecté avec le monde

« Je me tiens branché et mon prochain voyage je veux que ce soit les Maldives. Je sais qu’il faut passer par le Sri Lanka, donc j’irais voir les éléphants », nous dit-il avec certitude.

Cette collection, Pierre Labelle, le dit : elle l’apaise. Examiner, étudier, apprendre lui procure un sentiment d’accomplissement qui l’accompagne au quotidien. « Quand je suis dans le cartable et que je feuillette, je travaille dessus et j’oublie tout. »

« On voyage à travers le monde, mais dans sa chaise » – Pierre Labelle.

« C’est un passe-temps qui n’a pas d’échéancier, c’est toujours on the go, j’adore feuilleter ma collection », avoue-t-il.

En écoutant Pierre Labelle parler de sa collection, on comprend qu’il aime regarder ses billets avec attention. Il les redécouvre presque à chaque fois, et il cherche les animaux dessus comme on cherche où est Charlie?

« Ce sont des œuvres d’art », rappelle-t-il, « ça, c’est l’Angola en 1956, et là, regarde-moi comme il est beau cet éléphant ».

Plusieurs billets de sa collection (Malawi, Portugal, Angola…) Crédit image : Lila Mouch