L’Ontario veut sévir contre le « fichage » par la police
TORONTO – L’Ontario répondra à la controverse entourant les contrôles de routine – ou « fichage » – par différents services de police dans la province avec de nouvelles règles plus « claires et efficaces », a annoncé le ministre Yasir Naqvi, le mardi 16 juin.
FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault
Le gouvernement libéral à Queen’s Park a fait connaître son intention de consulter d’ici l’automne les milieux policier, juridique et communautaire dans le but d’établir de « nouvelles règles provinciales uniformisées » qui devraient s’appliquer à tous les corps policiers ontariens.
« Nous avons tous entendu parler d’expériences négatives associées aux contrôles de routine, sous différentes formes. Des expériences de minorités visibles qui n’ont rien fait de mal et qui se font arrêter sans raison », a déploré M. Naqvi, qui est responsable de la Sécurité communautaire. « C’est clair que le statu quo n’est pas acceptable et que (la situation) ne peut plus perdurer. »
Le clan libéral n’est toutefois pas allé jusqu’à promettre l’abolition de cette pratique du « fichage » qui touche principalement les minorités visibles dans la région de Toronto. Les nouvelles règles provinciales ne viendraient qu’encadrer les services policiers « s’ils choisissent de mener des contrôles de routine », a précisé le ministre.
Longtemps sur la touche, le débat entourant le « fichage » par la police à Toronto a pris une tournure très politique lorsque le maire John Tory s’est mis à dénoncer, début juin, cette pratique qu’il appuyait au départ.
Pas assez loin
Pour le député néo-démocrate Jagmeet Singh, lui-même victime de « fichage », l’annonce du gouvernement ne va toutefois pas assez loin. L’élu de confession sikh de la région de Brampton aurait souhaité que la province mette un terme à ces contrôles aléatoires de la police qui sont plus souvent qu’autrement basés sur la race, selon lui.
« Il faut mettre fin à cette pratique. C’est une pratique qui fait mal à nos communautés. C’est un enjeu sérieux. Ça envoie le message aux minorités visibles qu’elles n’appartiennent pas à nos communautés. C’est inacceptable », a brandi M. Singh, le 16 juin. « Nous n’avons pas besoin d’étudier le dossier. Nous devons agir. »
L’activiste et journaliste torontois Desmond Cole, lui aussi victime de « fichage » à répétition, a l’impression pour sa part que le gouvernement libéral ménage la chèvre et le chou après son projet de règlementation.
« Nous savons à quel point la police a du pouvoir dans notre société. Et il semble y avoir une certaine réticence (de la part du gouvernement) à dire que la police a abusé de ce pouvoir et qu’elles s’est adonnée de manière flagrante à du profilage racial », a dénoncé à son tour M. Cole dans les couloirs de Queen’s Park. « C’est la terminologie que j’aimerais qu’on utilise dans ce cas-ci ».
« Personne ne devrait jamais être la cible de profilage racial », a enchaîné la progressiste-conservatrice Sylvia Jones. « Je suis confiante que nos commissions municipales de police trouveront une solution équilibrée entre la sécurité du public et nos droits individuels », a ajouté l’élue de Dufferin-Caledon.