La vérificatrice générale de l’Ontario révèle des manquements dans « le scandale de la Ceinture de verdure »
TORONTO – Publié ce mercredi, le rapport sur l’ouverture au développement de la Ceinture de verdure, par la vérificatrice générale de l’Ontario Bonnie Lysyk, a révélé de nombreux manquements de la part du gouvernement, en plus d’établir qu’un tel étalement urbain n’était pas nécessaire pour atteindre les objectifs gouvernementaux en matière de logement. Une controverse telle que l’opposition en appelle au licenciement du ministre du Logement Steve Clark et à l’ouverture d’une enquête de la Police provinciale de l’Ontario (PPO).
La publication du Rapport spécial sur les changements apportés à la Ceinture de verdure de la vérificatrice générale a déchaîné les passions aujourd’hui à l’Assemblée législative de l’Ontario, les conférences de presse de tous les partis défilant les unes après les autres.
Résultat de six mois d’investigation, le rapport découle d’une demande conjointe des partis d’opposition en janvier 2023 du lancement d’un audit sur les répercussions financières et environnementales de la décision du gouvernement de retirer ou de redésigner des terres à la Ceinture de verdure, soit 15 sites et 7400 acres.
Selon ces conclusions, Bonnie Lysyk déclare que les mesures prises par le gouvernement pour ouvrir les parties de la Ceinture de verdure à des fins d’aménagement n’ont pas tenu compte des répercussions environnementales, agricoles et financières, ignorant l’avis des experts et partis touchés, en plus de n’être pas conformes au Plan de la Ceinture de verdure visant à garantir des protections permanentes pour certaines caractéristiques naturelles importantes et terres agricoles.
Celle-ci parle en conférence de presse de processus « biaisé », avec un traitement préférentiel favorisant certains promoteurs et propriétaires et note également que les propriétaires des 15 terres ou biens-fonds retirés de la Ceinture de verdure pourraient constater, à terme, une augmentation collective de plus de 8,3 milliards de dollars de la valeur de leurs propriétés.
Directement pointé du doigt, le chef de cabinet du ministre des Affaires municipales et du Logement Steve Clark, aurait modifié les critères d’évaluation pour faciliter le retrait des terres de la Ceinture de verdure. Imposant un délai serré de trois semaines, il aurait ainsi limité la capacité de l’équipe du personnel non politique. Le choix des terres n’aurait pas été transparent et objectif : 92 % de la superficie retirée de la Ceinture de verdure ayant été désignées directement à M. Clark par trois promoteurs.
« Si Steve Clark dit qu’il n’était pas au courant de ce qui se passait dans son cabinet, je le crois, mais je dis qu’il aurait dû le savoir », répond Bonnie Lysyk en conférence de presse aux journalistes.
Par ailleurs, le rapport note que, selon le Groupe d’étude sur le logement abordable du gouvernement et les planificateurs en chef des trois régions touchées (Durham, Hamilton et York), l’ouverture de la Ceinture de verdure au développement n’était pas nécessaire pour atteindre l’objectif du gouvernement de construire 1,5 million d’unités de logement. Ces objectifs de construction étaient attribués aux régions avant l’approbation du retrait de terres et biens-fonds de la Ceinture de verdure.
Un « scandale de corruption » pour l’opposition
Le Parti libéral et le Parti vert de l’Ontario en appellent au lancement d’une enquête, de même que le Nouveau Parti démocratique (NPD) qui parle de preuves troublantes de corruption, de collusion et d’irresponsabilité fiscale.
« Appelons cela par son nom : la corruption. Les Ontariens méritent mieux qu’un gouvernement qui enrichit un certain nombre de donateurs du parti aux dépens des Ontariens qui travaillent dur », a déclaré la leader néo-démocrate Marit Stiles qui parle sans détour d’une arnaque du gouvernement et demande la démission immédiate du ministre du Logement Steve Clark.
« Soit le ministre savait ce qui se passait dans son cabinet, soit il est incompétent. Si le ministre ne démissionne pas, nous demandons au premier ministre de le licencier. »
« Nous demandons une convocation de la chambre pour abroger les décisions de l’ouverture de la Ceinture de verdure au développement », ajoute celle-ci qui demande également la révocation des transactions immobilières et la coopération du gouvernement avec les enquêtes du Commissaire à l’intégrité et « toute potentielle enquête criminelle » de la PPO.
Le NPD qui a lancé cet après-midi une pétition en ligne pour récolter des signatures en faveur de la démission du ministre Steve Clark.
Entre Mea culpa et justifications du gouvernement
Une annonce du gouvernement est rapidement organisée après l’enfilade de conférences de presse sur le sujet.
Interrogé sur le choix d’empiéter sur la Ceinture de verdure quand ce n’était pas nécessaire, Steve Clark justifie cette décision par la croissance sans précédent de la population de la province et la situation d’urgence immobilière qui en découle.
Des propos appuyés par le premier ministre de l’Ontario qui blâme le gouvernement fédéral pour l’afflux massif et soudain d’immigrants renforçant la crise du logement.
Concernant la responsabilité qu’il a envers son chef de cabinet, le ministre des Affaires municipales et du Logement déclare être allé « trop vite pour prendre les diligences nécessaires avec pour cause la sévérité du problème ».
« Je prends la pleine responsabilité pour ces processus défectueux », déclare Doug Ford qui s’engage à prendre en compte les 14 recommandations de la vérificatrice générale.
« Mais nous allons construire des logements pour les familles et nouveaux arrivants. C’est la raison d’être de l’Ontario : s’assurer d’avoir un toit sur la tête et un bon travail. »
Ce dernier, qui se défend d’être « amis avec ces développeurs », répond aux journalistes que les milliards de dollars de profit de ces chefs d’entreprise ne le dérangent nullement « tant qu’il en résulte la construction de 50 000 logements pour des centaines de milliers de familles ».
Si la Police provinciale de l’Ontario ne mène pour l’heure pas d’enquête, la vérificatrice générale Bonnie Lysyk évoque une investigation en cours de la part du Commissaire à l’intégrité qui a déjà commencé les entretiens.