Erin O’Toole « bien conseillé » sur les langues officielles
OTTAWA – Avec plusieurs heures de retard en raison de problèmes techniques, Erin O’Toole est devenu chef du Parti conservateur du Canada (PCC) dans la nuit de dimanche à lundi. Durant la course à la chefferie, longue de plusieurs mois, l’ex-ministre des Anciens Combattants a démontré de l’intérêt pour le dossier des langues officielles.
« Erin O’Toole a été le seul à se prononcer sur les langues officielles, même si son plan n’était pas particulièrement détaillé. C’était mieux que les trois autres candidats [Peter MacKay, Derek Sloan et Leslyn Lewis] », analyse la politologue au Collège militaire royal du Canada à Kingston, Stéphanie Chouinard.
« Sa distinction entre Radio-Canada et la CBC en est un exemple, même si cette position pourrait affaiblir Radio-Canada. »
Dans sa plateforme, le député ontarien de Durham, originaire de Montréal, disait vouloir « réduire de moitié le financement de la télévision et du réseau d’information anglophones en vue de les privatiser » au cours d’un premier mandat.
ERIN O’TOOLE est un ancien membre des Forces armées canadiennes. Il fait son apparition à la Chambre des communes en remportant l’élection partielle dans Duhram en novembre 2012. En janvier 2015, il devient ministre des Anciens Combattants du gouvernement de Stephen Harper. Malgré la défaite des troupes conservatrices aux élections de 2015, il se maintient au poste de député et est même réélu, en octobre 2019.
Sacré vainqueur, avec 19 271 points, contre 14 528 pour M. MacKay, Erin O’Toole est aussi arrivé en tête des votes chez les membres québécois du Parti conservateur.
« Des quatre candidats, M. O’Toole a démontré la meilleure connaissance du français. Durant le débat, il était très à l’aise. Dans sa plateforme, il aussi parlé de la reconnaissance de la nation québécoise, ce qui est un symbole important pour les Québécois. »
Pour la politologue, le successeur d’Andrew Scheer devra en revanche mettre les bouchées doubles dans d’autres régions.
« On voit que dans l’Est canadien, il est arrivé troisième au Nouveau-Brunswick, en Nouvelle-Écosse et à l’Île-du-Prince-Édouard. Il y aura du travail à faire ici, car il a moins performé que prévu. »
Alupa Clarke, Christian Paradis et Carl Vallée dans son entourage
Militante conservatrice, la Franco-Ontarienne Cassidy Villeneuve a aussi suivi la campagne avec attention.
« Malgré le contexte de la pandémie, le parti a réussi à atteindre un nombre de cartes de membres record de 269 439. Du jamais vu! C’est vraiment positif pour le parti! »
Cassidy Villeneuve croit aux promesses de campagne de M. O’Toole sur les langues officielles.
« Il a promis d’élargir le mandat de commissaire aux langues officielles, et d’élargir la Loi sur les langues officielles. Le gouvernement libéral de Justin Trudeau l’avait promis, mais ne l’a pas fait. Ce furent des mots jetés en l’air. Cette élection de M. O’Toole est vraiment positive pour les francophones. »
La militante insiste aussi sur l’équipe « forte » du nouveau chef conservateur quant au dossier des langues officielles.
« Il s’est entouré de l’ancien député et porte-parole aux langues officielles, Alupa Clarke, mais aussi de l’ancien ministre de l’Industrie, Christian Paradis, des gens connaissants sur les enjeux francophones. »
Stéphanie Chouinard note aussi la présence de Carl Vallée, l’ancien attaché de presse de l’ex premier ministre du Canada, Stephen Harper, dans l’équipe de M. Toole.
« Sur les langues officielles, il a été bien conseillé. »
L’enigme Peter MacKay
Dans un communiqué de presse, la Fédérations des communautés francophones et acadienne (FCFA) s’est félicitée de la victoire de M. O’Toole.
« J’ai eu le plaisir d’échanger tout récemment avec M. O’Toole, ainsi qu’avec Peter MacKay. Je suis confiant que le Parti conservateur continuera d’être une voix forte au Parlement pour le respect de nos deux langues officielles », a écrit le président Jean Johnson.
Reste l’énigme Peter MacKay. Grand favori de la course à la chefferie, l’ancien ministre de la Justice n’a finalement pas matérialisé cette domination dans les sondages.
« Il a pris sa victoire pour acquise. Il a fait un nombre impressionnant de gaffes durant sa campagne. Il n’a pas démontré de vision claire, n’avait pas de plateforme claire à présenter. Dès le début de la campagne, il s’est tiré dans le pied avec l’électorat francophone avec ses vidéos au français boiteux », laisse entendre Mme Chouinard.
S’il veut devenir premier ministre du Canada dans les prochains mois, M. O’Toole devra s’armer de patience, selon la politologue.
« Le positionnement pendant la course des candidats peut être différent, une fois qu’ils sont chefs. Il est encore trop tôt pour se prononcer. Pour l’instant, M. O’Toole est connu surtout en Ontario où il est député. »
Les élus seront de retour à la Chambres des communes le 23 septembre. M. Trudeau devrait présenter le même jour son plan de relance économique dans un discours du Trône très attendu. La possibilité d’élections anticipées plane toujours.