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Nouveaux centres de justice en Ontario : zone d’ombre sur les services en français

Photo : Getty

TORONTO – Un accord entre Ottawa et la province a abouti à la création de cinq centres de justice communautaires pour jeunes en Ontario. Bien qu’ils visent à débloquer l’accès à des suivis juridiques égalitaires, les contours exacts de l’offre de services en français restent flous, selon un expert.

Dans un échange de courriel avec ONFR, Alexandra Wilkes, porte-parole du procureur général provincial, Doug Downey, explique que « le Centre de santé communautaire de TAIBU (dans lequel un de ces nouveaux centres sera ouvert) sera doté d’une équipe de cinq représentants bilingues, sur place, qui offriront divers services en français, y compris des programmes de soins primaires et de promotion de la santé. » Le carrefour communautaire de Rexdale également prendra part au projet, nous dit-on.

Néanmoins, en entrevue, le gestionnaire des services francophones du Centre communautaire de TAIBU, Ahmat Hassane Tchanaye, affirme que « notre centre de justice pour jeunes en français n’a pas de structure officielle et n’a pas encore reçu de financement. On espère le recevoir, car nous avons l’expertise nécessaire et le personnel qualifié pour mener ce projet en français. »

Dans leur communiqué, les gouvernements affirment que « les centres de justice reçoivent 2,9 millions de dollars de financement provincial annuellement. »

« Ils parlent au futur, donc j’imagine que l’idée d’un vrai centre de justice francophone est actuellement en cours de réflexion? », se demande le gestionnaire.

Ahmat Hassane Tchanaye est le gestionnaire des services en français au Centre de santé communautaire TAIBU. Photo : Gracieuseté

Les jeunes passant par ces centres satellites de justice bénéficient d’un accompagnement à l’insertion à l’aide d’un suivi de santé, social et juridique. D’un point de vue global, ces centres permettent d’améliorer la sécurité communautaire.

Le carrefour communautaire de Rexdale de son côté n’a pu fournir de commentaires avant la parution de cet article.

La prévention plus forte que la répression

Avec ce programme, près de 2200 affaires juvéniles pourraient voir leur traitement accélérer chaque année, selon les deux paliers de gouvernement. L’investissement prévu totalise 13 millions de dollars versés sur quatre ans afin de financer les centres à London, dans le Nord-Ouest de Toronto, puis à Est du centre-ville, ainsi qu’à Kenora, puis un cinquième à Barrie.

« L’accès à la justice en français pour les jeunes et familles qui utilisent les services d’un centre de justice à Toronto est assuré dans les instances virtuelles tenues dans les centres de justice satellites », avance la porte-parole du procureur général. Cette dernière ajoute que des instances tenues en présentiel sont aussi tenues à Toronto en vertu du droit à l’utilisation du français dans les instances judiciaires.

Malgré un statut non officiel, la structure d’aide juridique en français au Centre de santé communautaire TAIBU « offre une approche préventive qui intervient au niveau des jeunes et des parents pour prévenir la violence, en mettant l’accent sur le développement personnel, la santé mentale, le bien-être de ces personnes », décrit M. Tchanaye.

Dissuader la récidive tout en exerçant exercer un système de justice équitable pour les jeunes personnes noires et racisées ainsi que leur famille, tel est l’un des objectifs cités par les gouvernements.

« Le Centre TAIBU est un organisme fondé par les noirs, pour les noirs et dirigés par les noirs », souligne-t-il.

Le Centre de santé communautaire TAIBU à Scarborough abritera l’un de ces nouveaux centres de justice, selon le gouvernement. Photo : Gracieuseté

« Pour nous, c’est une façon d’apporter notre soutien à ces jeunes-là pour qu’ils soient sur la bonne voie et pour éviter le décrochage scolaire », confie le gestionnaire.

En attendant la constitution d’un centre en français, M. Tchanaye avertit quant aux limites des capacités du centre à long terme et de son personnel : « Nous avons clairement exprimé ce vœu-là, parce que nous recevons des jeunes, mais on n’a pas de financement. »

M. Tchanaye constate toujours un manque de soutien, notamment vis-à-vis des services connexes à l’insertion des jeunes : « Nous avons un service de bénévolat pour les aider professionnellement, mais c’est complètement non financé, alors que nous avons 153 bénévoles et plus de 200 sur liste d’attente », déplore le gestionnaire de services en français.