Des manifestants ont dénoncé à Queen's Park «la lenteur» du gouvernement libéral de Kathleen Wynne à s’engager clairement dans le sens d’une université franco-ontarienne, le 18 février 2016. Regroupement étudiant franco-ontarien

[ANALYSE]

La dernière session parlementaire à l’Assemblée législative s’est terminée un peu comme un feu d’artifices pour les francophones de l’Ontario. Il s’est passé tellement de choses en même temps qu’on ne savait plus où donner de la tête. En l’espace de vingt-quatre heures, le gouvernement a donné son appui à un projet d’université de langue française, la ministre Madeleine Meilleur a tiré sa révérence et le rideau est tombé sur les festivités du 400e anniversaire de présence française dans la province.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

La poussière retombée, les militants pour l’université franco-ontarienne ont jugé que la réponse essentiellement positive de Queen’s Park à un rapport d’un comité consultatif qui recommande la création d’une nouvelle université dans la région de Toronto était malgré tout « inadéquate », selon eux, parce qu’elle renvoyait le dossier « à l’étude pour une troisième fois ».

« Les organismes partenaires sont déçus par les déclarations du gouvernement face aux recommandations du comité qui ne font que retarder la mise en œuvre du projet universitaire », ont exprimé l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO), le Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO) et la Fédération de la jeunesse franco-ontarienne (FESFO) dans un communiqué conjoint.

Ce qui titille les militants, en clair, c’est que le gouvernement libéral de Kathleen Wynne ait décidé de nommer un « comité de planification » avec le mandat de définir la programmation et la taille de la future université au lieu de mettre sur pied, comme ils le réclamaient, un « conseil des gouverneurs transitoire ».

L’AFO, le RÉFO et la FESFO rêvaient d’un rectorat intérimaire, doté d’un budget, d’une autonomie et d’une équipe. Ils ont obtenu à la place un autre groupe de consultation, qui fera d’autres recommandations au gouvernement.

Ce n’était peut-être pas la réponse la plus « adéquate » aux yeux des partisans d’une nouvelle université de langue française. Mais c’était la plus prévisible. Et la plus logique.

Il était clair que Queen’s Park n’allait pas donner un chèque en blanc aux francophones, peu importe la justesse de leur cause. Il était clair qu’avant de bâtir une nouvelle université financée par des fonds publics, la province allait réclamer au minimum une étude de marché. Elle n’est pas si loin, après tout, la déconfiture du collège des Grands-Lacs en 2002 à cause d’un trop petit nombre d’inscriptions.

« Ce projet est une initiative importante qui nécessitera une planification claire et une réflexion approfondie. Le comité et l’étude de marché sont des étapes importantes vers la réalisation de ce projet », a souligné le bureau de Marie-France Lalonde, la nouvelle ministre déléguée aux Affaires francophones, dans un échange de courriels avec #ONfr.

L’épreuve des chiffres

Avec le feu vert du gouvernement, à la mi-juin, le projet d’université franco-ontarienne est entré dans une nouvelle phase. Le rêve doit maintenant se soumettre à l’épreuve des chiffres. Même un « conseil des gouverneurs transitoire » avec toute son autonomie n’y échapperait pas.

De ce point de vue, il est difficile d’imaginer comment la nomination par Queen’s Park d’un « comité de planification » vient vraiment retarder le projet universitaire. La gouvernance, oui. Mais pas la mise en œuvre.

Certes, pour les militants de la première heure, qui voient l’assimilation ronger chaque cohorte d’élèves du secondaire qui n’ont pas accès à des programmes d’études supérieures en français, particulièrement dans le centre et le sud-ouest de la province, toute nouvelle consultation est un irritant.

Mais l’empressement ne doit pas nuire au projet. S’il y a une étape qu’il ne faut pas brûler, c’est celle de la planification.

Cette analyse est publiée également dans le quotidien LeDroit du 4 juillet.