Le NPD garde Horwath aux commandes
TORONTO – La grogne qui s’était installée dans le camp néo-démocrate à Queen’s Park après les dernières élections n’aura finalement pas eu raison d’Andrea Horwath. La chef de la deuxième opposition a survécu, contre toutes attentes, à un vote de confiance sur son leadership, le samedi 15 novembre.
FRANÇOIS PIERRE DUFAULT
fpdufault@tfo.org | @fpdufault
Mme Horwath a obtenu l’appui de 77% de quelque 1200 délégués du Nouveau Parti démocratique (NPD) de l’Ontario au sortir d’un congrès post-électoral. C’était suffisant pour qu’elle continue légitimement à diriger la troupe.
« Ce congrès nous a permis de réfléchir à ce que nous venons de vivre, bien sûr, mais aussi de tracer une voie d’avenir. Je me sens portée par l’appui que je viens de recevoir », s’est réjouie Mme Horwath, dont la formation a récolté 21 des 107 sièges à l’Assemblée législative, lors des élections du 12 juin.
L’élue d’Hamilton avait rallié 76% de ses militants après les élections de 2011, alors qu’elle venait d’augmenter la députation de son parti au détriment des libéraux, alors retranchés dans un gouvernement minoritaire.
Plaidoyer de la onzième heure
Malgré un score décevant lors du plus récent scrutin, et une campagne si mal ficelée qu’elle a bien failli provoquer une mutinerie au sein du NPD, plusieurs délégués se seraient « pincés le nez » au moment de décider du sort de Mme Horwath pour, selon certaines sources, éviter une course à la chefferie qui aurait pu diviser encore plus le parti.
Consciente de sa vulnérabilité, Mme Horwath a d’ailleurs tenté, quelques heures avant le vote, de renouer avec ses militants mécontents dans un discours sur le plancher du congrès qui avait lieu à Toronto, à l’épicentre de la défaite du 12 juin.
« Il y a, à n’en point douter, des leçons à tirer des dernières élections », a déclaré Mme Horwath devant une foule qui a semblé d’abord assez tiède. « Nous devons nous assurer que nos membres et nos militants reconnaissent leurs valeurs dans tout ce que nous faisons, tout ce que nous disons, tout ce que nous promettons ».
Cet acte de contrition n’a cependant pas convaincu d’emblée tous les détracteurs de la chef néo-démocrate.
« Elle avait l’air d’un chevreuil qui venait de voir les phares de voiture », a confié à #ONfr un délégué néo-démocrate du nord de la province.
« Embrasser la droite populiste »
Pendant le congrès, plusieurs délégués du NPD ont jeté le blâme à micro ouvert sur Mme Horwath pour avoir forcé la tenue des dernières élections provinciales sans consultation avec la base du parti, ni programme précis. Ils lui ont reproché d’avoir mené une campagne « à la droite des libéraux ». Une erreur impardonnable, selon eux, pour un parti qui se réclame de la gauche.
« Cette campagne était une erreur mais pas un accident », a déclaré le militant néo-démocrate Barry Weisleder, alléguant que la formation avait fait le choix délibéré d’« embrasser la droite populiste » lors des dernières élections.
Le 12 juin, le NPD a fait des gains à Oshawa, Sudbury et Windsor mais a sacrifié trois sièges importants à Toronto. Le parti a aussi perdu la balance du pouvoir.
« À mon sens, la dernière campagne électorale était un désastre », a fustigé Mohammed Boudjenane, un militant francophone du NPD à Toronto. « Nous sommes le troisième parti et nous ne comptons vraiment pas face au gouvernement (libéral) qui a une majorité, alors qu’avant nous étions dans une situation minoritaire ».
Les députés néo-démocrates à Queen’s Park ont joué la carte de la neutralité tout au long du congrès, refusant de défendre ou de désavouer trop vite leur chef.
« Les gens qui sont mécontents sont toujours ceux qui parlent le plus fort », a laissé tomber France Gélinas, députée de Nickel Belt, à Sudbury, et alliée de la première heure de Mme Horwath.
Retour vers la gauche
Après avoir flirté avec le centre, voire la droite de l’échiquier politique, Andrea Horwath a clairement signalé un retour vers la gauche où loge traditionnellement son parti, ainsi qu’un rapprochement avec le milieu syndical, dont l’ancienne conseillère municipale à Hamilton est elle-même issue.
« Nous devons aux générations futures une société plus équitable sur les plans social et économique. Nous leurs devons un système public de santé fort. Nous leurs devons un système public d’éducation fort. Nous leurs devons de l’air pur, des terres et de l’eau propres. Voici nos aspirations. Voici nos buts », a indiqué la chef du NPD depuis 2009, dans son discours devant le congrès.
Au cours des derniers mois, Mme Horwath s’est aussi entourée d’une nouvelle équipe de conseillers, notamment Michael Balagus et Brian Topp, deux stratèges néo-démocrates de longue date.
« C’est le retour du pendule. On dirait bien que (le NPD) tente de revenir vers la gauche », a remarqué à son tour le libéral Arthur Potts, nouvellement élu dans l’ancien fief néo-démocrate de Beaches–East–York, à Toronto.