« Pensez aux jeunes francophones de Toronto »
TORONTO – Il n’y a pas assez d’activités sociales et culturelles en français à Toronto pour les 18-30 ans, selon des jeunes francophones. Il est grand temps que les organismes francophones pensent à eux, sinon ils créeront leur propre organisation, disent-ils.
ÉTIENNE FORTIN-GAUTHIER
efgauthier@tfo.org | @etiennefg
« Pensez aux jeunes francophones de Toronto! Les groupes francophones représentent surtout les professionnels et les enfants. Les activités proposées ne sont pas attractives pour les jeunes adultes », dénonce Roger Gédéon, un étudiant francophone de l’Université de Toronto. Le jeune homme d’origine libanaise a 19 ans et il dit ne pas se reconnaître dans l’offre actuelle des organismes francophones.
« Je suis jeune francophone et je veux rencontrer des jeunes francophones », lance-t-il. « Il est essentiel de bâtir l’attachement à la francophonie torontoise chez la jeune génération. Est-ce que l’Ontario sera seulement un tremplin scolaire pour moi? Si je n’ai pas de réseau professionnel et amical francophone, je vais être tenté d’aller dans une autre ville quand j’aurai obtenu mon diplôme », dit-il.
Il a pris la parole lors du récent rassemblement du Regroupement étudiant franco-ontarien (RÉFO). Rapidement, d’autres jeunes se sont sentis interpellés.
« Il faut un club social pour les jeunes francophones de Toronto », selon Falonne Shimba, une Congolaise d’origine qui habite dans la Ville reine depuis six ans. « Actuellement, si je veux socialiser, je suis forcée de me joindre à un groupe anglophone », dit-elle.
Plus d’efforts doivent être faits pour rejoindre la jeunesse franco-torontoise et la motiver à participer à des activités de la communauté, selon elle. « Quelqu’un qui ne va pas à l’école ou ne travaille pas dans un milieu francophone, on est souvent perdu chez soi. Il manque des activités pour les jeunes », renchérit-elle.
Certains jeunes se sont aussi étonnés de l’absence d’un représentant jeunesse au Comité français de la Ville de Toronto.
Roger Gédéon et d’autres participants caressent l’idée de lancer leur propre organisation jeunesse. « Le simple fait de proposer une activité en français ne signifie pas qu’on va intéresser les jeunes. Le français, ce n’est pas seulement une langue, c’est une culture. Je veux me joindre à une communauté. Il faudra peut-être nous-mêmes être à l’origine du changement », souligne-t-il, tout en se disant prêt à échanger avec les organismes francophones en place pour les sensibiliser à ce sujet.
De l’écoute et des idées
Le RÉFO pourrait-il lui-même être à l’origine d’un plus grand nombre d’activités pour la jeunesse franco-torontoise? « Nous voulons continuer à travailler avec les associations étudiantes, les institutions postsecondaires et les organismes de la communauté pour que les activités en français ne soient pas seulement des occasions rares, mais un fait de la vie quotidienne. C’est un travail de longue haleine, mais nous y croyons! », a confié Myriam Vigneault, lorsqu’interpellée sur la question.
Elle affirme que le RÉFO a organisé cinq activités à Toronto au cours de la dernière année, notamment une formation jeunesse et un concours d’art étudiant.
À l’Alliance française, on se dit sensible aux demandes des jeunes Franco-Torontois. La directrice culturelle, Patricia Guerin, affirme que la programmation est diversifiée et que le public 18-30 peut aussi y trouver son compte. « La musique classique et le jazz va peut-être moins attirer cette clientèle, mais nous avons aussi des films gratuits, des concerts de musique du monde et nous comptons augmenter encore plus notre nombre de spectacles pop, dès septembre », explique-t-elle.
Mme Guerin croit qu’un effort supplémentaire pourrait être fait en matière de marketing pour mieux faire connaître l’offre auprès des jeunes.
Gilles Marchildon, qui a été pendant cinq ans à la tête de l’Association des communautés francophones de l’Ontario à Toronto, souligne que certaines activités jeunesse existent. « Il y a des activités théâtrales, les événements Franc’Open Mic et les soirées d’improvisation qui visent les plus jeunes qui veulent sortir dans un bar », lance-t-il en exemple.
Celui qui est membre du Comité français de la Ville de Toronto invite les jeunes à participer aux discussions. « La structure actuelle du Comité n’est pas parfaite, il manque effectivement un représentant du milieu de l’éducation et peut-être de la jeunesse. Les jeunes peuvent néanmoins se faire entendre par le Comité. D’ailleurs, le RÉFO pourrait venir nous solliciter concernant le projet d’une université franco-ontarienne. Ce serait le genre de dossier que nous pourrions étudier. L’invitation est lancée! », a-t-il indiqué lors d’un entretien avec #ONfr.
Le Centre francophone de Toronto se dit conscient de la nécessité de bonifier l’offre destinée aux jeunes qui ont entre 18 et 30 ans. « Cette clientèle est une des cibles citées dans notre plan stratégique 2015-2020. Nous allons justement développer des activités pour cette clientèle », a fait savoir la responsable des activités culturelles de l’organisme, Sophie Bernier.