Les effets du dégel du financement du Conseil des arts attendus
TORONTO – Le dégel du financement du Conseil des arts de l’Ontario (CAO), annoncé il y a quelques mois par le gouvernement, est vu d’un bon œil par le milieu artistique francophone de la province, même si celui-ci n’en perçoit pas encore les effets.
JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72
En août dernier, l’enveloppe budgétaire du Conseil des arts de l’Ontario (CAO) a été augmentée de 50 millions de dollars sur cinq ans, ce qui portera le tout à 80 millions en 2020-2021. Toutefois, quelques mois après l’annonce, on ne sait toujours pas la part spécifique qui y sera réservée aux francophones.
Catherine Voyer-Léger, coordonnatrice générale de l’Alliance culturelle de l’Ontario, indique ne pas ressentir d’impact, pour le moment, de ces nouveaux financements sur le terrain, mais note qu’il y a toujours une période de flottement après une annonce.
« Parfois, quand il y a ce type d’annonce, il peut y avoir une tendance à créer de nouveaux programmes qui paraissent très bien, mais qui ne règlent pas le sous-financement chronique des organismes », lance-t-elle.
Mme Voyer-Léger applaudit toutefois l’annonce du CAO qu’une partie de ces fonds seraient dédiés aux fonctionnements des organismes. Sans le financement de base, les organismes doivent dépendre du financement des programmes spécifiques pour payer des employés.
Selon elle, la hausse du financement du CAO permettra de faire une différence, mais la situation reste encore problématique.
« Le sentiment est que l’on passe notre vie à essayer de financer nos activités, mais on n’a plus le temps de les réaliser. » – Catherine Voyer-Léger
La coordinatrice générale note que puisque les organismes francophones ont historiquement des structures plus fragiles, le gel du financement du CAO s’y faisait encore plus ressentir que chez les anglophones. Toutefois, l’argent n’est pas la solution à tous les problèmes, assure Mme Voyer-Léger.
« Nous, à l’Alliance culturelle de l’Ontario, on arrive très peu à se déplacer sur le terrain, pas seulement parce que nous n’avons pas d’argent, mais parce que nous n’avons pas le personnel pour le faire. Pourtant, nous sommes censés parler au nom de toute la province… »
Le financement de base est un problème, concède le CAO
Clelia Farrugia, responsable des arts francophones au CAO, note que le financement offert aux organismes francophones est basé en fonction des axes stratégiques fixés par le Conseil. Pour l’instant, elle confirme que le deux tiers des subventions vont être répartis pour aider le fonctionnement de base des organismes.
« Toutes ces années où le budget du Conseil des arts de l’Ontario a été gelé, le CAO ne pouvait pas suivre l’évolution des organismes. Maintenant, on espère que ça va aider. » – Clelia Farrugia
Mme Farrugia concède que les besoins sont bien supérieurs à ce nouveau financement.
« Le secteur des arts franco-ontariens est bouillonnant (…) et il faut qu’il soit reconnu au sein de la grande communauté artistique de l’Ontario. Cette communauté artistique francophone a besoin d’encore plus de soutien et on en est conscient », assure-t-elle.
Les artistes francophones font partie des groupes prioritaires subventionnés par le CAO, au même titre que les artistes autochtones et les artistes de la diversité culturelle. Le CAO fait actuellement une tournée de la province pour prendre le pouls de la communauté artistique. C’est à partir de ces consultations que sera déterminé le budget de l’organisme l’an prochain.
Une tendance chronique
Dans le Livre blanc de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) portant sur les Arts et la Culture, publié en avril dernier, le groupe dénonçait que la pression financière du CAO se faisait ressentir sur les francophones. L’organisme rapportait qu’entre 2009 et 2016, les octrois donnés aux artistes franco-ontariens n’avaient que très peu bougé, malgré l’inflation.
Sur les 40 recommandations de l’AFO, cinq étaient spécifiques au CAO. On réclamait, entre autres, que le gouvernement de l’Ontario double le financement de base aux artistes et aux organismes artistiques franco-ontariens par un investissement dirigé spécifiquement aux programmes d’appui aux arts francophones du CAO.
Carol Jolin, président de l’AFO, estime que la francophonie ontarienne doit pouvoir bénéficier d’un milieu artistique fort.
« Les anglophones ont leurs défis et nous avons les nôtres, sauf que pour nous, au niveau de la culture, c’est encore plus important. Si nous ne sommes pas capables de faire bouger notre art et notre culture, où s’en va notre culture franco-ontarienne? » – Carol Jolin
Il espère que les francophones auront leur juste part dans ce nouveau budget.
« Les organisations en ont arraché, il y en a qui ont disparu, d’autres qui ont diminué leurs services (…). On espère qu’avec cette majoration, nous allons avoir notre part et que l’on va pouvoir donner un sérieux coup de barre. »
#ONfr vous propose une série d’articles sur les enjeux culturels en Ontario, dans le cadre de son Facebook Live avec la ministre du Tourisme, de la Culture, et du Sport, Eleanor McMahon, lundi 27 novembre à 13h.
POUR EN SAVOIR PLUS :
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