Sports

Jacqueline Madogo entre souvenirs olympiques et nouveaux défis

La joie de Jacqueline Madogo après sa qualification en demi-finale du 200 mètres fait partie des images marquantes de ces Jeux olympiques du côté franco-ontarien. Photo : Mark Blinch/COC

[PARIS 2024, UN AN APRÈS]

Un an après les Jeux olympiques de Paris, ONFR vous propose de revenir sur les souvenirs des athlètes franco-ontariens et surtout sur leur année après les Jeux. Aujourd’hui, c’est au tour de la sprinteuse Jacqueline Madogo de clore la série. La native d’Ottawa revient sur cette expérience unique, sur ce qu’elle en a retiré et sur une saison marquée par des hauts, des bas et l’attente d’une nouvelle grande échéance en septembre.

Quand elle repense à Paris 2024, ce ne sont pas les pistes d’athlétisme qui lui reviennent en mémoire en premier, mais des visages familiers. 

« J’avais ma famille qui était là, mes parents, mes frères et sœurs, mon entraîneur et deux coéquipiers avec qui je m’entraîne au quotidien, Zoé Sherar et Craig Thorne. Vivre ça avec eux, c’était incroyable. »

Sur le plan sportif, l’Ottavienne se remémore avec fierté sa demi-finale sur 200 m où elle a terminé septième en 22 sec 81, à quelques centièmes d’une place en finale, mais c’est surtout l’aventure du relais 4×100 m féminin qui l’a le plus marquée. 

Aux qualifications, avec ses coéquipières Sade McCreath, Marie‑Éloïse Leclair et Audrey Leduc, elles ont établi un record national en  42 sec 50, assurant une place en finale. 

 « Les gens ne nous attendaient pas à ce niveau-là, mais on voulait montrer qu’on appartenait à cette finale », rappelle-t-elle avec fierté.

Le jour suivant, en finale, les Canadiennes ont finalement terminé à la sixième place d’une course très relevée avec un temps de 42 sec 69. Seule petite ombre au tableau de cette semaine olympique mémorable, son absence à la cérémonie d’ouverture et  peu de temps pour profiter des autres sports. 

« On était en stage d’entraînement en Espagne, donc on est arrivé seulement la deuxième semaine. Avec mes courses presque tous les jours, je n’ai pas pu aller voir d’autres compétitions. C’est une petite déception, mais au final, je ne changerais rien. »

Coupure total et retour en fanfare 

Dès la fin des Jeux, Jacqueline Madogo s’est offert une vraie coupure, bien méritée après l’intensité de la compétition.

 « Je suis partie une semaine à Nice avec mes parents. Je n’ai même pas regardé mon téléphone pendant sept jours », raconte-t-elle. 

Une déconnexion totale, rare dans la vie d’une athlète de haut niveau, qui lui a permis de retomber sur terre. « Le lendemain de notre arrivée, j’ai dormi 14 heures d’affilée. J’avais besoin de ce repos après toutes ces émotions accumulées. »

Jacqueline Madogo a délivré un discours lors du gala ImpactON sur les valeurs coopératives. Photo : Rudy Chabannes/ONFR

Le contraste a été saisissant lors de son retour au Canada. À Ottawa, la Franco-Ontarienne a eu droit à un accueil chaleureux. Au départ prévu comme un simple barbecue familial, la fête préparée par ses parents a pris une ampleur inattendue. 

« Il y avait tellement de monde que mes parents ont dû déplacer la fête ailleurs », dit-elle. Amis proches, cousins, cousines, famille élargie, mais aussi voisins et soutiens de longue date : tous voulaient féliciter la sprinteuse pour ses exploits parisiens.

À cela s’est ajoutée une véritable vague médiatique. Sollicitée par la presse écrite, les radios et la télévision, Jacqueline Madogo a multiplié les entrevues et les apparitions publiques. 

« Pendant deux mois, j’avais plein d’entrevues et d’événements à faire. C’était flatteur, mais aussi intense », reconnaît-elle. 

Peu à peu, elle a senti le besoin de tourner la page et de se recentrer sur l’essentiel. « À un moment, il fallait revenir à l’entraînement. J’ai choisi de mettre de côté les apparitions pour retrouver ma routine et préparer la suite. »

De la fracture au record

La reprise n’a pas été simple. En décembre, alors que l’élan des Jeux semblait encore proche, Jacqueline Madogo s’est fracturé le pied à l’entraînement. Une blessure frustrante, qui l’a contrainte à une longue période d’arrêt, sans compétition ni véritable préparation, jusqu’en avril.

« Mentalement, c’était difficile. Quand on est habituée à s’entraîner tous les jours, se retrouver soudainement sur la touche, c’est un vrai choc. Mais ce qui m’a gardée motivée, c’était l’objectif des championnats du monde », explique-t-elle.

Le retour s’est pourtant fait rapidement et de manière spectaculaire. Dès sa reprise, elle a enchaîné les rendez-vous internationaux : les Mondiaux de relais en Chine, puis une compétition aux Bahamas, qui lui ont permis de retrouver ses repères et sa confiance.

« Ce n’était pas évident après plusieurs mois d’arrêt, mais j’ai senti que mon corps répondait bien. »

Les résultats n’ont pas tardé à suivre. Sur 100 m, elle a battu son record personnel, un signal fort après sa blessure. Sur 200 m, sa discipline de prédilection, elle a signé un chrono très proche de son meilleur temps.

« C’était encourageant de voir qu’après tout ce temps perdu, j’étais encore en forme. Ça m’a prouvé que je pouvais rebondir, même après une période compliquée. »

Cap sur les Championnats du monde

Jacqueline Madogo se prépare désormais pour son grand retour sur la scène mondiale. Les Championnats du monde d’athlétisme auront lieu à Tokyo du 13 au 21 septembre prochain.

L’équipe de relais 4×100 mètres canadien avec de gauche à droite : Marie-Éloise Leclair, Audrey Leduc, Sade McCreath et Jacqueline Madogo. Photo : Instagram de Jacqueline Madogo, Kyle Llamas/Athletics Canada.

La Franco-Ontarienne est déjà confirmée pour le relais 4×100 m grâce à la qualification de l’équipe canadienne obtenue via les relais mondiaux 2025. En revanche, sa participation en individuel sur le 200 m dépendra de sa sélection officielle. L’annonce sera faite ce jeudi.

« Je pense être dans une bonne position pour le 200 m, mais il faut attendre ce jeudi pour avoir la liste finale. Je croise les doigts; j’ai tout donné dans mes dernières courses, et j’ai vraiment hâte de savoir. » Puis, elle ajoute avec confiance : « Mon corps se sent bien, je me sens prête. »

Qu’elle soit alignée en individuel ou seulement avec le relais, Jacqueline Madogo abordera les Mondiaux de Tokyo avec la confiance d’une athlète qui a su rebondir après les Jeux et surmonter l’épreuve de la blessure.

En clôturant la série Un an après Paris 2024, son témoignage illustre bien l’esprit des Franco-Ontariens rencontrés : entre souvenirs olympiques, résilience et nouveaux défis, une génération d’athlètes qui regarde déjà vers l’avenir.