Les libéraux ontariens orphelins de Des Rosiers et Lalonde

Les deux anciennes députées provinciales, Marie-France Lalonde et Nathalie Des Rosiers, lors des manifestations à Ottawa le 1er décembre 2018. Archives ONFR+

[ANALYSE]

TORONTO – Rien ne va plus du côté des libéraux ontariens, réduits à seulement cinq députés sur les bancs de Queen’s Park. Depuis les départs de Marie-France Lalonde et de Nathalie Des Rosiers du caucus durant l’été, une autre donnée s’ajoute : la représentation politique francophone s’effrite au sein du parti.

En témoigne la liste des six candidats à la chefferie du Parti libéral dévoilée la semaine dernière. De cette liste émergent trois anciens ministres du précédent gouvernement, Michael Coteau, Mitizie Hunter et Steven Del Duca, deux « nouveaux arrivants » en politique, la professeure Kate Graham et le communicant Alvin Tedjo. Tous unilingues.

En fait, seule Brenda Hollingsworth – une avocate mais dont la candidature n’est pas encore validée – maîtrise assez bien le français. Ses chances de victoire, lors de l’investiture le 7 mars prochain, sont tout de même minces. En somme, le Parti libéral devrait compter sur un chef unilingue au moins jusqu’aux élections de 2022.

On est donc assez loin de la tradition d’un chef bilingue ou du moins, capable de tenir une entrevue en français, comme ce fut le cas au temps des anciens premiers ministres David Peterson, Dalton McGuinty, puis dernièrement Kathleen Wynne.

En 2015, le Parti libéral, mais aussi le Parti progressiste-conservateur avec Patrick Brown, bénéficiaient à Queen’s Park d’un chef au français avancé. On disait même que la néo-démocrate Andrea Horwath prenait des cours. Avec Doug Ford et le futur chef libéral, il y a un risque de retour à la case départ. D’autant que la chef du Nouveau Parti démocratique (NPD) a bel et bien renoncé à apprendre la langue de Champlain.

Le NPD devance les libéraux sur les enjeux francophones

Dans ces conditions, le Parti libéral aura-t-il la même sensibilité au français? Rien n’est certain. En chambre, les absences de Mmes Lalonde et Des Rosiers se font sentir, laissant les néo-démocrates en pole position pour torpiller le bilan francophone du gouvernement Ford.

Depuis la rentrée parlementaire, on a vu, par exemple, la députée NPD France Gélinas monter de nouveau aux barricades pour les accents sur les documents administratifs provinciaux ou encore, son collègue Guy Bourgouin défendre une nouvelle version de la modernisation de la Loi sur les services en français.

Les libéraux pendant ce temps? Pas grande chose, sinon quelques déclarations de leur chef intérimaire John Fraser, dans un français faible, se désolant de l’énoncé économique présenté début novembre.

Dans le même temps, les progressistes-conservateurs tentent de rebâtir les ponts avec la communauté francophone, avec par exemple l’élue Natalia Kusendova, bilingue, et bien accueillie lors de son passage au congrès de l’Assemblée de la francophonie de l’Ontario (AFO) fin octobre.

Peut-être du renfort à venir

Évidemment, le fait francophone des libéraux ne peut pas être jugé à l’aune de ce qui est leur plus faible représentation à l’Assemblée législative depuis les années 50. De plus, du renfort pourrait arriver.

Ottawa-Vanier et Ottawa-Orléans connaîtront bientôt une élection partielle. Et si l’on suit la logique historique dans la première circonscription, la candidate libérale et francophone, Lucille Collard, a toutes les chances de l’emporter. Dans Ottawa-Orléans, le libéral Stephen Blais qui parle français partira favori, pouvant compter sur le fort capital de sympathie de Marie-France Lalonde, dorénavant députée fédérale de la même circonscription.

S’ils sont élus, Mme Collard et M. Blais auront la lourde de tâche de veiller à la lentille francophone… et probablement sensibiliser en anglais leur chef à la dynamique des 622 000 Franco-Ontariens.

Cette analyse est aussi publiée dans le quotidien Le Droit du 2 décembre.