Haïtiens en détresse : « l’Ontario peut aussi les accueillir »
TORONTO – Alors que des dizaines de milliers d’Haïtiens séjournant aux États-Unis sont menacés d’expulsion, des acteurs franco-ontariens souhaitent leur tendre la main. Ils sont à mettre en place une mission aux États-Unis pour les convaincre de choisir l’Ontario.
ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg
« Ce serait une opportunité manquée que de ne pas aller chercher une partie de ces gens-là qui peuvent contribuer à l’économie de l’Ontario et à l’essor de nos communautés francophones minoritaires. Sinon? Ils vont tout simplement aller ailleurs », lance Saint-Phard Désir, directeur du Conseil économique et social d’Ottawa-Carleton (CÉSOC).
Son organisation est à mettre sur pied des missions aux États-Unis pour faire connaître l’Ontario et ses opportunités professionnelles. « Nous voulons amener des employeurs ontariens dans des villes comme Miami, New York et Boston afin qu’ils puissent recruter ces francophones », explique M. Désir.
Les 58 000 Haïtiens qui ont trouvé refuge aux États-Unis, après le séisme qui a dévasté leur pays en 2010, pourraient perdre le statut spécial leur permettant de vivre et travailler en sol américain. Le président Donald Trump menace de leur retirer ce statut dès le début de 2018.
Offrir des options
Ces missions pourraient se dérouler dès le mois d’octobre, révèle-t-il. Car le temps presse. « Des dizaines de milliers d’Haïtiens ont jusqu’au 22 janvier 2018 pour quitter les États-Unis ou régulariser leur statut. Tous les jours, je reçois des appels des États-Unis de gens qui cherchent des options. Il y a un vent de panique. Nous voulons leur donner des options », souligne-t-il. Saint-Phard Désir affirme que bon nombre de ces citoyens sont des professionnels, dont plusieurs ont obtenu des diplômes d’universités américaines.
Contrairement à la situation à Montréal, où des centaines d’Haïtiens en panique sont entrés au Canada de manière illégale, la mission doit permettre de montrer la voie officielle à privilégier, en misant notamment sur les programmes Entrée Express et Mobilité francophone qui visent les travailleurs qualifiés.
L’Ontario doit se mobiliser pour ouvrir la porte à ces talents francophones, selon Saint-Phard Désir. « Nous avons des communautés en situation minoritaire et nous sommes à tenter de revitaliser ces communautés. Elles pourraient tirer profit de ces citoyens, considérant que la province a une cible de 5 % d’immigrants francophones », insiste-t-il.
Un plan complet est à être complété pour obtenir du financement du ministère. Des employeurs ont déjà indiqué vouloir prendre part à la mission, d’autres sont à être recrutés.
Trump, allié de l’immigration francophone?
« Trump est le meilleur allié. Les conneries de Trump peuvent nous aider avec nos objectifs en immigration, notamment avec les francophones », croit Christian Howald, coordonnateur de projet du Réseau de soutien à l’immigration francophone du Nord de l’Ontario.
Les missions pourront permettre de faire connaître l’Ontario à ces Haïtiens. « On propose tout un plan pour les accueillir. À Thunder Bay, à Timmins, dans le Témiscamingue… les Haïtiens seraient les bienvenus. Ils parlent en plus très bien l’anglais après leur séjour américain, on va s’assurer de leur trouver un emploi. L’Ontario peut aussi les accueillir », dit-il.
Christian Howald travaille également à recruter des employeurs pour ces missions américaines. Des postes disponibles sont aussi recherchés. « Le fédéral met de l’argent pour faire des tournées de recrutement d’immigrants en Angleterre et en Chine, il est temps d’aller dans les destinations francophones », martèle-t-il.
Une porte-parole de la ministre des Affaires francophones, Marie-France Lalonde, a indiqué que ce dossier relevait du Ministère des Affaires civiques et de l’Immigration de l’Ontario. Ce dernier a indiqué à #ONfr qu’il soutenait de nombreuses organisations venant en aide aux réfugiés. Les réfugiés haïtiens ne sont pas actuellement au haut de la liste des demandeurs d’asile dans la province, ajoute-t-on. Une porte-parole de ce ministère a rappelé que la sélection des immigrants choisis pour l’Ontario était faite par le gouvernement fédéral.