Recensement 2016 : des données essentielles pour les francophones
OTTAWA – À partir du lundi 2 mai, l’ensemble de la population canadienne recevra le formulaire court du recensement 2016. Et pour un canadien sur quatre, l’exercice sera encore plus poussé avec le fameux formulaire long qui a suscité tant de débats en 2010. Une entreprise colossale mais ô combien utile, explique Statistique Canada, notamment pour les communautés francophones en contexte minoritaire.
BENJAMIN VACHET
bvachet@tfo.org | @BVachet
Sur les médias sociaux et sur son site Internet, la Fédération des communautés francophones et acadienne (FCFA) du Canada a lancé une campagne, reprise par les organismes porte-paroles provinciaux, pour inciter les francophones en milieu minoritaire à participer au recensement et à afficher leur langue, même s’ils parlent aussi l’anglais.
« Le fait de connaître deux langues officielles ne fait pas de vous un demi-francophone aux yeux de Statistique Canada. D’ailleurs, au recensement de 2011, seulement 118 000 personnes à l’extérieur du Québec connaissaient uniquement le français… or, cette année-là, Statistique Canada a déterminé que plus d’un million de personnes à l’extérieur du Québec avaient le français comme première langue officielle! »
Il faut dire que l’enjeu est de taille pour les communautés francophones. Si les données recueillies cette année ne serviront pas directement à déterminer les services en français délivrés dans les bureaux locaux de Service Canada, elles seront toutefois très utiles dans de nombreux autres domaines.
« Ces données seront notamment utilisées pour la prochaine Feuille de route pour les langues officielles du Canada en 2018 qui sert à financer de nombreux programmes qui répondent directement aux besoins des francophones en milieu minoritaire. Ces données sont également utilisées par les chercheurs, les municipalités, les provinces et le secteur privé pour offrir de nouveaux services ou répondre aux besoins spécifiques de la population francophone », explique le Directeur adjoint de la Division de la statistique sociale et autochtone à Statistique Canada, Jean-Pierre Corbeil.
Ce dernier cite, par exemple, l’importance de connaître le nombre d’enfants francophones pour déterminer quels sont les besoins en matière d’école. Ces données servent aussi, selon lui, à déterminer le taux de bilinguisme au pays, de transmission de la langue, de l’influence de l’immigration d’expression française sur les communautés francophones… Autant de dossiers particulièrement surveillés par la FCFA et ses organismes membres sur le terrain.
« À Toronto, on sait que 45% de la population francophone est issue de l’immigration. Cela entraîne des besoins spécifiques en matière d’accueil des nouveaux arrivants, d’aide à l’employabilité et de reconnaissance des diplômes, par exemple », explique M. Corbeil.
De manière plus générale, les données recueillies influenceront également le montant des transferts fédéraux vers les provinces et territoires. Elles peuvent aussi, comme après le redécoupage de la carte électorale en 2015, influencer le nombre de députés à la Chambre des communes, rappelle le directeur adjoint à Statistique Canada.
Premiers résultats attendus au printemps 2017
Statistique Canada a embauché plus de 35000 personnes pour réaliser cet exercice qui a lieu tous les cinq ans. Par voie électronique ou en format papier, toutes les Canadiennes et tous les Canadiens devront aider l’organisme fédéral a brossé le portrait le plus exact de la population canadienne en répondant à la version courte du formulaire. Pour 25% d’entre eux, il faudra en passer par le formulaire long, redevenu obligatoire sous le gouvernement de Justin Trudeau, pour la plus grande satisfaction de la présidente de la FCFA, Sylviane Lanthier.
« Cette abolition allait nuire à la capacité du gouvernement fédéral de collecter les données nécessaires pour bien desservir nos communautés. Ces informations sont indispensables pour mettre en place des politiques publiques efficaces qui répondent aux besoins des francophones en situation minoritaire, que ce soit en matière de santé, ou d’éducation », avait-elle commenté à #ONfr, en novembre, à l’annonce du retour du caractère obligatoire du formulaire long.
« Le caractère obligatoire du formulaire long est important car c’est celui qui nous donne les résultats les plus précis. S’il est seulement volontaire, cela nuit à la fiabilité des données car de nombreux sous-groupes dans la population, comme les personnes très riches ou très pauvres, les nouveaux arrivants ou les jeunes, répondent moins. Nous avons pu le constater en 2011! », témoigne M. Corbeil.
En 2011, poursuit-il, lorsque le formulaire long a été rendu facultatif, les informations recueillies lors de l’Enquête nationale auprès des ménages n’avaient ainsi pu être diffusées pour 1100 municipalités canadiennes, dont des communautés francophones en situation minoritaire, faute de données fiables.
Très attendues, les données du recensement 2016 devraient commencer à être dévoilées dès le printemps 2017. Les données sur les langues seront, quant à elles, diffusées le 2 août 2017.
Statistique Canada espère donc raccourcir de 10 mois, le temps nécessaire pour collecter et colliger l’information recueillie. Pour y parvenir, l’organisme fédéral compte sur Internet. En 2011, 54% de la population canadienne avait opté pour la voie électronique, et l’organisme espère en convaincre 65% cette année.
« Nous sommes conscients que ces informations sont très importantes pour de nombreux gouvernements, organismes et entreprises. Aujourd’hui, nous sommes en 2016 et ils utilisent encore les données de 2011. Mais la population canadienne a beaucoup changé en cinq ans. »