Le CCO lance son propre incubateur d’entreprise
TORONTO – Après la Société économique de l’Ontario (SÉO), c’est au tour du Conseil de la coopération de l’Ontario (CCO) de lancer son programme d’incubation, Tracés collectifs, pour aider les entrepreneurs francophones et bilingues à convertir leur projet en affaires, à cette différence près qu’il sera en présentiel dès le départ, implanté au cœur de Toronto, dans ses locaux de la rue Richmond Ouest. L’annonce a été faite jeudi soir.
Avec cet outil, le CCO espère positionner au mieux les entrepreneurs sur le marché et faire du français une corde de plus à leur arc. Les inscriptions seront ouvertes en novembre pour une première cohorte en janvier prochain. Une quinzaine de personnes seront accompagnées durant cinq mois et franchiront des « moments charnières » dans la validation de leurs projets d’entreprise respectifs, qu’il s’agisse d’une société individuelle ou collective.
« On cherche des entrepreneurs qui veulent avoir un impact positif. C’est quelque chose à la laquelle on tient beaucoup. Ils n’auront peut-être pas conscience de cet impact au début mais on va le développer avec eux au fur et mesure », explique Joséphine Adegnon, agente d’innovation, une des architectes du programme.
« On ne va pas travailler un aspect après l’autre mais va avancer sur quatre axes de travail à la fois (méthode des quatre tangentes) qui sont interconnectés, à travers des ateliers et de l’accompagnement individualisé », ajoute Eugénie Da Rold, responsable du service de démarrage d’entreprise. « Travailler en cohorte nous permettra de trouver des solutions ensemble dans une dynamique de co-construction. Cinq mois, c’est intense mais à la fin, ils auront tout en main pour réussir et on ne les laissera pas comme ça dans la nature par la suite. »
L’organisation, qui avait bâti son plan d’affaires à l’été 2019, pour un lancement initial l’automne suivant, avait dû revoir ses plans à cause de la pandémie. Elle avait toutefois offert, dès 2020, un programme virtuel de pré-incubation à Toronto et Hamilton (Élan F) ainsi qu’en présentiel au profit des femmes dans le nord de la province.
« Ces précédents programmes nous ont démontré qu’il y avait un besoin tangible et constituent un bon pipeline vers ce programme d’incubation, qui se justifie d’autant dans sa forme présentielle qu’on a constaté un essoufflement pour le mode virtuel. », relate Julien Geremie, directeur général du CCO. « Un espace physique crée une meilleure émulation, des échanges et un coaching stimulants », poursuit-il.
Préincubateur, incubateur, accélérateur, quelle différence?
À la différence d’un incubateur, un préincubateur s’adresse à des personnes qui ne sont pas certaines devenir entrepreneur mais qui, à la fin du programme, ont développé une idée validée par une étude de marché ou un plan d’affaires qui pourrait fonctionner.
L’incubation succède à la pré-incubation dans le sens où on part d’une idée validée pour aboutir à une situation dans laquelle la personne est prête à vendre son produit ou son service sur le marché, à la tête d’une entreprise dont elle a déterminé la meilleure forme.
Au-delà de l’incubation, il existe une troisième étape : l’accélération, qui consiste pour une entreprise existante à se consolider et se développer, que ce soit en termes de vente, d’image, de diversification ou de performance organisationnelle. Le CCO est notamment à l’origine de l’Accélérateur F, un programme mis en pause, là aussi à cause de la pandémie, et qui pourrait reprendre à l’horizon 2022.
Le CCO entend aussi créer des passerelles vers les investisseurs pour trouver des financements publics et privés. Il travaille, entre autres, avec la Caisse Desjardins qui a mis 100 000 $ sur la table pour rendre possible l’espace de travail torontois. Son directeur, William Bouchet, indique que Desjardins n’aura pas vocation à investir dans tous les projets des entrepreneurs qui sortiront de l’incubateur mais pourra le faire sur des dossiers ciblés.
« On pourra leur offrir une solution mais ça va dépendre de leurs besoins et de leur modèle d’affaires. On ne peut pas donner à tout le monde. À travers le CCO et son incubateur, on va les guider pour aller chercher du financement. On va former des entrepreneurs plus en lien avec la communauté et les besoins de demain. L’investissement qu’on fait va bénéficier à la communauté. »
« Les gens qui veulent juste faire de l’argent, ça ne nous intéresse pas » – Julien Geremie
M. Geremie ajoute que le CCO développe en outre son propre un fonds d’investissement, avec des objectifs de dotation, qui viendra dans un futur proche compléter les ressources à disposition des entrepreneurs.
Ces derniers pourront enfin disposer d’un bureau sur les lieux de l’incubateur, au sein des locaux du CCO. Depuis son déménagement l’été dernier de l’avenue Spadina vers la rue Richmond Ouest, l’organisme aux 30 collaborateurs à travers la province dispose de suffisamment de place pour héberger son incubateur, enrichi d’une salle de conférence.
« On a fait d’une pierre deux coups en anticipant qu’on aller accueillir ce projet qu’on caresse depuis plusieurs années. Cela représente un certain investissement, on ne va pas se le cacher, d’autant que des organismes qui se disaient partenaires n’ont finalement pas souhaité investir, tristement. » Au-delà de la mise de Desjardins, le CCO a rassemblé près de 150 000 $ en fonds de démarrage.
Et de prévenir : « Les gens qui veulent juste faire de l’argent, ça ne nous intéresse pas. On sélectionnera les entreprises qui peuvent et veulent faire une différence dans la communauté, l’environnement, le tourisme ou l’aspect culturel. » Le CCO va tout de même recruter ses jeunes pousses dans le même bassin franco-ontarien que la SÉO qui, si elle développe un incubateur virtuel pour le moment, ne ferme pas la porte à ce que le sien devienne aussi physique.