Le premier ministre Doug Ford et son gouvernement ont rendu public ce mercredi l'énoncé économique d'automne de l'Ontario. Photo : ONFR/Jackson Ho

TORONTO – La mise à jour des prévisions budgétaires de la province publiée ce jour révèle l’objectif très ambitieux d’une baisse du déficit de 5,1 milliards de dollars à l’horizon 2025-2026. Autre démarche affichée : « remettre de l’argent dans vos poches » avec le prolongement de la réduction de la taxe sur l’essence ou encore la distribution de chèques de 200 $. Opération séduction fiscale inefficace pour régler la crise de l’abordabilité selon un économiste francophone.

Le déficit est désormais affiché à 6,6 milliards de dollars en 2024-2025, soit une amélioration de 3,2 milliards par rapport au budget de mars 2024. Des estimations très optimistes, avec un déficit de 1,5 milliard en 2025-2026, soit plus de 5 milliards d’économie à réaliser en un an. Le gouvernement prévoit même un excédent de 0,9 milliard en 2026-2027.

La province miserait sur une croissance économique soutenue, malgré un ralentissement en 2025, avec des prédictions à 1,7 % avant de remonter légèrement en 2026, aux alentours de 2,3 %.

Des perspectives fiscales raisonnables, selon l’économiste Pedro Antunes, avec un point de départ bien meilleur que lors du précédent budget. « Les recettes totales pour 2024-2025 ont été une bonne surprise, surtout grâce aux revenus générés par les propres sources de la province. Ce n’est donc pas étonnant que la situation budgétaire soit au-dessus des prévisions du budget du printemps dernier. »

Photo : Extrait de l’énoncé économique de l’automne 2024/Ministère des Finances

« L’inflation et la croissance de notre économie ont généré des revenus fiscaux inattendus, peut-on lire dans l’énoncé économique. Même après avoir réduit le déficit et réalisé les investissements nécessaires pour soutenir notre province en plein essor, le gouvernement a été en mesure de mettre une partie de cet argent dans les poches des Ontariens. »

Accusant la taxe fédérale sur le carbone à plusieurs reprises de l’augmentation du coût de la vie, l’Ontario met en avant ces mesures « d’allègement fiscal » compensatoires.

Parmi les mesures pour « garder les coûts bas », la prolongation de la réduction de la taxe sur les carburants à 9 cents le litre jusqu’au 30 juin 2025, le gel des frais de scolarité dans les universités et collèges publics, une économie d’environ 1 600 $ par an pour fréquenter une université, et 350 $ par an pour fréquenter un collège.

Il est fait mention des chèques de 200 dollars que chaque contribuable recevra dès 2025, qui a fait l’objet d’une annonce la veille. L’économie estimée est évaluée à « près de 12 milliards de dollars cette année ».

Une solution peu ou pas efficace pour régler les problèmes d’abordabilité, selon M. Antunes, avec ces subventions générales pour tous les ménages, sans tenir compte des revenus.

« La situation économique est vraiment différente pour les ménages à faible revenu et les jeunes par rapport aux ménages plus âgés. On pense que la majorité de l’épargne est surtout concentrée chez les ménages plus riches, plus âgés, et sans dettes. Par contre, les jeunes et ceux à faible revenu peinent à joindre les deux bouts après une période de forte inflation et des coûts de financement encore élevés. »

Ce mini budget réaffirme entre autres la ligne de mire principale du gouvernement avec des investissements majoritaires pour les infrastructures, 27,8 milliards sur dix ans. Avec les travaux à commencer dès 2025 pour la 413, évaluation de construction d’un tunnel sous la 401, le contournement de Bradford, etc.

Des priorités manquées selon les partis d’opposition

La cheffe du NPD a qualifié les points de cette mise à jour économique de la province « d’idées périmées et de promesses creuses », « gaspillant l’argent public ».

La veille de la sortie de l’exercice financier, le parti avait publié une vidéo de Stiles défendant des logements abordables avec la construction de quadruplex, des soins de santé fiables, des écoles solides »

« Nous savons que trop de familles se sentent encore coincées, coincées dans l’attente d’une maison qu’elles peuvent se permettre. Je suis ici pour partager une vision différente, dans laquelle votre gouvernement revient à l’essentiel : construire des maisons, embaucher des médecins, réparer les écoles et rendre la vie abordable pour vous. »

« La vie est insupportablement chère pour beaucoup trop de gens à l’heure actuelle, et les familles de partout dans la province recherchent une aide financière. Le fait est que l’aide que Doug Ford offre aux gens ordinaires en Ontario est dérisoire en comparaison de ce qu’il a donné à ses amis riches et initiés », pointe du doigt Bonnie Crombie, la leader libérale

« Des milliards pour aider des chaînes américaines multimilliardaires comme Walmart et 7-Eleven à vendre de l’alcool un peu plus tôt, pour permettre à un spa étranger de s’installer à la Place de l’Ontario, et des milliards aux promoteurs pour construire des mégamanoirs sur la Ceinture de verdure », résume-t-elle.

Mike Schreiner du Parti vert pointe lui aussi du doigt l’augmentation des coûts, des maisons toujours pas construites et un système de santé défaillant. « Le gouvernement Ford nous a abandonnés. Tout ce que nous devrions pouvoir attendre des gouvernements provinciaux – garder nos voisins logés, garantir la construction de maisons, la disponibilité de médecins et l’accès à la santé mentale – le premier ministre y a renoncé. »