Plus de services fédéraux bilingues… en 2023
OTTAWA – Près de deux ans après avoir annoncé une révision complète des règles pour déterminer où sont offerts les services fédéraux bilingues, le gouvernement promet le maintien et l’ouverture de nouveaux bureaux fédéraux bilingues… d’ici 2023.
BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet
« Les changements proposés nous permettront de nous assurer que les communautés sont consultées et que des services bilingues sont offerts là où on en a besoin », a ainsi déclaré, ce jeudi, le président du Conseil du Trésor, Scott Brison.
Selon les calculs du gouvernement, près de 40 % des points de service fédéraux, dont les bureaux de Postes Canada, pourraient devenir bilingues, contre 34 % actuellement. Actuellement, on compte 3 900 bureaux désignés bilingues sur 11 500 à travers le Canada.
« Concrètement, ça veut dire quoi? (…) Ça veut dire un plus grand nombre de services dans les deux langues officielles, notamment dans les organismes de développement économique régionaux, de la Banque de développement du Canada et dans les centres de service de Service Canada », a expliqué la ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie, Mélanie Joly.
« Ça veut dire que tous les aéroports et toutes les gares des capitales provinciales devront dorénavant offrir des services bilingues » – Mélanie Joly, ministre du Tourisme, des Langues officielles et de la Francophonie
La mesure devrait coûter 70 millions de dollars, selon les chiffres fournis par le ministre Brison.
600 nouveaux bureaux bilingues?
Mais ces changements ne devraient pas intervenir tout de suite. Plaidant qu’il lui faut du temps, le gouvernement prévoit de se baser sur les chiffres du recensement de 2021, ce qui signifie que l’effet de ces nouvelles mesures ne se concrétisera sur le terrain qu’en 2023, soit après une à deux prochaines élections fédérales.
« Ça va prendre du temps, car ce sont des changements très significatifs. On veut s’assurer de bien faire les choses et de les implanter correctement », a expliqué M. Brison.
En se fiant aux chiffres du recensement de 2016, le gouvernement estime que plus de 600 nouveaux bureaux bilingues pourraient voir le jour.
Nouvelles règles
Adoptées en 1991 et jamais revues depuis, les règles qui déterminent où les services du gouvernement fédéral doivent être offerts dans les deux langues officielles ont fait l’objet de nombreuses critiques ces dernières années.
À plusieurs reprises, le concept de n’offrir ces services que « là où le nombre le justifie » a été dénoncé, notamment à cause de la diminution du poids démographique de certaines communautés francophones qui n’atteignent plus le pourcentage minimum requis de 5 % pour justifier des services bilingues.
« Il faudrait tenir compte de la vitalité d’une communauté : si elle a des écoles, des centres culturels, des organismes communautaires… », argumentait l’ancienne sénatrice Maria Chaput, qui avait fait de cette question un de ses chevaux de bataille.
Dans cette nouvelle mouture, les services bilingues seraient maintenus tant que la population reste la même ou s’agrandit, même si son poids démographique diminue. Le nouveau règlement tiendrait également compte de la présence d’institution francophone comme d’un facteur pour offrir des services dans les deux langues officielles.
« C’est une bonne nouvelle! L’un des éléments qui nous inquiétait, c’est que là où le poids démographique des francophones était en baisse, mais où il y avait encore les nombres. Aujourd’hui, on a garanti le statu quo pour ses communautés qui sont plus marginalisées », estime le président de la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada, Jean Johnson.
Le gouvernement prévoit également de consulter davantage les communautés et de revoir les règles tous les 10 ans.
Définition inclusive
Autre satisfaction pour la FCFA, le gouvernement changera sa façon de calculer les francophones, en ne se basant plus uniquement sur la langue maternelle, mais aussi sur la première langue officielle parlée à la maison.
« Cela va inclure désormais les nouveaux arrivants dont la première langue n’est pas le français ni l’anglais, mais qui parlent le français à la maison et les élèves de l’immersion dont la famille fait le choix de vivre à la maison en français », souligne le président de l’organisme.
Son enthousiasme est également partagé par la présidente de la Fédération de la jeunesse canadienne-française (FJCF), Sue Duguay.
« Je suis sincèrement fière de voir des changements nécessaires en 2018, comme une définition plus inclusive de la francophonie, en plus d’ajouter une perspective technologique, (…) qui seront beaucoup plus représentatifs de nos réalités et nos besoins. »
Et même si 2023 paraît aussi loin qu’incertain, l’heure était à la célébration pour M. Johnson.
« Nos inquiétudes ont été entendues. Le maintien des services bilingues était crucial pour nous. On a fait un gain important aujourd’hui, on veut le célébrer. Le ton établi aujourd’hui est très intéressant pour la suite des choses. »