La Voix : entrevue croisée avec Sophie Grenier et Mario Pelchat

La gagnante de la saison 9 de La Voix, Sophie Grenier, et son coach, Mario Pelchat. Crédit image: Bertrand Exertier

OTTAWA – L’artiste d’Orléans Sophie Grenier et son coach Mario Pelchat reviennent sur leur victoire à l’émission La Voix. La Franco-Ontarienne a triomphé à la neuvième saison, ce qui lui garantit un contrat de disque avec Musicor et une bourse de 50 000 $. ONFR+ s’est entretenu avec l’artiste d’Orléans et celui qui compte bien l’accompagner dans les prochaines étapes.

« Comment vous sentez-vous, deux jours après votre victoire?

Sophie Grenier : Je me sens encore fébrile. Je suis vraiment touchée et reconnaissante du public qui a voté pour moi.

Vous avez réaffirmé votre identité franco-ontarienne lors de la finale et misé sur la dualité linguistique. Pourquoi avez-vous envie de mettre ces aspects à l’avant-plan?

S.G. : Étant Franco-Ontarienne, avec l’accent qui sonne plus anglophone, il y a des gens qui pensent que je suis anglophone. Je voulais vraiment montrer que je suis francophone. Et qu’il y a plein d’autres gens qui habitent en Ontario qui, eux aussi, parlent en français à la maison et partout. Il y a plein d’autres communautés francophones au Canada. Je voulais vraiment mettre l’emphase sur la protection de la langue française et la reconnaissance de ces communautés dont on n’entend pas souvent parler.

Est-ce quelque chose que vous voulez mettre de l’avant dans votre carrière ou était-ce juste une stratégie pour La Voix?

S.G. : Mon intention n’était pas d’avoir ça comme stratégie pour La Voix. Ça s’est révélé être une bonne stratégie, mais je voulais vraiment aller là pour promouvoir le français. Je veux le faire pour ma carrière aussi. L’album, je veux le faire complètement en français. C’est sûr qu’à un certain point, j’aimerais être internationale si ma carrière me mène à ça. Mais pour l’instant, je me concentre vraiment sur la musique en français.

À 17 ans, Sophie Grenier est la plus jeune à avoir remporté La Voix, mais il est commun que le concours couronne de très jeunes candidats. Crédit image : Bertrand Exertier

Quels seraient vos autres souhaits pour votre album?

S.G. : J’aimerais qu’on puisse me découvrir davantage comme artiste. J’aimerais faire plusieurs styles et que le public découvre des facettes différentes de moi. C’est sûr que, pour l’album, j’aimerais aussi faire L’Oiseau, que j’ai interprétée en audition à l’aveugle.

Mario Pelchat, de quelle façon allez-vous accompagner Sophie Grenier dans la production de cet album?

Mario Pelchat : Je suis directeur de MP3 disques, que j’ai fondé il y a un peu plus de 20 ans et qui est maintenant la propriété de Québecor. Sophie a gagné un contrat de disque avec Musicor, donc c’est la même famille. J’ai demandé à m’impliquer dans le processus de création. Je veux lui prêter main forte.

Je veux aussi mettre à l’avant le fait qu’elle écrit. Elle a du talent comme autrice-compositrice alors c’est important que ce soit mis de l’avant. Je veux vraiment que son ADN ressorte, et non pas imposer un choix de chansons. J’ai toujours travaillé comme ça avec les artistes, en respectant leur identité.

Les finalistes et les coachs ont interprété À toi de Joe Dassin en ouverture de la finale. Crédit image : Bertrand Exertier

Parlez-nous de la rencontre artistique avec Sophie, depuis les auditions à l’aveugle, mais aussi celle qui s’est déroulée sans les caméras.

M.P. : J’ai trouvé ça facile parce qu’elle proposait des idées. À un moment donné, ça a étonné le directeur musical, Antoine Gratton. Il trouvait ça pertinent et tellement bon. Elle n’avait pas peur de donner son point de vue. C’était un travail d’équipe.

Je me suis reconnu dans sa sensibilité, dans sa façon d’interpréter. C’est un peu ma marque de commerce, j’ai fait beaucoup plus de ballades que de chansons rythmiques, moi aussi.

Et puis, L’Oiseau, c’est ma génération. J’étais gamin quand René Simard est arrivé avec cette chanson. Ça a démarré la carrière de René, et là ça démarre celle de Sophie, 50 ans plus tard.

Avez-vous été surpris de voir une jeune femme de 17 ans choisir cette chanson?

M.P. : Ça m’a étonné complètement. Je trouvais ça d’une beauté incomparable.

Mario Pelchat était ému aux larmes après l’audition à l’aveugle de Sophie Grenier. Crédit image : Bertrand Exertier

Vous vous êtes retourné extrêmement rapidement lors de cette audition à l’aveugle. Aviez-vous déjà une image en tête, et est-ce que ce que vous avez vu collait à cette image?

M.P. : Complètement. Cette voix douce, presque angélique, cadrait absolument avec la belle fille qu’elle est. Ça ne nous a pas étonnés. On était, tous les quatre, éblouis par ce qu’on voyait. Mais on l’était déjà par ce qu’on entendait.

J’espérais qu’elle me choisisse. J’étais certain qu’elle allait choisir Marc, car la jeune génération connait beaucoup plus Marc Dupré que moi. J’ai été étonné que plusieurs jeunes me choisissent.

Justement, Sophie, pourquoi Mario?

S.G. : On fait pas mal le même style alors je savais que j’allais apprendre avec lui. Mais c’est sûr qu’il y a aussi le côté stratégie… car je sais que tous les jeunes vont aller vers Marc. Donc, une façon de me démarquer était d’aller dans une équipe où il y aurait moins de jeunes. J’ai quand même pensé un peu stratégiquement! Et là, je suis ici.

M.P. : C’est bon, ça! Peut-être aussi que, si elle avait été dans une autre équipe, ç’aurait été différent. Les artistes plus rythmés auraient été susceptibles de faire en sorte que Sophie soit éliminée. Alors que tous les artistes de mon équipe étaient des artistes à voix avec des chansons touchantes ou des chansons à texte.

Le 9 avril, les quatre finalistes ont chanté avec différents invités de marque, dont Ginette Reno. De gauche à droite : Sophie Grenier (équipe Mario Pelchat), Jay (équipe Corneille), Adam El Mouna (équipe Marc Dupré), Ginette Reno et Christopher Therrien (équipe Marjo). Crédit image : Bertrand Exertier

Certains téléspectateurs ont critiqué votre stratégie des duels, de mettre celles qui étaient vues comme vos deux plus fortes candidates l’une contre l’autre dès le début. Était-ce une stratégie élaborée à l’avance?

M.P. : Oui. Quand j’ai découvert Et bam de Mentissa, je savais que je n’allais pas être le seul à tomber sur cette chanson. J’entendais Sophie ou Steffy la chanter. Effectivement, un autre coach a entendu cette chanson-là et voulait la faire en duel. Mais j’avais déjà levé le drapeau. Quand j’ai appris ça, on ne m’a pas dit qui c’était, mais j’ai dit : non, il n’en est pas question! Je veux que cette chanson soit chantée par Sophie ou Steffy. Alors, je l’ai fait chanter par les deux candidates. Je me suis dit que j’allais en choisir une et sauver l’autre. C’était décidé d’avance.

Avez-vous eu peur quand Marc Dupré a essayé de la voler?

Oh oui, je n’avais pas anticipé ça. Mais j’ai été rapide à appuyer sur mon bouton, pour la rassurer et montrer mon désir de la garder. Cependant, je n’avais pas anticipé qu’elles auraient à nouveau à se retrouver ensemble, en demi-finale. C’était déchirant.

Sophie, votre coach a évoqué votre côté « élève modèle ». Tous les gens avec qui vous avez collaboré vous décrivent aussi comme une force tranquille, réservée en apparence, mais qui sait où elle s’en va et est qui est toujours solide sur scène. Est-ce que c’est aussi comme ça que vous vous voyez?

S.G. : C’est sûr que je suis vraiment une personne réservée mais que, quand j’embarque sur une scène et que je chante, tout de suite, ça part. Je suis quand même stressée dans ces moments-là, mais je suis contente que les gens ne le voient pas. J’ai toujours trouvé ma place sur une scène.

C’est avec une version bilingue de Puisque tu pars / Let’s Talk About Love de Jean-Jacques Goldman et Céline Dion que Sophie Grenier a remporté la finale de La Voix. Crédit image : Bertrand Exertier.

Que considérez-vous avoir appris pendant la saison?

S.G. : J’ai eu la chance de découvrir plein d’artistes différents, comme Erza Muqoli ou Mentissa, dont j’adore l’album. J’ai aussi appris à avoir davantage confiance en mon talent et à avoir plus d’assurance sur une scène.

Comment anticipez-vous votre retour à l’école demain?

S.G. : Je pense que la première journée va être difficile. J’ai tellement d’école à rattraper! Mais je pense que ça va bien aller.

Sophie Grenier étudie en douzième année à l’École secondaire catholique Garneau, à Orléans. Crédit image : Bertrand Exertier

En musique, avec quels artistes aimeriez-vous collaborer?

S.G. : Depuis La Voix 2020, je suis fan de Josiane Comeau, la gagnante de la saison huit. C’est sûr que j’aime aussi Billie Eilish… elle, c’est peut-être trop haut pour moi…

M.P. : Il n’y a jamais rien de trop haut! Il n’y a rien qui me fait peur, tu vas voir! »