​Le dilemme du remaniement ministériel

Le grand argentier Charles Sousa a déposé son budget 2016 à l'Assemblée législative de l'Ontario, le 25 février. Archives, #ONfr

[ANALYSE]

Tout indique que Kathleen Wynne prépare un remaniement ministériel d’ici quelques semaines. La première ministre de l’Ontario espérerait ainsi réénergiser son gouvernement libéral avant d’entamer la deuxième moitié de son mandat.

FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault

Il y a déjà quelques occasions d’avancement qui sautent aux yeux.

C’est le cas notamment de Marie-France Lalonde. En un an, la députée francophone d’Ottawa-Orléans, travailleuse sociale de formation, est passée de l’arrière-ban au poste stratégique de whip en chef du gouvernement.

Ayant aussi conservé ses ​premières ​fonctions d’adjointe parlementaire au Développement économique et aux Affaires francophones, Mme Lalonde a démontré qu’elle est capable d’en prendre. Un ministère à caractère social semble à sa mesure.

Glenn Thibeault aurait à son tour de belles qualités de communicateur et de gestionnaire à apporter au cabinet Wynne, en plus de redonner à sa communauté de Sudbury la voix forte qu’elle a longtemps eue dans l’antre du pouvoir.

Politicien expérimenté, francophile à l’origine des excuses de la province pour le Règlement XVII en février, M. Thibeault aurait probablement rejoint le conseil des ministres dès l’an dernier n’eut été de la controverse qui a obscurci son arrivée à Queen’s Park à la suite d’une élection partielle – l’organisateur de son investiture ayant été accusé de trafic d’influence.

D’autres recrues du dernier scrutin, comme Eleanor McMahon, de Burlington, Daiene Vernile, de Kitchener, et Yvan Baker, de Toronto, pourraient obtenir eux aussi de l’avancement.

Des postes pourraient se libérer aux Services sociaux, où Helena Jaczek s’est bien mal dépatouillée avec le scandale du système défectueux d’envoi des chèques d’aide sociale, ou encore aux Services à la jeunesse, où Tracy MacCharles a vécu un dernier trimestre éprouvant sous les feux nourris des opposants à sa réforme de l’aide aux enfants autistes.

Choix difficiles

Ce n’est pas le talent qui manque pour renforcer la deuxième ligne du parti au pouvoir. Mais sur le banc d’en avant, les choix de Kathleen Wynne s’annoncent plus difficiles.

Que faire de Glen Murray, par exemple? Le ministre de l’Environnement est sur le point de déposer un plan d’action musclé pour lutter contre le changement climatique. Mais le document fait déjà polémique. Et au lieu de se faire rassurant, l’élu, connu comme un électron libre, s’est mis à dos les industries de l’automobile et du gaz naturel.

La chef libérale peut difficilement prendre le risque de laisser M. Murray piloter le dossier du changement climatique pendant encore deux ans. Mais elle ne peut pas, non plus, l’écarter au moment précis où il doit déposer un plan transformatif pour les 30 prochaines années. Ça enverrait un message clair de désaveu dont se nourrirait l’opposition jusqu’aux prochaines élections.

La rumeur veut que le prochain conseil des ministres à Queen’s Park soit plus jeune et plus diversifié.

Kathleen Wynne pourrait donc être tentée de confier l’Énergie à un nouveau titulaire et reléguer le vétéran Bob Chiarelli à un autre rôle. Mais c’est un gros risque. Serait-elle prête à sacrifier un jeune loup dans ce ministère sans pitié? Serait-elle prête à se priver d’un bon soldat expérimenté, même s’il arrive aussi à l’élu d’Ottawa de parler trop vite?

La première ministre de l’Ontario est face à un dilemme. Celui de rajeunir le visage de son gouvernement sans trop renier l’héritage de la première moitié de son mandat.

Cette analyse est publiée également dans le quotidien LeDroit du 28 mai.