Crédit image: Sgt Mathieu St-Amour, Rideau Hall Source : Bureau du secrétaire du gouverneur général / gg.ca

OTTAWA – Face à son incapacité à s’exprimer en français, les conservateurs et bloquistes ont déposé une motion en comité parlementaire pour réviser le processus ayant mené à la nomination de la gouverneure générale, Mary Simon, en 2021. Leur tentative risque toutefois d’échouer face aux libéraux et néo-démocrates qui ont signalé leur désaccord.

Au Comité permanent des langues officielles, le Parti conservateur, appuyé par le Bloc Québécois, a déposé une motion demandant à ce que cinq séances de comité soient consacrées pour y comprendre les raisons qui ont amené Justin Trudeau à nommer Mary Simon comme gouverneure générale, malgré le fait qu’elle ne parle pas français. Cette dernière parle l’anglais et l’inuktitut, mais trois ans plus tard et malgré des cours de français, elle n’a pas fait de réels progrès dans l’apprentissage de la langue.

L’inaptitude de Mary Simon à converser en français lors d’une visite d’un organisme à la fin septembre, dans la ville de Québec, a fait l’objet de reportages dans les médias. Cette dernière avait même dû annuler d’autres activités prévues à son horaire dans la capitale québécoise à la suite de la controverse.

Le conservateur Joël Godin (à gauche) et le bloquiste Mario Beaulieu (à droite) en Comité permanent des langues officielles, en 2023. Photo : THE CANADIAN PRESS/Adrian Wyld

Les deux partis d’opposition réclament dans leur motion que Jean-Yves Duclos, le lieutenant du Québec pour les libéraux, son prédécesseur Pablo Rodriguez ainsi que le ministre des Affaires intergouvernementales Dominic Leblanc témoignent. L’auteur de la motion, le conservateur Joël Godin, demande aussi que le secrétaire de la gouverneure générale, Ken MacKillop, la greffière du Conseil privé Janice Charette et d’autres hauts fonctionnaires du Bureau du Conseil privé soient appelé au comité.

Mary Simon n’est pas mentionnée comme possible témoin, car elle « n’a pas à être visée par cette interrogation-là et cette bévue du gouvernement actuel », soutient le conservateur Joël Godin. Il estime qu’il faut plutôt se pencher sur le processus ayant mené à sa nomination. Le député du Bloc Mario Beaulieu voit dans cette nomination « une volonté de remettre en question le bilinguisme pour les instances fédérales au Canada ».

Libéraux et néo-démocrates opposés

« La gouverneure générale devrait être bilingue. J’ai cette opinion, j’ai toujours eu cette opinion et j’aurai toujours cette opinion », a lancé en réplique le député libéral acadien Darrell Samson.

Son collègue québécois Joël Lightbound a poursuivi. « Pour moi, il est impensable que la gouverneure générale, après trois ans, ne parle pas français. Je pense que c’était une nomination qui était certainement regrettable ».

Mais les libéraux et les néo-démocrates ont chacun avancé que le comité avait d’autres chats à fouetter que de se pencher sur le cas de Mary Simon, notamment une étude sur le continuum d’éducation dans la langue de la minorité.

« Pour moi, les milliers d’enfants qu’on perd année après année parce qu’ils n’ont pas accès à des services en français dans la petite enfance, c’est bien plus important que la langue de Mary Simon », juge Joël Lightbound.

Le néo-démocrate Alexandre Boulerice déplore que Mary Simon ne parle toujours pas français, mais estime qu’il y a des sujets plus prioritaires pour le comité. Photo : THE CANADIAN PRESS/Sean Kilpatrick

La gouverneure générale devrait parler anglais et français, a soutenu l’élu néo-démocrate Alexandre Boulerice, en estimant du même souffle que « prendre cinq séances pour parler d’une personne (…) c’est assez burlesque et moi je refuse de jouer dans cette comédie », ce à quoi les oppositions ont répliqué qu’il n’y avait pas de date limite mentionnée pour cette étude en comité.

« Ils sont d’accord avec ma motion, mais ils ne veulent pas y aller. Quelle incohérence », a lancé Joël Godin, tandis que Mario Beaulieu plaidait quelques instants plus tôt « que si on est contre, il faut donner suite ».

Le vote portant sur la motion doit avoir lieu jeudi. Le Bloc Québécois a aussi déposé une motion, mais demandant cette fois-ci le témoignage de Mary Simon au Comité permanent des opérations gouvernementales et des prévisions budgétaires. Le vote sur cette motion n’a pas encore eu lieu.