Pierre Poilievre devient le nouveau chef du Parti conservateur
OTTAWA – Le Fransaskois d’origine et député de Carleton, Pierre Poilievre, a remporté la course à la chefferie conservatrice du Canada, samedi soir, au premier tour avec 68% des points.
Celui qui était grand favori dès le jour un de la course a battu son principal concurrent Jean Charest (16%). Roman Baber, farouche opposant aux mesures sanitaires et ancien membre du gouvernement Ford a terminé au 4e rang (5%). Le candidat plus centriste Scott Aitchison a récolté 1% des appuis et Leslyn Lewis, une avocate ouvertement antiavortement a fini en troisième place avec 10%.
« Le travail commence ce soir pour remplacer ce vieux gouvernement qui vous coute plus cher et qui vous rapporte moins avec un nouveau gouvernement qui vous place en premier : votre chèque de paie, votre retraite, votre maison et votre pays », a affirmé M. Poilievre, d’entrée de jeu dans son discours de victoire d’une vingtaine de minutes
Comme à l’image de sa campagne des derniers mois, l’adresse de Pierre Poilievre a mentionné à plusieurs reprises la crise actuelle du côut de la vie.
« Les personnes âgées voient leurs économies s’évaporer avec l’inflation. Des jeunes de 30 ans qui ont fait tout ce que nous avons demandé d’eux, obtenir un diplôme et travailler fort vivent dans le sous-sol de leurs parents parce que les prix des maisons ont doublé. Ceux qui ont une maison, c’est davantage d’intérêts pour leur hypothèque. Pas étonnant que les gens s’inquiètent. »
Pierre Poilievre a aussi martelé quelques-unes de ses principales priorités : augmenter la production de pétrole, faire venir plus d’immigrants qualifiés comme des médecins et des infirmières ou encore mettre fin aux mesures sanitaires comme l’application ArriveCan.
Plaidoyer pour le français
Le nouveau leader du Parti conservateur a tenu à souligner « la place toute spéciale dans mon cœur » pour la langue française.
« Mon père qui a des origines canadiennes-françaises et qui vient d’un village fransaskois m’a transmis l’importance de préserver le français dès mon plus jeune âge. En grandissant à Calgary, malheureusement, j’avais trop peu d’occasions de le parler. J’ai du travail à faire. Maintenant, je continue de perfectionner cette langue que j’aime, la langue fondatrice de notre pays. »
Le député de Carleton a aussi souligné que lui et sa femme avaient décidé d’envoyer leurs deux enfants dans des garderies francophones.
« Nos enfants auront la langue française comme première langue, la deuxième langue, évidemment l’espagnol et la troisième langue, l’anglais. »
Dans la plus longue partie en français de son allocution, le nouveau leader de l’opposition a argué que les conservateurs ont « beaucoup à apprendre » des Québécois.
« La nation québécoise tient tête au wokisme », a-t-il ajouté.
Ford et Trudeau réagissent
Le premier ministre de l’Ontario, Doug Ford, a salué la victoire de M. Poilievre, écrivant sur Twitter que « notre pays est plus fort grâce aux personnes qui se présentent pour servir ».
Justin Trudeau a aussi tenu à féliciter le chef conservateur.
« Nous, parlementaires, devons travailler tous ensemble afin d’obtenir des résultats pour les gens de tout le pays. Les Canadiens n’attendent — et ne méritent — rien de moins. »
Dans son message de félicitations, le chef néo-démocrate Jagmeet Singh a évoqué « le moment critique pour les Canadiennes et Canadiens qui sont aux prises avec l’augmentation du coût de la vie ».
« Je sais que nous serons en désaccord sur beaucoup de choses et que nous trouverons rarement un terrain d’entente, mais c’est le moment de montrer aux Canadiennes et aux Canadiens que les leaders disent la vérité et refusent la politique destructrice de la division », a renchéri M. Singh.
Le seul député québécois du Nouveau Parti démocratique (NPD) Alexandre Boulerice, a commenté cette victoire comme l’arrivée du « populisme et du trumpisme chez nous ».
Dans les comtés francophones
Pierre Poilievre a remporté assez facilement l’ensemble des circonscriptions de la province avec une forte présence de francophones :
- Glengarry–Prescott–Russell : 1511 points (75%)
- Nickel-Belt : 1127 points (81%)
- Orléans : 1216 points (57%)
- Ottawa-Vanier : 632 points (46% )
- Sudbury : 794 points (75%)
- Nipissing–Timiskaming : 1 032 points (74%)
- Timmins-Baie-James : 748 points (79%)
- Algoma–Manitoulin–Kapuskasing : 855 points (80%)
Une place pour tous assure Poilievre
Cette course aura été marquée par de nombreuses attaques et échanges acrimonieux entre le clan Charest et Poilievre. Pierre Poilievre a toutefois pris le soin d’assurer ceux qui ne l’appuyaient pas qu’ils auraient leur place au sein de son parti. Il a souligné le « service » de Jean Charest pour le Canada.
Certaines mesures proposées par le nouveau chef, comme congédier le gouverneur de la Banque du Canada ou encore utiliser les cryptomonnaies pour combattre l’inflation ont été vues d’un mauvais œil. Ce dernier devra rapidement rassembler ses troupes alors que les travaux à Ottawa reprennent le 19 septembre.
Au total, 437 854 bulletins de vote ont été reçus, mais quelque 3 % ont été refusés. Sur le total 678 702 de membres, il s’agit d’un taux de participation de près de 65 %. Cette bataille pour la chefferie aura été aussi marquée par la disqualification de Patrick Brown. Le prédécesseur de Doug Ford à la tête des progressistes-conservateurs en Ontario avait été chassé à la suite d’allégations non prouvées de violations des règles financières de la Loi électorale canadienne.
Les conservateurs forment l’opposition officielle depuis trois élections, à la suite de la défaite de Stephen Harper en 2015. Ils possèdent à l’heure actuelle 119 sièges.