L’Ontario dans la mauvaise voie, selon le Bureau de la responsabilité financière
TORONTO – L’Ontario n’est pas en voie d’atteindre les cibles de dépenses en santé prévues dans son dernier budget et si elle veut maintenir le cap vers l’équilibre budgétaire, le gouvernement devra apporter des correctifs supplémentaires de plusieurs centaines de millions de dollars d’ici la fin de la prochaine année fiscale.
JEAN-FRANÇOIS MORISSETTE
jmorissette@tfo.org | @JFMorissette72
C’est du moins l’avis du Bureau de la responsabilité financière de l’Ontario (BRF) qui a dévoilé un rapport à cet effet, le mardi 10 janvier.
Selon les projections du BRF, en supposant que l’Ontario maintienne un statu quo dans ses dépenses en santé, le gouvernement devra apporter des réductions de dépenses supplémentaires de près de 400 millions de dollars en 2016-2017 dans le système ontarien afin d’atteindre les objectifs fixés dans le dernier budget provincial.
Pour Peter Harrison, analyse financier en chef du BRF, le gouvernement aura tout simplement de la difficulté à arriver à l’équilibre budgétaire si les objectifs du ministère de la Santé et des soins de longues durées ne sont pas atteints.
Le BRF va encore plus loin et estime que si le gouvernement veut maintenir une augmentation annuelle de dépenses en santé de l’ordre de 2,1 %, des économies de l’ordre de 900 millions de dollars seront nécessaires pour le prochain exercice budgétaire et de 1,5 milliard de dollars en 2018-2019.
David Wake, directeur de la responsabilité financière par intérim de l’Ontario, s’est retenu de poser un jugement sur les décisions du gouvernement de maintenir les objectifs de croissances à un bas niveau.
« Ce n’est pas notre rôle d’être alarmé (…) nous soulevons des questions qui doivent être répondues », a-t-il expliqué en conférence de presse.
Des cibles à long terme à revoir
Le BRF note que la projection faite par le gouvernement d’augmenter annuellement les dépenses en santé de 2,1 % sur une période de sept ans ne tiendra par la route à long terme.
En tenant compte des facteurs humains comme le vieillissement de la population, le BRF estime que si la province veut maintenir la même qualité dans ses services, les cibles devront être revues.
« Le BRF estime que les changements démographiques, la croissance des revenus et l’inflation feront pression dans le sens d’une augmentation des dépenses de l’ordre de 5,3 % par année. Cette situation soulève des questions quant à la viabilité du taux de croissance des dépenses en santé du budget de 2016 au-delà de 2018-2019 » – Bureau de la responsabilité financière de l’Ontario
Par ailleurs, le BRF estime que les projections faites pour les dépenses en santé n’ont cessé de diminuer au cours de la dernière décennie, malgré les besoins grandissants dans le système.
Par voie de communiqué, le ministre de la Santé et des soins de longues durées, Dr Éric Hoskins, s’est défendu de sous-financer le système ontarien et a plutôt relancé la balle du côté fédéral.
« Le rapport présenté par le BRF aujourd’hui vient de conclure la même chose que le Conference Board of Canada, soit que les coûts de soins de santé augmenteront de plus de 5 % dans les années à venir. Nous avons besoin d’un partenaire fédéral qui est prêt à investir dans un système de santé financière stable pour les générations futures », a-t-il déclaré.
« Un jeu de roulette russe »
John Vanthof, critique du Nouveau Parti démocratique (NPD) de l’Ontario, déplore les données soulevées par le BRF. Selon lui, pour atteindre ses propres cibles, le gouvernement devra couper davantage dans un système de santé qui est déjà réduit à son minimum.
« Le gouvernement joue un jeu dangereux de roulette russe en maintenant les cibles de croissances basses en espérant se rendre à la prochaine élection », s’exclame le néo-démocrate.
Même son de cloche chez Jeff Yurek, député du Parti progressiste-conservateur de l’Ontario (PC de l’Ontario) et critique de la formation en matière de santé.
« On voit un gouvernement qui souhaite balancer son budget sur les dos des Ontariens », a-t-il dénoncé en conférence de presse.
Selon lui, le gouvernement ne pourra pas atteindre les cibles fixées sans couper en profondeur dans le système, ce qui empêchera les Ontariens d’avoir le « système de santé qu’ils méritent ».
Le budget annuel du ministère de la Santé et des soins de longues durées est d’environ 51,8 milliards de dollars.