Encore de considérables défis pour accéder à des services de santé en français 

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En cette Journée mondiale de la santé, ONFR+ s’est penché sur le chemin qui reste à parcourir en Ontario. Le monde hospitalier, les services communautaires, les fondations et réseaux de santé ont les mêmes défis en Ontario : recruter du personnel francophone, mais aussi faire que les professionnels et les étudiants viennent et restent en région.
 
Erin Tabakman, directrice générale de la Fondation de l’Hôpital général de Hawkesbury et district (HGH), le déplore : « Nous avons besoin de personnel bilingue. Ce défi est certainement le même pour tous les hôpitaux, mais pour nous, à Hawkesbury, notre hôpital a beaucoup évolué dans les dernières années. Nous avons redéveloppé de nombreux services et même ajouté des nouveaux. L’hôpital a doublé de superficie, il est donc essentiel pour nous d’engager de nouveaux professionnels de santé. »
 
Cette difficulté en ressources humaines est effectivement globale. Selon Jacinthe Desaulniers, présidente-directrice générale du Réseau des services de santé en français de l’Est de l’Ontario (RSSFE), « le plus gros enjeu est la disponibilité des ressources humaines. On a une très grande pénurie de professionnels de la santé. Pas seulement des docteurs et des infirmières, mais aussi de tout type de travailleur dans la santé, dans des métiers qui n’ont pas toujours été valorisés ».

Jacinthe Desaulniers, présidente-directrice générale du Réseau des services de santé en français de l’est de l’Ontario. Gracieuseté

Des défis qui ne datent pas d’aujourd’hui

Il existe de nombreuses inégalités, d’abord, territoriales. Les étudiants partent faire leurs études dans les grandes villes et délaissent les hôpitaux publics.

« Nous devons offrir la possibilité à nos étudiants de revenir en région, c’est pourquoi il existe des programmes pour les encourager. Nous offrons notamment quatre bourses de 5 000 $ pour les appuyer financièrement les études de nos jeunes », raconte Erin Tabakman de l’HGH.

Une autre difficulté vient des centres de santé qui, dans certains territoires, sont exclusivement anglophones.

Une réflexion s’impose donc sur la proximité les services de santé en français. « On doit créer des points de services plus proches », souligne Estelle Duchon, directrice des services de santé au Centre francophone du Grand Toronto.

« Les gens qui habitent en dehors de Toronto ne devraient pas avoir besoin de venir à Toronto pour recevoir ces services. On les oblige trop souvent à choisir entre services en français éloignés et service de proximité en anglais. »

Erin Tabakman, directrice générale de la Fondation de l’Hôpital général de Hawkesbury et district. Gracieuseté

Pour Mme Tabakman, les hôpitaux sont des places sociales où l’on cultive un sentiment de communauté et de bonnes conditions de travail.

« Notre fondation soutient l’Hôpital général de Hawkesbury. On contribue avec des levées de fonds, qui aujourd’hui ont permis de moderniser nos équipements et cela rend nos centres et hôpitaux plus attractifs. »

Selon une étude de 2014, sur le recrutement et la rétention des professionnels de la santé et des services sociaux bilingues en situation minoritaire, « non seulement la main-d’œuvre est plus rare, plus âgée et plus diversifiée, mais elle est aussi plus exigeante et plus difficile à fidéliser ».

Un enrôlement de la jeunesse en santé qui passe inévitablement par des partenariats et des investissements.

Un combat mis à mal par la pandémie

Jacinthe Desaulniers du RSSFE l’admet : « Avant la pandémie, c’était déjà difficile de recruter des gens qui ont la maîtrise du français, mais aujourd’hui c’est encore plus dur de les attirer et de les garder. » Elle explique que cette pandémie a accéléré les tensions dans la main-d’œuvre bilingue, mais la hausse de la population à soigner était déjà bien connue.

« La pandémie a accru ce problème, mais en même temps a apporté des solutions avec le développement des services virtuels », nuance Mme Duchon qui anticipe que des consultations vont dorénavant rester virtuelles quand la situation est appropriée.

« Pour certaines problématiques, cela répond à la fois à un besoin du patient et à une capacité du médecin à fournir le service sans se déplacer. » 

Estelle Duchon, directrice des services de santé au Centre francophone du Grand Toronto. Gracieuseté

Il n’en demeure pas moins que de nombreuses pratiques médicales ne peuvent pas être effectuées en ligne. Le manque de points de service en français s’est fait sentir durant la pandémie. La télémédecine ne remplacera pas complètement les consultations en personne.

Les personnes âgées ou en situation de démence, ceux en séjours de longue durée, n’ont pas accès à ce service. Un bilan, finalement mitigé, qui sera l’un des sujets du troisième épisode de la série Rencontre au sommet dans le cadre de la Journée internationale de la santé présenté par la Fondation franco-ontarienne ce 7 avril.