L’Ontario francophone bien représenté au Salon du livre de l’Outaouais
GATINEAU – La 44e édition du Salon du livre de l’Outaouais (SLO) s’ouvre aujourd’hui au Palais des congrès de Gatineau. Plus d’une trentaine d’auteurs franco-ontariens y participeront, dont l’invité d’honneur David Ménard. Coup d’œil sur la présence franco-ontarienne à cet événement, de retour en chair et en livres après deux éditions virtuelles.
Chaque année, entre 20 et 30 % des visiteurs du SLO sont Franco-Ontariens. S’adresser à cette clientèle est une priorité pour la directrice de l’événement, Mélanie Rivet. En ce qui a trait « de faire une place privilégiée aux auteurs, aux autrices et aux maisons d’édition de l’Ontario et de la francophonie canadienne, je pense qu’on est un des salons qui est le plus axé là-dessus », affirme-t-elle en entrevue à ONFR+.
L’une des façons d’aller chercher la clientèle au sud de la rivière des Outaouais est de nommer un invité d’honneur spécialement pour représenter l’Ontario français. Ce rôle est assuré cette année par l’écrivain David Ménard, que nous avons rencontré. « Le salon du livre de l’Outaouais a toujours eu une dimension franco-ontarienne (…). Je suis très honoré d’avoir une place à leur table. Ce n’est pas quelque chose qu’on tient pour acquis », dit-il en évoquant les luttes des dernières années, comme le « jeudi noir » de 2018.
La présence franco-ontarienne se manifestera également par un partenariat avec l’Association des auteures et auteurs de l’Ontario français (AAOF,) qui présentera entre autres « Les routes du livre » le 26 février. Il s’agit d’une plateforme numérique qui allie littérature, tourisme, géolocalisation et intelligence artificielle.
Les éditions Prise de parole produisent le spectacle littéraire En cas d’incendie, prière de ne pas sauver ce livre qui mettra entre autres en vedette Mishka Lavigne et Le R Premier.
L’ouvrage collectif Minuit moins une, un partenariat entre le SLO et les Éditions David, sera lancé ce jeudi soir. Une dizaine de jeunes du secondaire et du collège d’enseignement général et professionnel (Cégep) ont été mentorés par des auteurs de la région (Edem Awumey, Lisa L’Heureux, Monia Mazigh et Blaise Ndala) afin de vivre une expérience de publication professionnelle.
Retour en personne
On n’a plus vu de salon du livre au Palais des Congrès de Gatineau depuis 2020, quelques semaines avant le tout premier confinement pandémique. Bien que des éditions virtuelles aient été organisées en 2021 et 2022, rien ne vaut les rencontres en personne entre les auteurs et les lecteurs. David Ménard souligne la dimension solitaire de l’acte d’écriture et l’importance de pouvoir échanger avec ceux qui ont tenu son livre entre leurs mains.
Mélanie Rivet confie que la fébrilité se fait aussi sentir pour les organisateurs : « C’est le même travail de programmer des auteurs et de mettre de l’avant la littérature et les livres, mais on n’avait pas le plaisir de la rencontre, des festivités, des rassemblements. Donc là, on sent qu’on va avoir tout ce plaisir qui va être associé à ce travail de découvertes et de mise en valeur des livres. »
D’autant plus que l’élaboration de la programmation s’est faite tranquillement, au début. Avec l’évolution incertaine de la pandémie, les auteurs et éditeurs attendaient avant de confirmer leur présence. Le tout a déboulé un peu avant les fêtes, après que certains autres salons du livre aient pu revenir avec succès. Aujourd’hui, les hôtels sont pleins et les participants, gonflés à bloc.
Le public sera-t-il aussi enthousiaste? La donnée incertaine reste le nombre d’entrées à la porte de l’événement, mais l’engouement s’est fait sentir dès le lancement de la prévente. L’organisation recevait également de nombreuses questions de citoyens voulant connaître la programmation avant son dévoilement. Les sorties scolaires au SLO ont par ailleurs été rétablies, ce qui assure une base de près de 10 500 jeunes visiteurs. Lors d’une année régulière, le nombre d’entrées au SLO oscille entre 35 000 et 40 000.
Une programmation diversifiée
C’est le thème Terre des livres qui guidera le SLO jusqu’à dimanche. L’expression évoque l’abondance littéraire, comme un territoire imaginaire à défricher. C’est aussi un souhait de représenter toute la terre en proposant des profils d’auteurs variés. Mélanie Rivet explique : « On voulait mettre ça de l’avant de façon très active. Un peu comme une exposition universelle, mais 2023, très inclusive. Par et pour. »
Parmi les nouveautés, on retrouvera un espace théâtre et un espace balado. De plus, tout un pan de la programmation sera dédié aux auteurs autochtones, avec des contes autour du feu, des entretiens sur scène et des lectures publiques. Mélanie Rivet souligne que le fait de regrouper les auteurs autochtones au même endroit améliore leur découvrabilité en stimulant la curiosité des visiteurs.
L’Acadie sera aussi à l’honneur grâce à un partenariat avec le Regroupement des éditeurs franco-canadiens (REFC). Chaque année en alternance, le SLO fait un clin d’œil à une région du Canada, que ce soit l’Ouest, l’Ontario ou l’Acadie.
Suggestions franco-ontariennes
Il sera possible de découvrir de nombreuses histoires franco-ontariennes, notamment lors des séances de dédicaces des différents auteurs. Plusieurs d’entre eux seront aux kiosques de l’AAOF et du REFC. Le producteur d’ONFR+, Sébastien Pierroz, présentera son roman Deux heures avant la fin de l’été, paru le 21 février. L’autrice ottavienne Danielle Carrière-Paris y sera pour la biographie de la sculptrice Rose-Aimée Bélanger, À l’ombre des chuchoteuses.
Quant à David Ménard, il viendra défendre son plus récent ouvrage, L’aurore martyrise l’enfant. Cette œuvre fictive s’inspire de la vie de Marie-Anne Houde, connue dans l’imaginaire collectif comme la marâtre de la jeune Aurore Gagnon. L’auteur explique avoir été traumatisé par le film de 1951, qu’il a vu durant son enfance. Il tente aujourd’hui d’apporter des nuances au personnage, sans excuser ses gestes. « On ne peut pas comprendre complètement la maltraitance infantile si on ne s’intéresse pas aussi aux abuseurs », estime-t-il.
Celui qui s’est aussi penché en poésie sur l’histoire de Marie-Josephte Corriveau (Poupée de rouille, 2018) fera partie d’une table ronde intitulée Villages et histoires tordues : comment traiter des sujets dérangeants en littérature. Cette activité, qui mettra aussi en valeur l’autrice J.D. Kurtness, aura lieu vendredi à 16h30.
Lorsqu’on demande à David Ménard de nommer une œuvre coup de cœur, il pointe l’ouvrage collectif Poèmes de la résistance, paru chez Prise de parole en 2019. Une trentaine d’auteurs y figurent et l’invité d’honneur estime que c’est un excellent cadeau à offrir à quiconque voudrait mieux connaître les Franco-Ontariens.
« En Ontario français, on peut faire bien plus que de survivre en tant que francophones. C’est une province où il fait bon vivre, où on peut s’épanouir, où on peut laisser libre cours à notre inspiration. Parfois, l’image que certains ont des Franco-Ontariens est qu’on est toujours en train de se battre et qu’on est toujours en mode survie. Oui, c’est vrai, parfois. Mais ce n’est pas tout le temps ça. On est quand même bien. Il y a de belles choses qui se font ici et un bel esprit de communauté. Et ça, on le retrouve au Salon du livre. »
La 44e édition du Salon du livre de l’Outaouais se déroule au Palais des congrès de Gatineau du 23 au 26 février.