La cheffe libérale Bonnie Crombie et la cheffe néo-démocrate Marit Stiles, ici lors de la Journée des Franco-Ontariens en 2024. Photos : Rudy Chabannes

Après le Parti vert la semaine dernière et avant le Parti progressiste-conservateur (PPC) lundi prochain, c’est au tour des libéraux et des néo-démocrates de lever le voile ce vendredi sur leur plateforme. De nombreuses propositions se rejoignent en partie sur le postsecondaire, la santé et l’éducation. D’autres se dissocient un peu plus nettement comme la sécurité ou le logement.

Un médecin de famille pour tous? Les deux partis – que les sondages placent au coude-à-coude dans les intentions de vote derrière le PPC –  s’y engagent. Le Parti libéral (PL) se donne quatre ans pour y parvenir, tandis que le Nouveau Parti démocratique (NPD) mise sur l’approbation d’un plus grand nombre d’équipes de santé familiale et de centres de santé communautaires.

Les deux partis s’accordent aussi sur l’accélération du plan logement. Alors que le gouvernement sortant peine à trouver son rythme de croisière dans la livraison des 1,5 million de logements en dix ans, le NPD affirme qu’il serait en mesure d’accélérer la construction d’unités abordables et d’appliquer un contrôle des loyers afin de protéger les locataires.

Pour y arriver, les libéraux, de leur côté, comptent eux aussi sur un contrôle des loyers. Ils veulent éliminer les frais d’aménagement et instaurer une équité sur le marché locatif pour « restaurer le rêve de l’accession à la propriété ». Ils créeraient en parallèle un Fonds d’amélioration des communautés pour aider les municipalités à couvrir les coûts d’infrastructure.

Même combat aussi sur le Programme de soutien ontarien aux personnes handicapées (PSOPH) que les deux partis ont l’intention de doubler, comme ils l’avaient déjà affirmé en début de campagne électorale.

Impôts : préserver les plus modestes

On veut par ailleurs préserver de taxes les plus revenus modestes dans les deux camps. S’il se hisse au pouvoir, le NPD n’augmenterait pas les impôts des Ontariens gagnants moins de 220 000 $ et taxerait les résidences de luxe à l’achat de maisons valant plus de 3 millions de dollars. Le PL promettrait, lui, une réduction permanente de 22 % de l’impôt des Ontariens dont le revenu imposable se situe entre 51 446 $ et 75 000 $.

L’éducation figure en bonne place de chacun des programmes. Les libéraux construiraient 90 nouvelles écoles au cours des quatre prochaines et réintroduiraient un diplôme d’un an en enseignement pour remédier rapidement à la pénurie d’enseignants. Un gouvernement néo-démocrate investirait 830 millions de dollars en réparation d’écoles.

Mmes Stiles et Crombie tirent un bilan assez similaire sur les projets controversés de la Ceinture de Verdure et de la Place de l’Ontario. Les deux s’engagent à protéger les terres agricoles et à revenir sur le réaménagement de la Place de l’Ontario. De même qu’elles décrivent toutes deux une situation « catastrophique » dans le financement du postsecondaire.

Sur le front de l’emploi, face au risque tarifaire américain, on martèle l’idée de soutenir les entreprises ontariennes et de favoriser l’investissement dans les infrastructures. Bonnie Crombie veut en profiter pour offrir une prime de 150 000 $ pour convaincre les infirmiers exerçant aux États-Unis de revenir au pays. Marit Stiles insiste quant à elle sur des emplois bien rémunérés, un renforcement des chaînes d’approvisionnement et des relations interprovinciales pour renforcer l’économie.

Des différences d’approche

Bonnie Crombie comme Marit Stiles sont en faveur d’un financement de l’Université de Sudbury sans offrir plus de précisions. Mme Stiles ajouterait 20 % de financement pour les universités et annulerait les compressions budgétaires du gouvernement Ford sur les prêts étudiants RAFEO, tandis que Mme Crombie porterait le seuil de revenu pour le remboursement à 50 000 $.

Ce qui distingue les deux partis sur le postsecondaire, c’est le fait que « Mme Crombie mette un plafond du nombre d’étudiants étrangers qui aurait un effet négatif sur la situation financière des universités, alors que Mme Stiles semble suivre les recommandations du panel Blue-Ribbon en proposant d’augmenter les subventions publiques », relève le politologue Peter Graefe.

Sur la francophonie, le NPD porte une attention sur les arts et la culture : « Nous collaborons avec la communauté francophone pour développer et promouvoir l’édition de livres, le cinéma et la télévision, les spectacles et les festivals culturels en français. » Les libéraux abordent l’aspect de santé, proposant d’« élaborer une stratégie francophone en matière de soins de santé afin de garantir aux Franco-Ontariens l’accès aux soins dans leur langue maternelle. »

La plateforme libérale se distingue sur plusieurs points comme la sécurité. Dans les transports en commun, on propose l’embauche de 300 agents spéciaux supplémentaires dans TTC, OC Transpo et Metrolinx. Plus largement, l’ambition est même d’éliminer la criminalité et la drogue des rues.

À l’inverse, le document néo-démocrate met plus d’emphase sur le pouvoir d’achat avec l’instauration d’un rabais sur le panier d’épicerie, mais aussi se fait l’avocat du Nord. On veut par exemple redonner au secteur public l’entretien des routes et ramener la délivrance des permis de conduire sous la coupe du ministère des Transports.

« Le programme libéral semble improvisé avec très peu de détails, juge M. Graefe. C’est un programme chiffré dans la dernière page mais pas du tout expliqué. Pour le NPD, on ne trouve pas de chiffres mais le parti nomme des programmes précis qu’il cherche à bonifier ou à changer, un peu comme le Parti vert et l’éventail de thématiques est plus large. »

Le professeur de science politique à l’Université McMaster relativise toutefois l’impact de ce genre d’outil électoral, estimant que les plateformes intéressent plus les politologues et les organisations de la société civile que les électeurs.